Commerce électronique : Pour Saint-Louis, le taux des transactions estimées à 18 % (expert)
Un marché pris d’assaut la veille de la Korité, sans respect des mesures barrières, m’a fait craindre une flambée des contaminations au coronavirus.
Le soir, voir dans un reportage télé une livreuse taper à la porte d’une famille pour livrer tous les condiments pour la préparation du repas de Korité, m’a convaincu que l’heure d’adopter définitivement la digitalisation des services a sonné.
C’est d’ailleurs l’un des premiers enseignements de cette pandémie, nous pouvons faire beaucoup de choses sans bouger. Et c’est tant mieux en cette période où mettre le nez dehors génère parfois des angoisses.
Le commerce électronique est une solution, mais il doit se généraliser dans un pays où le taux de pénétration de la téléphonie mobile dépasse les 100 %.
Avec un parc mobile de 16.823.541 lignes au 31 mars 2019, soit une progression de 1,6 %, selon la Dpee, et un accès à l’Internet (les connexions mobiles représentent 97,6 % du parc Internet au 31 mars 2019) très acceptable comparé au reste du continent, le Sénégal dispose d’atouts qui devraient continuer à impulser le secteur voire le généraliser.
Car une bonne partie des transactions électroniques est concentrée sur la façade ouest du pays. Une enquête de Jumia montre que Dakar concentre, à elle seule, 61 % des activités, à côté de Saint-Louis (18 %), Pikine (11 %) et Touba (4 %).
Avec l’épidémie, l’État a donné un coup de pouce en mettant sur pied une plateforme donnant accès aux sites des Petites et moyennes entreprises pour faciliter l’écoulement de leurs produits. Mais un défi de taille demeure : comment rendre le secteur informel plus visible dans le commerce électronique.
Avant leur assouplissement, les récentes mesures restreignant les heures d’activité des marchés et interdisant les « loumas », conjuguées à la rareté de la clientèle terrée chez elle, avaient porté un sacré coup au secteur informel qui est le premier pourvoyeur d’emplois. Et ses acteurs, ne sachant quoi faire de leurs marchandises, n’étaient pas loin de la révolte pour protéger leur gagne-pain quotidien.
Un cadre adapté pourrait mettre plus d’acteurs de l’informel en contact avec les start-up pour permettre aux premiers d’avoir accès à un marché plus large, et qui subirait moins les aléas comme cette épidémie de Covid-19.
La dynamique existe déjà, avec de petites annonces de commerçants, mais elle est à développer, son avantage étant que les bénéficiaires ne l’assimilent pas à une obligation de formalisation qui fait peur, mais plutôt à une meilleure visibilité.
La digitalisation des paiements à partir du porte-monnaie électronique s’est déjà installée dans les habitudes de la population, mais elle ne devrait pas être cantonnée à certains services.
Mais au préalable, les consommateurs ont besoin d’être rassurés sur la sécurisation de leurs transactions et de leurs données à caractère personnel. Ce sera avec l’informel que le commerce électronique pourra continuer à faire des bonds substantiels au Sénégal et en Afrique.
De la marge, le secteur en a beaucoup sur le continent. Conscients des contraintes propres à l’Afrique, les acteurs ont adapté leurs activités aux réalités locales pour surmonter certains obstacles tels que le faible pouvoir d’achat et du taux de bancarisation, la peur des paiements en ligne, la fracture numérique et les problèmes logistiques.
Avec une population de plus d’un milliard de personnes et plus de 470 millions d’internautes, l’Afrique, dispose d’un potentiel sous-exploité. Le continent renfermait, en 2018, seulement 21 millions d’acheteurs par voie électronique, soit mois de 2 % à l’échelle planétaire, selon la Cnuced.
Malick Ciss