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Covid-19 : Ralentissement important de l’activité chez les équipementiers automobiles belges
© BENOIT DOPPAGNE - BELGA

Covid-19 : Ralentissement important de l'activité chez les équipementiers automobiles belges

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C’est une tendance au niveau mondial. Elle n’épargne pas la Belgique. L’activité des équipementiers automobiles est en net recul depuis le début de l’année. Le chiffre d’affaires ne devrait pas se rétablir rapidement à court terme.

La fin de l’année 2019 avait redonné l’espoir au secteur automobile. L’activité était à nouveau en progression après une année 2018 en repli. L’arrivée de la crise du Covid-19 en Europe et les mesures de confinement mises en place mi-mars ont eu pour conséquences de faire replonger l’activité du secteur. Le chiffre d’affaires s’est replié de 12% au premier trimestre de 2020, par rapport à l’année précédente. Il a continué à plonger par la suite. Les immatriculations de voitures neuves, par exemple, ont chuté de 55% en mars 2020. Et le secteur s’attend à ce que les résultats soient plus mauvais encore au 2e trimestre. Dans une enquête réalisée par l’association européenne des équipementiers automobiles, 90% des répondants s’attendent à une baisse du chiffre d’affaires de plus de 20% en 2020.

La reprise, elle s’annonce lente et lointaine, en Belgique aussi

Agoria, la fédération des secteurs de l’industrie et des technologies, a mené l’enquête auprès de ses membres. L’activité des équipementiers belges devrait se situer 50% au-dessous du niveau normal, au 2e trimestre de cette année. Les équipementiers automobiles installés en Belgique s’attendent à une reprise progressive au 3e et 4e trimestre. Début mai, ils tablaient sur une reprise à 80 ou 90% du niveau normal. Cependant, depuis début mai, l’activité s’est dégradée, de quoi tempérer fortement l’optimisme du secteur.

La Belgique compte 233 entreprises qui fabrique des équipements pour le secteur automobile.  Elles emploient un peu plus de 32.000 personnes. 198 autres entreprises travaillent indirectement pour le secteur de l'automobile, avec 27.400 travailleurs.  Ces entreprises font de tout. On retrouve au moins une pièce fabriquée en Belgique dans quasi chaque voiture vendue dans le monde, explique Ben Van Roose, responsable pour l’industrie manufacturière chez Agoria : " Il y a des échappements, des pare-brise, des suspensions, des puces électroniques, des pare-chocs, des sièges et des technologies plus haut de gamme comme des dispositifs de détection de l’endormissement. 70% de la production des équipementiers automobiles installés en Belgique est destinée à l’exportation ". Alors, un ralentissement mondial de l’activité du secteur automobile touchera ces équipementiers d’une manière ou d’une autre. " Quand on voit les prévisions pour les prochaines années, on parle que les chiffres ne reviennent pas au niveau de 2019 avant deux ou trois ans ", explique Ben Van Roose. Avec toutefois un espoir : avant le Coronavirus, la tendance était à l’investissement pour rendre les voitures plus vertes. La France prévoit par exemple de soutenir son industrie automobile pour aller dans ce sens. Cela pourrait aider les équipementiers automobiles installés en Belgique à maintenir leurs activités. " Et si le marché en Allemagne repart, cela va reprendre pour les fournisseurs belges aussi ", explique Ben Van Roose. Même s’il faut s’attendre à une réduction de la production.

Selon Agoria, dans l’industrie belge, le secteur de l’équipement automobile a été l’un des plus touchés par le ralentissement économique engendré par le confinement. Mais jusqu’à présent, le secteur des équipementiers automobiles belges a échappé aux faillites et aux restructurations dues à la crise du Coronavirus. Impossible pour le moment de savoir de quoi l’avenir sera fait, sachant aussi que beaucoup d’équipementiers automobiles installés en Belgique sont des filiales de groupes étrangers. Les décisions se prennent donc hors de nos frontières.

