Les détails du prêt de 200 millions$US au Cirque dévoilés... plus tard

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Critiqué par l’opposition pour son manque de transparence entourant le prêt de 200 millions $ US qu’il a offert au Cirque du Soleil, le gouvernement Legault s’est engagé à dévoiler les détails de l’entente si l’argent est versé à l’entreprise de divertissement paralysée par la pandémie de COVID-19.

En prenant cet engagement lors de la période des questions, mercredi, le ministre de l’Économie et de l’Innovation, Pierre Fitzgibbon, n’a toutefois pas précisé quand les détails pourraient être connus.

«Il y a un processus qui est complexe avec les créanciers du Cirque, ce sont eux qui vont décider (qui seront les prochains propriétaires), a-t-il dit, en réponse à une question du député de Québec solidaire (QS) Vincent Marissal. Quand cela sera finalisé, toutes les ententes seront divulguées au public.»

M. Fitzgibbon avait annoncé un soutien financier de Québec dans le cadre d’une mêlée de presse, mardi, une stratégie qui a été critiquée par les partis d’opposition. Pour le porte-parole de QS en matière de finances, il y a «beaucoup plus de questions que de réponses» à ce stade-ci.

En estimant que l’État québécois devrait être «en partie propriétaire» plutôt qu’un simple prêteur, M. Marissal a dit que l’aventure était risquée.

«On veut voir le fameux «deal» avant d’embarquer les Québécois, les Québécoises, dans une autre aventure qui pourrait être désastreuse, coûteuse, ruineuse», a-t-il lancé, en point de presse, avant la période des questions.

D’autres questions

Du côté du Parti libéral du Québec (PLQ), la porte-parole en matière de culture et de communications, Isabelle Melançon, a estimé que l’annonce de M. Fitzgibbon avait été «nébuleuse», en rappelant également que d’autres entreprises québécoises des arts de la scène, comme le Cirque Éloize, les 7 doigts et Flip Fabrique, allaient probablement avoir besoin d’un coup de pouce financier pour traverser la crise actuelle.

Quant au porte-parole péquiste en matière d’économie, Martin Ouellet, il s’est demandé pourquoi il fallait «aller si vite et si fort avec le Cirque» alors que plusieurs autres entreprises sont également fragilisées par la crise actuelle.

Le Cirque ne génère pratiquement aucun revenu puisque ses activités sont paralysées par la pandémie de la COVID-19. Cela a forcé la société à annuler, en mars, ses 44 spectacles et à licencier la quasi-totalité de son effectif, soit environ 4700 personnes.

Traînant une dette estimée à quelque 900 millions $ US, le Cirque étudie plusieurs scénarios, dont celui où il se placerait à l’abri de ses créanciers. La compagnie tente également de dénicher un investisseur ou un acquéreur, ou de renégocier une autre injection de capitaux auprès de ses propriétaires actuels - le fonds d’investissement texan TPG Capital, la firme chinoise Fosun et la Caisse de dépôt et placement du Québec (CDPQ).

Rien ne garantit que les actionnaires existants pourront conserver la propriété du Cirque à la fin de ce processus.

Mécanique

Toutefois, s’ils demeurent en scelle, le Cirque pourra recevoir un prêt de 200 millions $ US de la part d’Investissement Québec dans le cadre d’une entente accompagnée d’une disposition permettant à l’État québécois d’éventuellement acquérir l’entreprise.

L’instrument financier placerait Québec parmi les premiers créanciers de la société, d’après le ministre de l’Économie.

M. Fitzgibbon n’a toutefois pas précisé la mécanique qui permettrait à Québec de racheter les participations de TPG et Fosun, qui détiennent actuellement 80 % du Cirque. À un prix établi à la valeur du marché, l’État québécois pourrait forcer une transaction à une date qui n’a pas été dévoilée ou racheter la participation de ces firmes si celles-ci décident de quitter le navire plus tard.

Selon le professeur titulaire au département de management à HEC Montréal Louis Hébert, le soutien financier offert par le gouvernement Legault est «convenable» et «raisonnable».

En figurant dans le haut de la liste des créanciers, Québec risque d’avoir plus de pouvoir par rapport à une prise de participation minoritaire dans la compagnie, a-t-il estimé au cours d’un entretien téléphonique.

«C’est une première créance, cela veut dire que l’État québécois devient partie prenante et sera beaucoup mieux placé pour savoir ce qui se passe et avoir une influence sur les décisions, a dit M. Hébert. Lorsqu’on est actionnaire minoritaire, les autres peuvent voter contre vous.»

L’aide financière offerte par Québec est assortie de multiples conditions, dont le maintien du siège social, actuellement situé dans l’arrondissement montréalais de Saint-Michel, au Québec.