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Patrick Balkany et son avocat, mercredi à la cour d'appel de Paris.
Photo Thomas Samson. AFP

Blanchiment : des peines de prison confirmées pour les Balkany

La cour d'appel de Paris a condamné l'ancien maire de Levallois-Perret et son épouse à respectivement cinq et quatre ans de prison ferme, et prononcé la saisie de leurs biens immobiliers.

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Il n’est pas si fréquent qu’un tribunal se montre plus sévère que le parquet, mais plus rien ne nous étonnera avec Patrick et Isabelle Balkany. La cour d’appel de Paris a confirmé mercredi matin leur condamnation pour blanchiment de fraude fiscale, avec «circonstance aggravante, car commis de manière habituelle» entre 2007 et 2014. Soit cinq ans de prison ferme pour monsieur et quatre ans pour madame (l’avocat général s’étant contenté de requérir respectivement quatre et deux ans ferme), traités sur un plan presque égalitaire : «Les deux époux ont profité pleinement de leurs villas à Saint-Martin et Marrakech, avaient le même intérêt dans la dissimulation des fonds», relève ainsi l’arrêt de 79 pages de la cour d’appel.

Le blanchiment vise un invraisemblable entrelacs de holdings immatriculées sous les tropiques, en vue d’opacifier leur propriété. Autant de «sociétés écrans, détentrices de comptes bancaires non déclarés, dont les bénéficiaires économiques étaient les époux Balkany, qui leur ont permis d’acquérir puis d’entretenir leur patrimoine» immobilier, résument les magistrats. Sur l’origine des fonds blanchis, essentiellement de la fraude fiscale, ils notent malicieusement qu’elle «n’est pas aussi ancienne que le soutiennent» les Balkany.

Certificats médicaux

Sans surprise, l’avocat d’Isabelle Balkany, Me Pierre-Olivier Sur, a dénoncé une décision «disproportionnée». Les peines infligées, identiques à celles prononcées en première instance, s’ajoutent à celles déjà prononcées en mars par la même cour d’appel sur le seul volet fraude fiscale : trois ans ferme chacun. Mais ces peines n’ont pas vocation à s’additionner, plutôt à fusionner. Et vu les certificats médicaux fournis par l’un et l’autre des époux Balkany, il est loin d’être certain qu’ils les purgeront un jour. 

Mais puisqu’on est au stade des symboles, la cour s’est chargée d’en rajouter un pour la route, avec une condamnation complémentaire pour «prise illégale d’intérêts», un cran en deçà de la corruption, délit pour lequel Patrick Balkany avait été relaxé en première instance. Il est ici question d’éventuelles contreparties obtenues auprès de candidats à des marchés publics de la mairie de Levallois-Perret. L’un d’entre eux aura ainsi prêté son jet privé aux époux Balkany pour se rendre en villégiature à Saint-Martin ou Marrakech. Un autre aura fait mine de louer l’une ou l’autre des leurs demeures sans jamais y mettre les pieds. Sur ce dernier cas, «la cour s’interroge sur l’objet de contributions à l’entretien des deux villas, à hauteur de 100 000 euros sans aucune contrepartie, par un entrepreneur en relation d’affaires avec la ville de Levallois-Perret».

«Somptueux palais»

Le couple écope en sus de dix ans d’inéligibilité, comme dans le volet fraude fiscale. Mais la véritable et pertinente sanction sera financière. Outre une amende de 100 000 euros, et un million de dommages et intérêts à reverser à l’Etat français solidairement avec les autres acteurs du dossier, la cour a prononcé la saisie de leurs biens immobiliers. S’agissant du riad de Marrakech, «somptueux palais oriental» selon un visiteur, dont les «Thénardier des Hauts-de-Seine» nient être les propriétaires (1), cela ne devrait pas poser de problème. Quant à leur très confortable moulin de Giverny (un million d’euros de travaux, en plus de son prix d’acquisition), où Patrick et Isabelle Balkany vivent paisiblement leur confinement, sa nue-propriété avait été transférée dès 1997 à leurs enfants. «Quelques mois après la première condamnation de M. Balkany pour prise illégale d’intérêts», relève perfidement la cour d’appel. Autant dire qu’ils n’entendent guère s’en faire déloger rapidement. Il leur reste par ailleurs dix jours de délai (rallongé pour cause d’état d’urgence sanitaire) pour un éventuel pourvoi en cassation.

(1) Son ayant droit officiel, Jean-Pierre Aubry, homme à tout faire des Balkany à la mairie de Levallois-Perret, également condamné, décline lui tout aussi toute propriété…