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Gérard Collomb.AFP - JEFF PACHOUD

Municipales à Lyon : critiqué par ses anciens alliés, Gérard Collomb perd son investiture LREM

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La République en marche a décidé de retirer son investiture à Gérard Collomb, au lendemain de l'annonce de ce dernier de laisser la tête de liste pour l'élection à la métropole au candidat LR François-Noël Buffet.

La République en marche a retiré ce vendredi son investiture à Gérard Collomb pour le second tour des municipales à Lyon, au lendemain de l'accord de l'ex-ministre avec la droite locale, a indiqué le mouvement présidentiel dans un communiqué. 

"La commission nationale d'investiture dénonce la décision de Gérard Collomb et de Yann Cucherat de s'allier avec Laurent Wauquiez, Étienne Blanc et François-Noël Buffet", souligne LREM, qui prévient qu'une décision similaire s'appliquera à "l'ensemble des candidats dans les arrondissements lyonnais et les circonscriptions de la métropole qui décideraient de s'engager à leur tour dans ce schéma d'alliance".

Les critiques fusent chez LREM

Cette décision est loin d'être surprenante, tant les réactions hostiles ont fusé suite à la décision de l'ancien ministre de l'Intérieur, et principalement au sein de LREM. "La pire image qu'un homme politique puisse donner", un "effondrement", "il se perd lui-même" : de Paris à Lyon, les anciens partenaires politiques de Gérard Collomb n'ont pas trouvé de mots assez durs pour dénoncer son alliance avec la droite pour le deuxième tour des municipales. 

Ce jeudi, le patron de La République en marche Stanislas Guerini avait ainsi estimé que Gérard Collomb avait "franchi une ligne rouge" en renonçant à briguer la présidence de la métropole de Lyon au profit de François-Noël Buffet (LR). En échange, le candidat de droite à la mairie Étienne Blanc s'effacera derrière Yann Cucherat, poulain de Collomb investi par LREM.

En choisissant de s’allier avec Les Républicains, avec la bénédiction de Laurent Wauquiez, plutôt que d’œuvrer au rassemblement de notre famille politique, Gérard Collomb franchit une ligne rouge. Je ne peux l'accepter.

Nous ne troquerons jamais nos valeurs contre un mandat. pic.twitter.com/e8EeGkblfz

— Stanislas Guerini (@StanGuerini) May 28, 2020

À Paris, la porte-parole du gouvernement Sibeth Ndiaye a elle évoqué "une forme d'égoïsme" de celui qui a pourtant été "un des tout premiers compagnons de l'aventure En Marche" : "Qu'aujourd'hui il fasse le choix d'une droite avec laquelle je ne partage aucune valeur, celle de Laurent Wauquiez, ça me déçoit profondément", a-t-elle lâché sur RMC/BFMTV, en référence au président de la région Auvergne-Rhône-Alpes. 

Municipales à Lyon: Sibeth Ndiaye "éprouve énormément de déception vis-à-vis de Gérard Collomb" pic.twitter.com/VERKYSNVUo

— BFM Lyon (@BFMLyon) May 29, 2020

Il "se perd lui-même"

Pour son successeur place Beauvau, le maire de Lyon "se perd lui-même". "Gérard Collomb a perdu les élections municipales au premier tour" et aujourd'hui, "ce choix politique le perd dans le champ politique", a déclaré Christophe Castaner sur RTL. 

"Gérard Collomb s'est perdu dans le champ politique", regrette Christophe Castaner. "C'est une mauvaise nouvelle pour lui, comme pour nous", admet le ministre de l'Intérieur - @RTLFrance

— Pierre Lepelletier (@PierreLepel) May 29, 2020

La ministre de la Transition écologique Elisabeth Borne, de son côté, "ne comprend pas" : "On parle souvent de dépasser les clivages, mais ça ne veut pas dire accepter tous les arrangements", a-t-elle lancé sur Public Sénat. 

À Lyon aussi la rancœur prévaut face aux choix d'un homme qui a dirigé pendant près de 20 ans la ville, longtemps sous les couleurs socialistes, avant de se rapprocher d'En Marche. Jean-Louis Touraine, député LREM du Rhône, qui fut son premier adjoint pendant près de 15 ans, parle d'un "effondrement de (ses) valeurs" : "Il passe par-dessus bord toutes ses belles convictions dans l'espoir de conserver un petit pouvoir et propose de se lier avec une droite qui inclut dans ses rangs des anciens lieutenants de Charles Millon et des adeptes de Sens Commun", soupire-t-il. 

Georges Képénékian, à qui Gérard Collomb avait laissé les clés de la ville à son départ pour le gouvernement, estime lui que "c'est la pire image qu'un homme politique puisse donner, et qui donne raison à celles et ceux qui dénigrent la classe politique". 

"Transgression"

Le camp Collomb a d'ailleurs enregistré une première défection ce vendredi avec Julien Ranc, tête de liste dans la circonscription ouest. Ce dernier a annoncé avec sept colistiers reprendre sa "totale indépendance" après la "manœuvre dépassée" du maire de Lyon, évoquant déjà des prises de contact avec le marcheur dissident David Kimelfeld. 

Même à droite, on ne cache pas son malaise. Le patron des Républicains a évoqué une "décision locale". "C'est le problème de LREM, je me suffis à gérer les miens", a déclaré Christian Jacob sur France 2. 

Face aux critiques, Gérard Collomb assume pleinement, reconnaissant seulement "un déchirement profond" à l'idée de quitter le pouvoir lyonnais pour redevenir simple élu local : "Pour l'avenir de Lyon, il faut une majorité stable pour reconstruire une ville qui va beaucoup souffrir" avec la crise économique qui s'annonce, Lyon étant la première ville industrielle en France, a-t-il justifié sur LCI. 

Le sénateur François-Noël Buffet, ancien soutien de François Fillon, a pour lui des "analyses modérées". Pourquoi tenter de faire à tout prix barrage aux Verts qui sont arrivés en tête au premier tour des municipales à Lyon ? Parce qu'il y aurait "une rupture profonde" assure-t-il. 

S'agissant du président de la République dont il fut très proche, il assure ne pas l'avoir eu au téléphone. Tout en glissant : "Si quelqu'un a montré la voie de la transgression, c'est bien Emmanuel Macron". "Ce qui m'avait plu chez Emmanuel Macron, c'est qu'il pensait le futur et finalement, on a abandonné cette vision globale pour se focaliser sur des mesures particulières dont les Français parfois ne voyaient pas le sens", a encore estimé Gérard Collomb, citant par exemple la réforme des retraites. 

"C'est un moment important dans ma vie et en même temps une libération", a conclu le baron de la politique lyonnaise, aujourd'hui âgé de 72 ans, évoquant sans ciller le "sens du devoir accompli".

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