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N’oublions pas les élèves porteurs d’un handicap qui ont été éloignés de l'enseignement spécialisé pendant le confinement

Opinions

Contribution externe

Publié le 29-05-2020 à 09h51 - Mis à jour le 29-05-2020 à 14h15

Une opinion d'Isabelle, Marion, Sabine, Céline et Stéphanie, membres de l'équipe éducative d'une école secondaire d'enseignement spécialisé dans le Brabant wallon.
Durant le confinement, ces jeunes, éloignés de l’enseignement spécialisé, ont parfois manqué de soins. Nous aimerions les voir de retour à l’école d’ici le 30 juin.

Dans notre école secondaire d’enseignement spécialisé, petite école familiale accueillant des élèves porteurs d’un handicap moteur, nous avons choisi un métier humain. Un métier où nous prenons soin des jeunes au quotidien en cherchant à augmenter leur épanouissement social et à leur donner une autonomie maximale. Cela en veillant, de par chacune de nos fonctions conjointes, à leur bien-être physique, à leur capacité de communication, à leur bien-être psycho-affectif.

Pour ce faire, nous nous devons d’être proches d’eux. Nous voulons qu’ils se sentent valables et appréciés pour ce qu’ils sont, avec leurs différences et leurs degrés variables de dépendance.

Pour les emmener loin

Moi, instit, je leur apprends les choses de la vie, je leur permets de partager, d’échanger. Je leur donne les outils pour évoluer dans le monde qui les entoure et pour leur apprendre à faire confiance à l’autre. Je leur montre qu’ils peuvent "s’appuyer" sur des personnes de confiance pour petit à petit arriver à la meilleure autonomie possible.

Ils ont entre 12 et 21 ans mais je suis tout près d’eux dans chacun des actes du quotidien et pour chacun des apprentissages. Pour tourner une page, tenir un crayon, se déplacer, aller en récré…

Moi, logo, je cherche à améliorer leur communication en leur permettant d’exprimer leurs joies et leurs inquiétudes, leurs besoins et ce qui leur fait plaisir.

Ils ont entre 12 et 21 ans mais je suis tout près d’eux pour leur tendre leur cahier de communication PODD, indispensable pour Dire, pour Être. Je suis tout près d’eux pour leur donner à manger et à boire. Je leur donne la main pour pointer un picto ou tenir une cuillère.

Moi, kiné, je les installe en classe, dans leur chaise roulante, dans leur plan de verticalisation, au sol, sur des tapis, dans le minibus, en voiture…

Ils ont entre 12 et 21 ans mais ils sont dans mes bras, sur mes genoux. Ils sont debout contre moi pour marcher. Je leur donne la main, le coude. Je leur tiens le bras, les hanches. Je déplace leurs pieds, je positionne leur tête. Je les aide à bien bouger, à bouger mieux.

Nous sommes aussi puéricultrices, infirmières, psychologues, éducateurs…

Et c’est tous ensemble que, pour répondre à leurs besoins de base, chaque jour, nous leur donnons à manger et à boire, nous les emmenons aux toilettes, nous les aidons à se moucher, à s’essuyer la bouche. Nous enfilons leur veste, nous enlevons leur pull. Nous leur mettons de la crème solaire, et leur donnons leurs médicaments, nous soignons leurs blessures, nous jouons au ballon…

Tous, nous sommes amenés à les prendre dans nos bras pour les rassurer, pour les calmer, pour les contenir, pour les bercer.

Nous les prenons par la main pour leur faire savoir que tout va bien, qu’ils sont là pour apprendre et que nous sommes là pour les emmener aussi loin qu’ils pourront dans leurs apprentissages.

Nous les aimons

Rien de tout cela n’est superflu. Nous ne pouvons nous passer d’aucun de ces gestes pour travailler à leurs côtés.

Nous souhaitons les revoir, et au plus vite. Certains d’entre eux, souvent les plus dépendants, ont manqué de soins et de liens essentiels durant ce confinement.

Nous pouvons nous laver les mains très souvent, porter une blouse, voire un masque, être attentifs aux signes cliniques, désinfecter le matériel… mais ne nous demandez pas de rester loin d’eux, de ne pas les toucher et, encore pire, de n’accepter le retour à l’école que de ceux qui sont autonomes.

Nous aimons nos métiers et nos fonctions au sein de notre école. Nous aimons nos élèves et nous pensons sincèrement que, en dehors de ceux (et ils sont peu nombreux) qui présentent de réels risques médicaux face au Covid, nous choisissons de donner à chacun la possibilité de revenir à l’école d’ici le 30 juin.

Titre, chapô et intertitres sont de la rédaction