Audi et Volvo : les deux dernières usines d’assemblage automobile en Belgique

En Belgique, deux constructeurs automobiles possèdent encore des usines d’assemblage : Volvo à Gand et Audi à Forest. Tous deux ont dû réduire le niveau de production.

A Forest, où l’on produit l’Audi e-tron, la voiture électrique du groupe Audi, le redémarrage s’est fait avec un ralentissement de la cadence. Une partie du personnel a été mise au chômage temporaire. Des discussions sont en cours pour augmenter la productivité. L’usine occupe 3000 salariés auxquels s’ajoutent environ 600 intérimaires. Du côté syndical, on ne relève pas d’inquiétude pour le moment. La situation de l’usine de Forest est particulière, elle est la seule du groupe à produire un véhicule électrique. C’est un produit de niche, une délocalisation n’aurait pas de sens à court terme, dit-on à la FGTB-Métal-Bruxelles.

L’autre usine d’assemblage automobile, Volvo à Gand a connu une période d’arrêt importante. Pendant cinq semaines, les chaînes de montage sont restées à l’arrêt. Du jamais vu dans ce groupe, où l’on ne s’arrête généralement que trois semaines en juillet. L’usine a eu recours au chômage temporaire pour cause de coronavirus. Ici, aussi, les inquiétudes pour l’avenir sont assez faibles. Volvo Gand produit un modèle à succès dans la gamme du constructeur, le SUV XC40. Les commandes pour ce véhicule sont en forte demande, de quoi espérer garder un bon niveau de production sur le site. Même si, ici comme ailleurs, on se demande ce que le marché donnera dans les mois à venir.

Des tendances de reprise incertaines

Le retour à des niveaux de production " normaux " est lent. Au niveau de pays comme la France, l’Espagne, le Royaume-Unis, on était à pratiquement zéro en avril, pendant que l’industrie automobile allemande tournait à 3% de sa capacité. En mai, l’activité a tourné en Europe à environ 30% de la normale. On s’attend à un régime de 60% de la normale en juin, de 70% en juillet. Les équipementiers automobiles belges devraient s’inscrire dans cette tendance, loin en dessous des niveaux du passé, comme l’explique Eric Desomer, consultant chez Deloitte, spécialisé dans le secteur automobile : " On est très largement en dessous de ce qu’on avait dans le passé. Beaucoup d’économistes parlent d’un ‘write-off’. Ce n’est pas une demande qui va revenir. Ce qu’on a perdu dans ces mois, c’est quelque chose qui ne va pas revenir ".

Se pose alors la question de ce que sera le nouvel équilibre pour ce secteur automobile. Quelle sera la trace laissée par la crise du Covid-19 et en quoi cette crise aura changé les habitudes des consommateurs et modifié le marché automobile. Selon Eric Desomer, de Deloitte, deux tendances contradictoires influenceront le nouvel équilibre. " L’une dit que toutes les ventes de voitures et les activités des fournisseurs associés vont diminuer parce que les gens ont été habitués à travailler à la maison et que les gens ont toujours peur. Structurellement, on va être dans un nombre de kilomètres parcourus moins important que par le passé. Ce qui fera baisser la demande en véhicules. L’autre tendance contradictoire qui va un peu pousser la demande vers le haut, c’est qu’on irait vers une augmentation du nombre de voitures car pour les gens, la sécurité est importante. Les gens ont peur des conditions d’hygiène dans les transports en commun et vont préférer utiliser leur voiture. Donc, les deux tendances se font front", explique Eric Desomer Ces deux tendances, ceux plus nombreux, qui auront moins besoin d’une voiture et les autres, plus nombreux aussi qui préféreront être en sécurité dans leur voiture, fixeront un nouvel équilibre qui sera, très probablement, en dessous du niveau d’avant le Covid-19. Il y aura moins de voitures vendues et moins de kilomètres parcourus. Le chiffre d’affaires des équipementiers automobiles s’en ressentira.