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Gérard Collomb a passé un accord avec Laurent Wauquiez.© Stéphane GUIOCHON / MAXPPP / PHOTOPQR/LE PROGRES/MAXPPP

Collomb-Wauquiez : la déflagration lyonnaise

L'accord entre le maire de Lyon et le président du conseil régional d'Auvergne risque de faire des dégâts. Surtout si LR ne parvient pas à remporter la métropole.

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« C'est une déflagration dont les conséquences sont incommensurables. Nous allons assister à un jeu de massacre et les victimes seront nombreuses », note un élu lyonnais de droite. À l'origine de cette prédiction : la décision de Gérard Collomb, le maire de Lyon investi jusqu'alors par LREM, de sceller un accord avec François-Noël Buffet, le candidat LR à la métropole, pour éviter une « déferlante verte » sur la ville et la métropole. L'affaire a été conclue avec l'autre homme fort de la région, le LR Laurent Wauquiez, qui dirige le conseil régional. L'ancien ministre de l'Intérieur a même accepté d'abandonner la tête de liste, renonçant ainsi à diriger la métropole de Lyon qu'il a lui-même portée sur les fonts baptismaux. À l'inverse, aux élections municipales, c'est Étienne Blanc, le candidat LR, qui s'efface derrière Yann Cucherat, placé dans les starting-blocks par Gérard Collomb. « Aujourd'hui, nous voulons une union pour affronter la crise et permettre la reconstruction de Lyon. Union dont nous espérons qu'elle s'élargira dans les jours qui viennent », a ajouté l'actuel maire de Lyon, lors d'une conférence de presse organisée dans l'urgence. De quoi déboussoler les Lyonnais…

Au-delà du choc, cette alliance sonne comme un renoncement aux valeurs défendues par l'équipe Collomb. Et même comme un acte désespéré. L'objectif est de barrer la route aux écologistes, arrivés largement en tête au premier tour, dans huit des neuf arrondissements de la ville de Lyon, et huit des quatorze circonscriptions de la métropole. Mais Gérard Collomb a du mal à convaincre. Dans un premier temps, n'avait-il pas préféré lancer un appel au candidat dissident LREM et président sortant de la métropole David Kimelfeld ? Ce dernier ayant refusé la main tendue de son ancien mentor, il a fallu trouver un plan B. « Cela sent le sauve-qui-peut, soupire David Kimelfeld. La métropole mérite mieux que cela. Faire croire qu'il y a un péril vert n'est pas à la hauteur du débat. » Il dénonce un « arrangement entre ennemis, négocié dans l'ombre entre un Gérard Collomb paniqué par la perspective de la défaite et un Laurent Wauquiez, figure de proue de la droite conservatrice ».

Lyon à l'avant-garde de la macronie ?

Ce n'est pas l'avis de Bruno Bonnell, le député LREM du Rhône. Pour lui, qui reconnaît avoir été surpris comme tout le monde, l'initiative de Gérard Collomb relèverait du chant du cygne. « J'ai été le premier à dire qu'il fallait un accord entre Collomb et Kimelfeld. Ce dernier a refusé… Or, la métropole va avoir besoin d'une majorité de projet pour se reconstruire comme la France en a eu besoin après les grandes guerres », précise le député. Avant d'ajouter : « Et si Lyon était encore une fois à l'avant-garde de la macronie avec cet accord ? La décision de Gérard Collomb d'allier les contraires est courageuse et peut être la seule solution pour défendre notre mode de vie. »

Au QG de LREM, on ne voit pas les choses de cette façon. Loin de là : l'ambiance est tendue. « Je ne peux cautionner un tel accord politique, a écrit dans un communiqué Stanislas Guerini, le patron de LREM. En choisissant de s'allier avec les Républicains avec la bénédiction de Laurent Wauquiez plutôt que d'œuvrer au rassemblement de notre famille politique, Gérard Collomb franchit une ligne rouge. » La commission nationale d'investiture devrait se réunir dans les plus brefs délais pour examiner la désinvestiture de Yann Cucherat comme candidat à la mairie de Lyon. « Je l'affirme clairement : nos valeurs seront toujours plus importantes que quelques sièges dans un conseil municipal. Nous ne les troquerons jamais contre un mandat. »

Sur le terrain la fusion des listes ne va pas de soi

Chez LR, les avis sont aussi très mitigés. « On a évité le pire : Gérard Collomb, tête de liste, alors même qu'il était arrivé en quatrième position, ce n'était pas possible ! » s'agace encore un élu LR de la métropole qui ne comprend pas comment on en est arrivé là. « Comment Laurent Wauquiez a-t-il pu imaginer que des élus se rangeraient derrière l'homme qu'ils combattent depuis 20 ans », ajoute-t-il. Ambiance ! Si l'accord est scellé pour les têtes d'affiche lyonnaise, cela sera plus dur à réaliser sur le terrain. « Il n'y a pas d'accord global de fusion, martèle Alexandre Vincendet, patron de la fédération LR du Rhône. Il y aura des accords locaux dans certains secteurs, circonscription par circonscription. » Dans celle qui le concerne, Plateau Nord-Caluire, il n'y en aura d'ailleurs pas. « Nous sommes largement en tête. Cette circonscription est imprenable », note le maire de Rillieux-le-Pape. Pour lui, la bonne nouvelle est de voir la page Gérard Collomb enfin se tourner.

En attendant, chez les Verts, on se dit serein… « Après avoir gouverné la capitale des gaules avec les écologistes pendant plusieurs années, Gérard Collomb nous déclare dangereux. C'est illisible politiquement, lâche Grégory Doucet le candidat EELV pour les municipales. Qu'y a-t-il derrière cette alliance ? Quel projet vont-ils porter ? » Autant de questions que les écologistes ne sont pas les seuls à se poser. La campagne ne sera pas de tout repos pour les protagonistes de l'accord… Reste que le dernier mot appartiendra aux électeurs et que de l'avis de tous, il est difficile d'anticiper le résultat.