Une jeune femme tunisienne devant la justice pour avoir posté une vidéo parodiant le Coran : "Sourate Corona"

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Des militants pour les droits humains tunisiens manifestent devant le tribunal de Tunis. Ils soutiennent Emna Chargui accusée d'avoir posté une vidéo pastichant le Coran.
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Emna Chargui, l'internaute de 27 ans se rendant à son procès pour "atteinte au sacré et aux bonnes mœurs" ainsi "qu'incitation à la violence".
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Le procès de l'internaute devait avoir lieu aujourd'hui. Elle a bénéficié d'un large soutien d'internautes et de personnalités impliquées dans la défense des droits humains. Une vingtaine de manifestants se sont présentés devant le palais de justice pour la soutenir. La justice a finalement décidé de reporter l'audience sans fixer de nouvelle date. 

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Emna Chargui, l'internaute de 27 ans se rendant à son procès pour "atteinte au sacré et aux bonnes mœurs" ainsi "qu'incitation à la violence". © AFP

Emna Chargui, 27 ans, fait face à la justice aujourd'hui pour avoir partagé sur Facebook une vidéo dont le style parodie le Coran. "Sourate corona" parle de la pandémie de COVID-19 mais c'est bien le style adopté qui a attiré le regard de l'état tunisien. La publication mentionne que le virus est venu de Chine et qu'il faut se laver les mains pour s'en prémunir. Le texte, entre autres, affirme : "il n'y a pas de différence entre rois et esclaves, suivez la science et laissez les traditions". 

A présent, la jeune internaute se défend des accusations "d'atteinte au sacré et aux bonnes mœurs" et "d'incitation à la violence". Elle risque une peine de prison de trois ans pour son partage sur Facebook. Interrogée sur les ondes de la radio privée IFM, son avocate, Me Inès Trabelsi, indique que le parquet a invoqué l’article 6 de la constitution tunisienne qui prévoit que 'l'Etat protège la religion" mais aussi la garantie de "la liberté de croyance, de conscience et de l'exercice des cultes". 

Polémique dans la presse

Les rédactions du pays se sont saisi de l'affaire et la traitent conformément à leur orientation laïque ou confessionnelle. Le site libéral Kapitalis, cité par le Courrier International, rappelle par la voix de Chérif Ferjani, auteur de plusieurs ouvrages sur l'Islam, que le pastiche est un genre littéraire qui ne date pas d'hier et que de nombreux auteurs musulmans s'y sont essayé. L'observatoire national du caractère civil de l'état a fait état qu'Emna Chargui était victime d'une campagne d'insulte et d'intimidation comprenant, entre autres des menaces de mort. Enfin, le site Réalités condamne la jeune femme en arguant "qu'il ne faut pas confondre laïcité et rejet de la religion".

Soutien d'Amnesty International

L'ONG de défense des droits humains a pris la défense de Emna Chargui en élargissant la menace qui pèse sur les droits d'expression de tous les Tunisiens. Amna Guellali, directrice adjointe pour l’Afrique du Nord à Amnesty international déclare: 

Les poursuites intentées contre Emna Chargui illustrent une nouvelle fois la manière dont les autorités, malgré les progrès démocratiques enregistrés en Tunisie, continuent de s’appuyer sur des lois répressives pour saper la liberté d’expression.

Le procès débute ce jeudi 28 mai, celui d'Emna Chargui, mais aussi celui de la laïcité de l'état tunisien, fortement mise en question par de nombreux internautes locaux et étrangers.