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Chez les Tissus des Ursules, la fréquentation a été quasiment triplé depuis le Covid-19 © Cécile CHAMPAGNAT

Les magasins de tissus de Montluçon commencent à reprendre leurs activités normales : « Ne vendre que de l’élastique et du tissu pour les masques, ça faisait bizarre ! »

Rouverts d'abord pour permettre aux couturières de s'approvisionner en matériaux destinés à fabriquer des masques, les magasins de tissus reprennent progressivement une activité plus normale à Montluçon. Retour sur cette période particulière avec deux professionnelles qui ont rarement croisé autant de couturières aguerries comme novices.

Suite au Covid-19, les magasins de tissus de Montluçon ont été littéralement pris d'assaut. Notamment par les particuliers qui voulaient acheter les matières nécessaires à la réalisation de leurs masques de protection.

Espace tissus et les Tissus des Ursules pris d'assaut pour trouver de quoi confectionner des masques

Carole Dugléry, la gérante d'Espace tissus, à Domérat, a d'abord repris son activité avec des drives et des commandes de produits nécessaires pour confectionner des masques.

Nos premiers clients ont été les professionnels, notamment certaines enseignes de grande distribution qui nous ont commandé des masques pour protéger leurs salariés. Ensuite, il a fallu fournir les collectivités qui ont équipé leurs agents, ainsi que les soignants et les particuliersCarole Dugléry (gérante d'Espace tissus)

Et comme elle, Sylvie Dousset, la responsable du magasin des Tissus des Ursules, en zone Saint-Jacques, s'est littéralement retrouvée «  submergée » lorsqu'elle a lancé son drive le lundi 27 avril. « Tout le monde appelait. Là ça désemplit, on sent un ralentissement depuis la fin de semaine dernière. »

Pas de pénurie de matières premières

Et pour accéder à cette forte demande, encore fallait-il avoir la matière nécessaire. « Heureusement, j’avais un bon stock de tissu ; par coup de chance j’ai pu avoir tout ce qu’il fallait. On n’a pas eu de problème pour les élastiques non plus mais depuis une semaine, ça commence d’être plus compliqué pour les tissus : les fournisseurs sont eux-mêmes en rupture au niveau national parce que tout le monde en demande donc je les reçois un peu au compte-goutte », reprend Sylvie Dousset.

Comme elle, Carole Dugléry a pu être rapidement servie par ses fournisseurs habituels, et notamment des tisseurs de Lyon, de Saint-Etienne, de Belgique, ou encore du nord et de l'est de la France.

« On a eu des élastiques tout de suite puis on a eu une petite latence. Pour la première fois, tout le monde voulait des élastiques dans toute la France mais aussi en Europe et dans le monde entier. Certains fournisseurs ont joué le jeu et n’ont pas augmenté leurs tarifs », se félicite Carole Dugléry.

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Toutes les générations se sont mises à la couture...

Cette quête de tissu et d'élastique pour confectionner son masque a touché toutes les générations, qui ont par là-même redécouvert ou découvert la couture.

« Les machines des grands-mères sont ressorties des greniers. Même les ados se font leur masque pour aller au collège. On a vendu des tissus super sympa. C’est un peu comme le vêtement, chacun s’affirme avec le modèle qu’on arrive à trouver en coton pour les masques, comme ceux qui sont passionnés de musique ou de dessin par exemple », s'amuse Carole Dugléry.

... et il y a aussi eu de vastes élans de solidarité

Dans leur magasin, Sylvie Dousset et Carole Dugléry ont également assisté à la naissance de belles histoires. Certaines de leurs clientes venaient carrément s'approvisionner pour faire cent ou deux cents masques. « En Creuse, certaines en faisaient pour tout le village. Il y a eu de très beaux élans de solidarité », retient Carole Dugléry.

Plein de clientes sont venues pour faire des masques pour leur famille et leurs amis proches mais aussi pour des associations, pour l’hôpital... Une de nos clientes a fait 1.500 masques en tissu et elle les a tous donnés ! Ça a du être un sacré budget pour elle.Sylvie dousset (responsable des Tissus des Ursules)
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Des activités mises de côté à cause du Covid commencent à repartir

Comme leurs clients, les professionnelles commencent à passer à autre chose. A cette époque-là de l'année, Carole Dugléry et sa salariée sont normalement en pleines confections sur-mesure, entre toiles de store, salons de jardin…

« Habituellement on a déjà des commandes en février-mars pour des toiles extérieures, beaucoup de sièges, de tapisseries, compare-t-elle. Là, les gens ne sont pas sortis et je pense qu’ils attendent un peu ou que certains ne le feront pas cette année parce que financièrement ça peut être compliqué pour ceux qui ont été au chômage partiel. D’autres reviennent heureusement pour des doubles rideaux, des voilages, des tissus de lit. »

De même, les propriétaires de mobil-home ou de maison d’hôte sont encore dans l'attente puisque personne ne peut s'y rendre. Mais les projets de mariages, eux, reprennent petit à petit.

Les clients reviennent aussi au fur et à mesure aux Tissus des Ursules pour leur maison, refaire des fauteuils, des coussins, pour de la confection sur-mesure…

Ils ont envie d’autre chose que des masques et de changer un peu la maison. Même pour nous, ça fait du bien ; ne vendre que de l’élastique et du tissu pour les masques, ça faisait bizarre ! Sylvie Dousset (responsable des Tissus des ursules)

« Ce qui me faisait le plus mal, c’est que quand j’ai rouvert, il y avait deux heures de queue pour rentrer dans le magasin. Quand vous voyez les gens comme ça, attendre dehors, ça fait un drôle d’effet. Une fois, des dames attendaient dehors sous la pluie, sans parapluie… On était dans un autre monde », retient-elle.

Il va falloir attendre pour avoir sa machine à coudre

Une chose est également certaine, cette quête de tissu pour confectionner son masque a fait entrer une nouvelle clientèle dans ces deux magasins. Avec en moyenne 150 clients par jour, les Tissus des Ursules ont quasiment triplé leur fréquentation actuellement. 

« Plusieurs dames qu’on a rencontrées ont commencé la couture avec les masques et ont trouvé ça sympa. Aujourd’hui, deux petites dames sont revenues dans mon magasin, l'une a pris ce qu’il faut pour se faire un top, l’autre une petite robe », note Carole Dugléry.

En revanche, si comme plusieurs autres vous espériez acquérir une machine à coudre dans les prochains jours pour vous lancer, il va falloir faire preuve de patience. Les deux enseignes ont déjà écoulé tout leur stock et espèrent que leurs fournisseurs les réapprovisionnent au plus vite.

Gaëlle Chazal