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Gérard Collomb, alors ministre de l'Intérieur, sur le perron de l'Élysée, le 16 mai 2018. AFP

LREM retire l'investiture de Gérard Collomb après son rapprochement avec la droite lyonnaise

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La sentence est tombée vendredi 29 mai, en milieu d'après-midi : le parti de La République en marche (LREM) a annoncé retirer l'investiture de Gérard Collomb, candidat malheureux aux municipales de Lyon (son poulain Yann Cucherat était arrivé troisième derrière Les Verts et Les Républicains). 

"La pire image qu'un homme politique puisse donner", un "effondrement", "il se perd lui-même" : de Paris à Lyon, les anciens partenaires politiques de n'ont pas de mots assez durs pour dénoncer l’alliance de Gérard Collomb, cet ancien proche d’Emmanuel Macron avec la droite pour le deuxième tour des municipales.

Dès jeudi, le patron de LREM, Stanislas Guerini, avait estimé que Gérard Collomb avait "franchi une ligne rouge" en renonçant à briguer la présidence de la métropole de Lyon au profit de François-Noël Buffet (LR). En échange, le candidat de droite à la mairie, Étienne Blanc, s'effacera derrière Yann Cucherat, poulain de Collomb investi par LREM.

Depuis, les paroles amères se multiplient. À Paris, la porte-parole du gouvernement, Sibeth Ndiaye, évoque "une forme d'égoïsme" de celui qui a pourtant été "un des tous premiers compagnons de l'aventure En Marche".

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"Qu'aujourd'hui il fasse le choix d'une droite avec laquelle je ne partage aucune valeur, celle de Laurent Wauquiez, ça me déçoit profondément", a-t-elle lâché sur RMC/BFMTV, faisant référence au président de la Région Auvergne-Rhône-Alpes.

Pour son successeur place Beauvau, Christophe Castaner, le maire de Lyon "se perd lui-même". "Gérard Collomb a perdu les élections municipales au premier tour [et aujourd'hui]". "Ce choix politique le perd dans le champ politique", a déclaré le ministre de l'Intérieur sur RTL.

La ministre de la Transition écologique, Élisabeth Borne, "ne comprend pas". "On parle souvent de dépasser les clivages, mais ça ne veut pas dire accepter tous les arrangements", a-t-elle lancé sur Public Sénat.

"C'est la pire image qu'un homme politique puisse donner"

À Lyon aussi la rancœur prévaut face aux choix d'un homme qui a dirigé la ville pendant près de vingt ans, longtemps sous les couleurs socialistes, avant de se rapprocher d'En Marche.

Jean-Louis Touraine, député LREM du Rhône, qui fut son premier-adjoint pendant près de quinze ans, parle d'un "effondrement de [ses] valeurs".

"Il passe par dessus bord toutes ses belles convictions dans l'espoir de conserver un petit pouvoir et propose de se lier avec une droite qui inclut dans ses rangs des anciens lieutenants de Charles Millon et des adeptes de Sens Commun", soupire-t-il.

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Georges Képénékian, à qui Gérard Collomb avait laissé les clés de la ville lors de son départ pour le gouvernement, estime lui que "c'est la pire image qu'un homme politique puisse donner, et qui donne raison à celles et ceux qui dénigrent la classe politique".

Le camp Collomb a d'ailleurs enregistré une première défection vendredi avec Julien Ranc, tête de liste dans la circonscription Ouest. Ce dernier a annoncé avec sept colistiers reprendre sa "totale indépendance" après la "manœuvre dépassée" du maire de Lyon, évoquant déjà des prises de contact avec le marcheur dissident David Kimelfeld.

Gérard Collomb assume pleinement

Face aux critiques, l'intéressé assume pleinement, reconnaissant seulement "un déchirement profond" à l'idée de quitter le pouvoir lyonnais pour redevenir simple élu local.

"Pour l'avenir de Lyon, il faut une majorité stable pour reconstruire une ville qui va beaucoup souffrir [avec la crise économique qui s'annonce, Lyon étant la première ville industrielle en France]", a-t-il justifié sur LCI.

Le sénateur François-Noël Buffet, ancien soutien de François Fillon, a pour lui des "analyses modérées". Pourquoi tenter de faire à tout prix barrage aux Verts qui sont arrivés en tête au premier tour des municipales à Lyon ? "[Parce qu']il y aurait une rupture profonde", assure-t-il.

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S'agissant du président de la République dont il fut très proche, il assure ne pas l'avoir eu au téléphone. Tout en glissant : "si quelqu'un a montré la voie de la transgression, c'est bien Emmanuel Macron".

"Ce qui m'avait plu chez Emmanuel Macron, c'est qu'il pensait le futur et finalement on a abandonné cette vision globale pour se focaliser sur des mesures particulières dont les Français parfois ne voyaient pas le sens", a encore estimé Gérard Collomb, citant par exemple la réforme des retraites.

"C'est un moment important dans ma vie et en même temps une libération", a conclu le baron de la politique lyonnaise, aujourd'hui âgé de 72 ans, évoquant sans ciller le "sens du devoir accompli".

Avec AFP