Noël Le Graët réaffirme son autorité sur le foot français
Le président de la FFF a posé son veto à une Ligue 2 à 22 clubs la saison prochaine, une décision qui rappelle, une nouvelle fois, qu’il est bien le patron du football français.
by Par Alexandre PedroLa comparaison, un peu facile, revient souvent dans les portraits du Breton à la tête du football français. Noël Le Graët (78 ans) aurait tout d’un « menhir ». Et le président de la Fédération française de football (FFF) a encore prouvé qu’on ne bouge pas facilement un mégalithe. Mercredi 27 mai, le comité exécutif (comex) de la fédération a ainsi enterré l’idée d’un passage de la Ligue 2 de 20 à 22 équipes. Ces derniers jours, M. Le Graët avait bien fait comprendre qu’il inviterait le comex à poser son veto à la décision votée le 20 mai par la Ligue de football professionnel (LFP).
Les 40 clubs de l’élite avaient alors adopté, à une courte majorité (57 %), un élargissement exceptionnel à 22 clubs permettant de sauver les relégables, Le Mans (19e) et Orléans (20e), tout en accueillant les promus Pau (1er de National) et Dunkerque (2e de National). Il s’agissait de tenir compte de l’arrêt brutal de la saison et de la situation du Mans, relégué à la différence de buts par rapport à Niort, 18e.
Mais le président de la FFF (en poste depuis 2011) n’a pas voulu autoriser un précédent. Après tout, la Ligue 1 et les différents championnats amateurs ont aussi vu leur saison s’arrêter brutalement avec des montées et des descentes. Et donc des malheureux. D’ailleurs, Amiens et Toulouse (19e et 20e en Ligue 1) ont déjà saisi le Conseil d’Etat pour contester leur relégation et plaident pour une élite à 22 la saison prochaine. Donner raison à la Ligue 2 aurait légitimé cette démarche et M. Le Graët ne le souhaitait surtout pas.
Un nouveau camouflet pour la LFP
Pour la LFP, cette décision a tout d’un nouveau camouflet. Divisée entre deux syndicats de présidents et les intérêts divergents de ses membres, elle n’a pas pesé (ou voulu peser) afin de permettre aux saisons de Ligue 1 et Ligue 2 de reprendre, comme c’est déjà le cas en Allemagne et prochainement en Espagne. M. Le Graët a, lui, toujours plaidé pour arrêter et a su se faire entendre. Les deux championnats sont pourtant, en théorie, sous la responsabilité de la Ligue, mais l’ancien industriel n’est pas un patron de fédération comme les autres.
Fin politique, le maire socialiste de Guingamp entre 1995 et 2008 surnage facilement dans la cacophonie actuelle du football professionnel français
Quand ses prédécesseurs, à l’image de Fernand Duchaussoy ou Jean-Pierre Escalettes, étaient méprisés par un monde professionnel qui voyait en eux des braves dirigeants venus du monde amateur avec lesquels il fallait juste composer, Le Graët connaît la boutique d’en face. Il a été le président historique de l’En avant Guingamp, a disputé la Coupe d’Europe et a dirigé la LFP entre 1991 et 2000. A l’époque, il est un des seuls à oser s’attaquer à un Bernard Tapie alors tout-puissant président de l’Olympique de Marseille.
Fin politique, le maire socialiste de Guingamp entre 1995 et 2008 surnage facilement dans la cacophonie actuelle du football professionnel français. Mieux, il est adoubé par certains présidents de Ligue 1 qui reconnaissent en lui cette autorité qu’ils refusent d’accorder à Nathalie Boy de la Tour, présidente effacée de la LFP. « L’homme fort du foot français, c’est lui, souligne le président de Montpellier, Laurent Nicollin au Figaro. Quand il parle foot, il maîtrise son sujet et sait quand il faut taper du poing sur la table. »
Il existe bien une dernière voix dissonante, celle d’un ami de presque trente ans : Jean-Michel Aulas, en croisade pour obtenir la reprise de la saison. Pourtant, M. Le Graët ne doutait pas que le président de l’Olympique lyonnais (et membre, par ailleurs, du comité exécutif de la FFF) finisse par rentrer dans le rang. « Il deviendra sage assez rapidement », s’avançait-il sur RMC, le 1er mai. Une prévision erronée, puisque JMA a saisi depuis le Conseil d’Etat pour obtenir gain de cause. Un dernier petit caillou dans la chaussure de celui qui envisage de solliciter un nouveau mandat à la tête de la Fédération en mars 2021. Son dernier, promet-il.