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Déconfinement : dit-on "rouvrir" ou "réouvrir" ? Quand la norme rencontre l'usage
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Déconfinement : dit-on "rouvrir" ou "réouvrir" ? Quand la norme rencontre l'usage

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A l’heure du déconfinement, c’est un verbe devenu très fréquent dans les médias et dans les conversations de tous les jours. Mais les magasins et autres établissements scolaires sont-ils en train de "rouvrir" ou de "réouvrir" ?

Sur les réseaux sociaux, deux camps s’affrontent. Une véritable guerre de tranchée où les puristes accusent leurs adversaires de laxisme, voire de crime contre la langue française.

Selon l’UCLouvain, qui a analysé des milliers de messages postés sur Twitter pendant le confinement, c’est "rouvrir" qui tient la corde. Dans le correcteur orthographique du site RTBF. be (oui, nous en avons un), le verbe "réouvrir" est qualifié de "néologisme suspect".

Mais que dit la norme ? Le Larousse est, de tous les ouvrages de référence, le plus ouvert. "Réouvrir" existe dans la version en ligne du célèbre dictionnaire. Avec cette mise en garde : "Attention, dans l’expression soignée, et en particulier à l’écrit, on emploie rouvrir et non *réouvrir : le magasin a rouvert. En revanche, on dit la réouverture : la réouverture du magasin (et non la *rouverture)."

Le Robert ferme la porte à toute variante : ce sera "rouvrir" et rien d’autre depuis le 12e siècle. Comme le montre la photo en tête de cet article. Même chose pour le dictionnaire de l’Académie française dont la 9e et dernière édition est, une chance dans ce cas-ci, "consultable jusqu’à la lettre S".

"On condamnera donc"

Le Trésor de la langue française (TLF), qui fait autorité dans le milieu des gens qui se posent ce genre de question, penche aussi pour "rouvrir". Mais le verbe "réouvrir" y figure bien… dans l’article "réouverture" (car, oui, on dit "réouverture", et pas "rouverture"…).

Le TLF cite alors ce passage de "L’encyclopédie du bon français dans l’usage contemporain" : "Il est évidemment peu logique que l’on dise rouvrir alors que l’on ne dit pas rouverture, et que l’on dise réouverture alors que l’on ne dit pas réouvrir. Mais cet illogisme est trop bien ancré dans l’usage pour qu’on puisse le supprimer. On condamnera donc réouvrir, réouvert." Et débrouillez-vous avec ça.

Il n’y a pas une langue qui serait gravée dans le marbre

Mais pourquoi ne "peut-on" pas dire réouvrir alors ? Le verbe existe, puisqu’on le prononce et qu’on l’emploie. Dans une chronique pour le journal Le Soir, Michel Francard, professeur émérite de l’UCLouvain identifie cette raison : "Les condamnations de ce réouvrir mis en vedette par l’actualité sont à rapprocher de celles que suscitent le subjonctif accompagnant 'après que', la construction 'pallier à' ou le redondant 'voire même' : il s’agit de préjugés normatifs dont l’origine remonte à notre éducation familiale ou scolaire, à nos choix littéraires, aux chroniques de langue que nous lisons (ou pas)."

Comment donc claquer la porte entre la norme et l’usage ? Vaste débat. "Il n’y a pas une langue qui serait gravée dans le marbre, comme un objet de vitrine", notait dans l’émission Quotidien sur TMC Bertrand Perier, avocat spécialiste de l’art oratoire.

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