La délocalisation des procès d'assises de Moulins à Montluçon fin juin surprend les professionnels moulinois
La session de la cour d’assises de l’Allier qui devait se dérouler en mars au tribunal judiciaire de Moulins a été annulée en raison de l’épidémie. Une nouvelle session est programmée fin juin, mais délocalisée à Montluçon pour raisons sanitaires, à la surprise des juristes moulinois.
La cour d’assises de l’Allier devait se réunir du 16 au 27 mars, au tribunal judiciaire de Moulins. Mais cette session printanière a été annulée en raison de l’épidémie de coronavirus.
Respect des consignes sanitaires
Une ordonnance prise le 7 mai par Sophie Degouys, première présidente de la cour d’appel de Riom depuis mars dernier, a décidé une délocalisation temporaire de la cour d’assises de l’Allier au siège du tribunal judiciaire de Montluçon, où quatre affaires (aucune sur le secteur de Montluçon) seront jugées.
Le tribunal judiciaire de Montluçon serait plus adapté que celui de Moulins pour faire respecter les consignes sanitaires.
Cette délocalisation « historique » de la cour d’assises (*) - Maurice Brun, ancien avocat et ancien maire de Montluçon, ne se rappelle pas d’avoir connu cela « de mémoire d’avocat » (notre édition du 14 mai) - ne fait pas l’unanimité des professionnels de justice moulinois.
Un sujet très délicat
« C’est un sujet très délicat », pour Dalila Zane, présidente du tribunal judiciaire de Moulins qui ne commente pas cette décision. Elle souligne : « Ce n’est qu’une décision ponctuelle et les prochaines sessions de cour d’assises se dérouleront à Moulins ».
Sur un plan pratique, cette délocalisation n’aura pas d’incidence sur le fonctionnement du tribunal de la préfecture de l’Allier.
« Les deux magistrats délégués auprès du président Talenti par la cour d’appel de Riom à Montluçon ne sont pas des Moulinois. Cela ne change rien pour les parquetiers (magistrats représentant le ministère public, défendant les intérêts de la société). Ceux de Cusset et Montluçon viennent habituellement à Moulins. Des parquetiers vichyssois et moulinois iront à Montluçon. Nous gérons notre stock d’affaires, important en raison de la grève des avocats et du confinement ».
photo Florian Salesse
Un problème pour les justiciables
Seul le greffier est concerné par cette délocalisation. « Le greffier du tribunal de Moulins sera délégué pendant quinze jours à Montluçon ». Pour Yann Bielak, qui habite entre Moulins et Montluçon, « ce ne sera qu’un quart d’heure de route en plus, avec des compensations financières ».
Côté avocats, Me Dominique-Jean Lardans s’étonne : « C’est surprenant. Je n’ai jamais connu cela en 42 ans de barreau ». L’avocat moulinois est partie civile, représentant une octogénaire yzeurienne, dans la principale affaire de cette session d’assises, une affaire de tentative de meurtre et tentative d’assassinat.
« Cela pose un problème de déplacement à ma cliente, âgée de 82 ans », dit-il, ajoutant : « la salle Robert-Badinter de Montluçon est bien plus petite que la salle d’assises de Moulins. Il n’y aurait pas eu de problème de distanciation pour les jurés, qui pouvaient cheminer sans passer par l’extérieur et délibérer dans la bibliothèque des avocats. J’espère que Moulins va récupérer le tribunal criminel ».
Décision de dernière minute
Pour Me Carole Grellet, sa consœur, partie civile pour une deuxième victime dans le même procès, « cette délocalisation est une surprise. Je ne comprends pas. Cela complique les choses, pour cette affaire sensible et éprouvante. Mon client devra effectuer des allers-retours Moulins-Montluçon (140 km aller-retour). Il faut gérer cette délocalisation à la dernière minute ».
Pascal Larcher
- La cour d’assises
Nouvelle appellation, depuis 1810, des tribunaux criminels créés à la Révolution française, la cour d'assises est une juridiction départementale compétente pour juger les personnes accusées d’avoir commis un crime. Les crimes étant les infractions les plus graves (assassinat, meurtre, empoisonnement, rapt, viol, vol à main armée..). La cour d'assises se réunit toujours au chef-lieu du département (sauf quand le département a une cour d’appel comme c’est le cas pour Riom, dans le Puy-de-Dôme). Elle comprend la cour - le président et ses deux assesseurs, magistrats professionnels - et le jury populaire composé des jurés (six en première instance), tirés au sort à partir des listes électorales.
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