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À l’instar des plateaux de télé français, Christian Bégin, les choristes — qui ne seront pas enfermés dans des box de plexiglass comme ceux d’«En direct de l’univers» — et les invités, parmi lesquels Jean-Luc Mongrain, Marina Orsini, Patrice Roy, Julie Le Breton et le Pharmachien Olivier Bernard, devront se coiffer et se maquiller eux-mêmes.Photo: Télé-Québec

Si loin, si proches

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« Nous ne sortirons pas indemnes de cette expérience inouïe », notait Marie-France Bazzo à propos du confinement dans son Journal des temps inédits publié sur le site de L’actualité. Si elle-même se qualifie de confinée privilégiée ayant pris le temps de faire le ménage à l’intérieur et qu’elle se dit prête au déconfinement, la productrice de Y’a du monde à messe affirme avoir besoin d’une télévision humaine, bienveillante et qui fait du bien.

Ne partageons-nous pas tous ce désir à l’heure où Patrice Roy se permet de répondre aux commentaires des spectateurs sur ses cheveux, que Céline Galipeau ouvre le Téléjournal en donnant des nouvelles de sa mère, que Tout le monde en parle est devenu un service essentiel et que Jean-Philippe Wauthier prend des nouvelles de nos aînés à Bonsoir, bonsoir ?

« On a très probablement tous besoin de cette chaleur humaine. J’ai l’impression que ces présentateurs, qui étaient presque des machines, en ont eu besoin. La télé a été très rassembleuse comme elle ne l’était plus depuis un certain temps. Peu importe qui on est ou ce que l’on fait dans la vie, on a tous ressenti ce besoin. On a tous craqué à un moment ou un autre ou on va craquer avec la reprise des activités quand on va s’apercevoir que le monde a vraiment changé. »

Pas coiffés, pas maquillés, habillés en mou, ce que nous cherchons d’abord, selon Marie-France Bazzo, c’est le besoin d’être vrai, d’être au-delà des apparences, de faire fi du superflu. Alors que les talk-shows et les émissions de variétés d’ici et d’ailleurs ont poursuivi leur mission dans cette veine, l’équipe de Y’a du monde à messe a décidé de suspendre le tournage de sa quatrième saison en accord avec Télé-Québec.

À deux mètres du bonheur

Ayant repris le tournage le vendredi 29 mai, Y’a du monde à messe devait commencer à tourner une semaine après le début du confinement et entrer en ondes le 6 avril. À l’époque, il y avait un tel sentiment d’insécurité que la production a préféré repenser le format de l’émission afin que le tout soit sanitaire et sécuritaire.

« C’est un plateau d’une centaine de personnes et on ne voulait mettre la santé de quiconque en jeu. On a donc planché sur des scénarios en tenant compte de ce que disait la Santé publique et de ce qui se faisait en France, qui venait d’interdire les rassemblements de plus de 100 personnes. Tout de suite, j’ai dit à l’équipequ’il fallait créer un scénario pour 50 personnes. »

À l’instar des plateaux de télé français, Christian Bégin, les choristes — qui ne seront pas enfermés dans des box de plexiglass comme ceux d’En direct de l’univers — et les invités, parmi lesquels Jean-Luc Mongrain, Marina Orsini, Patrice Roy, Julie Le Breton et le Pharmachien Olivier Bernard, devront se coiffer et se maquiller eux-mêmes.

Afin de respecter les deux mètres de distance, la table de l’animateur, qui ne recevra que quatre invités à la fois, a été allongée. Du coup, les entrevues seront aussi plus longues et plus étoffées. Quant au cinquième invité, autrefois convié à table, il sera sur la grande scène du théâtre Paradoxe pour livrer une prestation musicale.

On a très probablement tous besoin de cette chaleur humaine. J’ai l’impression que ces présentateurs, qui étaient presque des machines, en ont eu besoin. La télé a été très rassembleuse comme elle ne l’était plus depuis un certain temps. Peu importe qui on est ou ce que l’on fait dans la vie, on a tous ressenti ce besoin. On a tous craqué à un moment ou un autre ou on va craquer avec la reprise des activités quand on va s’apercevoir que le monde a vraiment changé.— Marie-France Bazzo

Comme le veut la formule originale, les invités de Christian Bégin seront réunis autour d’un thème qui ne sera dévoilé qu’à la fin. En fait, le grand changement, c’est que Y’a du monde à messe, en ondes dès le vendredi 5 juin, ne sera plus tourné devant public.

« On sera en live-to-tape pour toute la première partie de la saison et on évaluera pour la seconde partie si on reprend le montage ou si on continue en live-to-tape. On sera très probablement sans public jusqu’à la toute fin de la saison. Quand on a décidé de se priver du public, on s’est tout de suite tourné vers notre réalisateur Luc Sirois, un génie du lieu qui a conçu Ça va bien aller à TVA. »

Marie-France Bazzo rappelle que c’est Luc Sirois qui avait eu l’idée de tourner dans une église : « Que tu y pries seul ou que tu y sois parmides centaines de fidèles, il s’y passe toujours quelque chose. On voulait que le show ait l’air d’être tourné sans public, mais qu’il nous connecte avec du sens, avec quelque chose de plus grand que nous. Il suffisait de jouer avec le lieu, les caméras, les éclairages afin de mettre en valeur les personnages autour de la table. »

Marie-France Bazzo promet que les entretiens ne tourneront pas autour de la COVID-19 : « On va parler de ce qui s’en vient ; les invités vont se projeter avec Christian. L’émission s’y prête très bien. On sera plus dans la réflexion que dans l’anecdotique. Ce sera aussi festif que les années précédentes ; il y aura du vin, des sourires, des rires et de la connivence. Et ça se peut même qu’on voie des repousses ! »

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Marie-France Bazzo promet que les entretiens avec les invités ne tourneront pas autour de la COVID-19.Photo: Philippe-Olivier Contant

Et la culture, bordel ?

Si Y’a du monde à messe a réussi à se réinventer tout en préservant son ADN, Marie-France Bazzo déplore que la culture ne soit pas mieux servie alors que l’économie redémarre peu à peu.

« Je l’ai écrit quelques fois, j’attendais que la ministre de la Culture soit au point de presse de 13 h bien avant la fois où elle est apparue sans plan de relance. Je m’attendais à sa présence, ne serait-ce que symboliquement, pour remercier les artistes, les premiers à se réinventer et à offrir de la culture gratuitement, qui ont été les premiers à pâtir et qui savent qui seront les derniers à revenir. »

« La culture, c’est 3 % du PIB, plaide la productrice, c’est des centaines de milliers d’emplois directs et indirects, c’est une part de notre identité, c’est sur quoi on s’appuie, ce qui nous distingue. La culture est fondamentale dans l’identité québécoise. Ce n’est pas juste une affaire de téteux de subventions de Montréal : elle est présente partout ! Et même si on ne pourra pas accélérer les choses à cause de la distanciation physique, qui sera là tant qu’on ne trouvera pas de remède ou de vaccin, juste de dire qu’on s’en préoccupe, qu’on travaille vraiment sur un plan, ç’aurait été apprécié par tous ces gens qui sont extrêmement vulnérables en ce moment. »