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George Denkyi, directeur de la morgue de Korle Bu.
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Coronavirus : les familles préférant repousser les funérailles, les morgues du Ghana sont pleines

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Face à la crise du coronavirus, le gouvernement ghanéen a instauré en mars dernier des mesures de distanciation sociale et notamment l’interdiction de tout rassemblement de plus de 25 personnes. Cette mesure pousse les familles de défunts à repousser les enterrements. De nombreuses morgues, aux quatre coins du pays, débordent.

"Les autorités de l’hôpital de Korle Bu veulent informer le grand public qu’il y aura dans les deux semaines à venir des enterrements de masse pour tous les corps qui n’auront pas été réclamés", peut-on lire dans un communiqué laconique publié le 24 avril dernier, précisant que certains corps attendent dans la morgue "depuis un a trois ans".


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L’hôpital d’Accra est loin d’être le seul dans ce cas. Aux quatre coins du pays, les morgues sont débordées et appellent les familles à venir chercher les corps des défunts. D’autres établissements à Accra mais aussi à Sunyani, à l’ouest du pays, ont également organisé des enterrements de masse de corps non réclamés par les familles pour faire face à la congestion.

En cause : les mesures prises par les autorités pour faire respecter les distanciations sociales, et notamment l’interdiction des rassemblements de plus de 25 personnes. Mais au Ghana, les funérailles attirent généralement plusieurs centaines de personnes, et s’étalent sur plusieurs jours. Les familles préfèrent alors repousser les enterrements

Des morgues "refusent désormais les nouveaux corps"

"De nombreuses morgues à travers tout le pays sont pleines et certaines refusent désormais de prendre de nouveaux corps", avance Richard Kofi Jordan, président de la Mortuary Workers Association of Ghana (MOWAG), un syndicat qui représente les droits des salariés des industries mortuaires.

Le représentant syndical se plaint aussi des conditions d’hygiène : "Nous ne sommes pas suffisamment équipés en matériels de protection, notamment en masques et en gants et nous craignons que certains employés ne soient contaminés", poursuit-il.

"Récemment certaines familles ont répondu à l’appel du chef de l’Etat et sont venues chercher certains corps", avance George Denkyi, le directeur de la morgue du Korle Bu. Mais ce dernier craint pour la suite. "De nouvelles mesures ont été prises comme l’interdiction de la musique lors des enterrements, une tradition chez les Ga (une des ethnies au Ghana, ndlr), et j’ai peur que certaines laissent les corps encore plus longtemps", poursuit-il.


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Certaines familles préfèrent payer parfois plusieurs centaines de cedis par mois (100 cedis équivalent à environ 15 euros) pour que les morgues conservent les corps.

Des funérailles par streaming

Les entreprises qui gèrent les enterrements sont aussi durement touchées. Alors qu’elles organisaient, avant la crise du coronavirus, des funérailles qui pouvaient rassembler quelque 700 personnes et s’étirer sur plusieurs jours, ces entreprises sont limitées à 25 personnes.

"Nous faisons face à une forte baisse de notre activité ces dernières semaines", avance Grace Ofuso-Donkor, responsable des ventes à Transitions, l’un des leaders à Accra sur l’organisation des enterrements.

Pour faire face à cette situation, l’entreprise s’est lancée dans le streaming des funérailles. "Nous envoyons un lien à la famille et relations du défunt pour qu’ils puissent suivre la cérémonie à travers le monde, alors que certaines membres de la famille sont bloquées à l’étranger à cause de la fermeture des frontières", poursuit-elle.