A Lyon, Les restaurants et bars se préparent à « un saut dans l’inconnu »
Au lendemain des annonces d’Edouard Philippe, les restaurateurs lyonnais se démènent ce vendredi afin de pouvoir rouvrir mardi midi, et limiter ainsi les répercussions économiques de la crise sanitaire du Covid-19
- La très touristique rue Mercière (Lyon 2e) s’anime à nouveau ce vendredi. Le compte à rebours est en effet lancé pour de nombreux restaurateurs, avant l’ouverture possible de leur établissement à partir du 2 juin.
- Soulagés de reprendre le chemin du travail, plusieurs gérants confient à « 20 Minutes » leur inquiétude quant à leur capacité d’accueil réduite et à l’absence de touristes.
Accompagnée au loin par une playlist fleurant bon l’été, entre Blur, Queen et Creedence Clearwater Revival, les nombreux restaurateurs de la très touristique rue Mercière ont en partie retrouvé le sourire ce vendredi matin. Au lendemain des déclarations d’Edouard Philippe actant leur possible réouverture à partir du 2 juin, les commerçants de l’emblématique rue touristique lyonnaise s’activent dans ce sens.
Ménage, travaux à finaliser pour certains, reconfiguration des intérieurs et mise en place des terrasses afin de tenir compte du mètre de distanciation imposé entre les tables, ainsi que réapprovisionnement total des stocks, le programme de la journée est forcément chargé. « Depuis hier soir, j’appelle tous mes fournisseurs et ça s’annonce compliqué d’avoir ce qu’il faut pour ouvrir dès mardi midi en raison de ce week-end suivi d’un jour férié », soupire Alexi Geagea, responsable du Comptoir de l’atelier.
« Les gens vont-ils se ruer en terrasses ou auront-ils peur ? »
Si Maxime Chazal, qui dirige La Route des pâtes, regrette encore le timing de fermeture express des restaurants le 14 mars, qui l’a forcé à « balancer plus de 5.000 euros de marchandises », il a soufflé en découvrant les annonces du Premier ministre jeudi. « On craignait des consignes sanitaires beaucoup plus strictes comme le port des gants en cuisine », reconnaît ce gérant, qui va tout de suite faire appel à ses neuf salariés, « mais pas à 100 % », afin de préparer à nouveau des pâtes fraîches lundi et de rouvrir mardi midi. « Il faut faire attention à ne pas se jeter dans le vide, prévient-il. Adaptons-nous dans les prochaines semaines car on n’a absolument aucune vision de ce qu’il peut se passer. Les gens vont-ils se ruer en terrasses après tout ce confinement ou auront-ils peur ? »
Un sentiment partagé par Pascale Manoa, qui rouvrira son bouchon Le Mercière jeudi 4 juin : « Ce saut dans l’inconnu est très angoissant. On sait très bien qu’il n’y aura pas de touristes, et entre tous les gens en télétravail, l’appréhension des clients, et notre capacité d’accueil réduite de moitié avec la distanciation, nous sommes forcés de laisser cinq employés sur dix au chômage technique ».
« Chaque service sera une loterie »
Maxime Chazal ne lâche pas son mètre ce vendredi afin de configurer au mieux son établissement : « On sait déjà faire du Tétris en temps normal et cette nouvelle gestion ne va pas tant nous changer que ça. Je n’aurai pas à baisser de moitié le nombre de couverts possibles comme je le redoutais ». Celui-ci se projette plutôt sur une perte de 25 % de clients en raison des règles imposées par le gouvernement.
Alexi Geagea a aussi réfléchi à l’aménagement estival de sa terrasse, qui pouvait accueillir en temps normal 20 clients. « Chaque service sera une loterie car si je n’ai que des couples, je serai limité à huit personnes, contre 16 si j’ai la chance d’avoir quatre groupes de quatre. Ça fait une sacrée différence mais je ne vais évidemment pas envisager de refuser un couple. » Il regrette « le flou gouvernemental » autour de la possibilité, ou non, d’installer des plaques de plexiglas entre les tables afin d’optimiser son affluence.
« -60 % de chiffre d’affaires dans les prochains mois »
Celui-ci pense reprendre son activité avec une carte réduite de trois entrées et trois plats (contre dix et dix en temps normal) et seulement cinq employés sur sept de retour. « Je me laisse jusqu’à la fin de la semaine prochaine pour décider si je peux repartir sur une configuration normale », indique-t-il. Cette « vie normale » semble déjà loin à en croire Olivier Bret, qui songe à « trois années de galère » avec son Eden Rock Café.
Ce bar-restaurant accueillant avant le Covid-19 une centaine de clients chaque soir devrait connaître « un -60 % de chiffre d’affaires dans les prochains mois ». « Ne bénéficiant pas d’aides de l’Etat, j’ai dû faire un crédit de 100.000 euros au début de la crise sanitaire et j’en ai déjà dépensé 52.000 euros », soupire ce gérant en poste dans la rue Mercière depuis 23 ans.
« Les clients auront besoin d’être rassurés »
Plus de concerts programmés pour le moment ni de clients consommant des boissons debout, les motifs d’espoir sont donc actuellement minces pour l’Eden Rock Café. Olivier Bret a tenté de renouveler son activité ces dernières semaines en proposant des plats à emporter. « Au niveau comptable, ça ne valait pas le coup car on n’a même pas récupéré un dixième de notre chiffre habituel. Mais reprendre le travail a fait beaucoup de bien aux têtes. »
Ravi d’avoir bénéficié d’une gratuité de terrasse de la part de la ville de Lyon (1.200 euros en temps normal le concernant) et de deux mois de loyer offerts par son bailleur, Maxime Chazal aborde cette reprise incertaine avec optimisme : « Cette période épuisante a accentué notre envie de faire passer un bon moment aux clients. Ils auront besoin d’être rassurés et peut-être que nous irons jusqu’à dessiner un sourire sur notre masque pour les accueillir. »
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