Revégétaliser les espaces verts pourrait renforcer notre système immunitaire
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De nombreuses maladies non transmissibles sont liées à une moindre diversité du microbiote humain et environnemental. Le phénomène augmente à l’échelle mondiale, dans des proportions épidémiques parmi les populations urbaines industrialisées. Des chercheurs australiens démontrent que la restauration du microbiote dans les espaces verts urbains pourrait inverser la tendance et donc, préserver la santé humaine.
Dans le cadre de leur étude, publiée dans la revue Restoration Ecology, les chercheurs ont comparé la composition et la population microbienne de différents types d’espaces verts urbains (pelouses, terrains vagues, parcs et zones boisées) avec celles des espaces boisés revégétalisés, au sein de la ville de Playford (au sud de l’Australie). Leur objectif était de vérifier s’il était possible de restaurer le microbiome de ces espaces, un procédé appelé rewilding. Ceci dans le but d’exposer l’Homme à davantage de microbes et ainsi entraîner son système immunitaire.
Au plus proche de la nature… et de ses microbes
Le rewilding (ou « réensauvagement ») consiste à réintroduire, sur le terrain, des espèces animales disparues. Le concept, à grande échelle, vise à recréer les écosystèmes, à protéger les espèces menacées (par les activités de l’homme ou les changements climatiques) et à favoriser le développement de la flore (dont les graines sont disséminées par les grands animaux).
Ici, les chercheurs souhaitent rétablir la biodiversité à l’échelle microscopique : ils s’intéressent en effet au microbiote qui peuple les espaces verts urbains, et qui s’est largement dégradé au fil du temps. Leur hypothèse est que favoriser la diversité de ces micro-organismes nous permettrait de réguler et d’entraîner nos défenses immunitaires.
Jacob Mills, chercheur en sciences biologiques et de l’environnement à l’Université d’Adélaïde, explique qu’historiquement, l’Homme vivait dans des environnements plus ruraux et sauvages ; les enfants grandissaient à l’extérieur, au contact de divers microbes. Aujourd’hui, la tendance est à l’urbanisation, ce qui n’est pas forcément un gage de qualité de vie : « L’urbanisation a radicalement changé nos enfances. Plus de temps passé à l’intérieur, une alimentation de mauvaise qualité et moins d’exposition à des environnements sauvages ont entraîné une augmentation significative des maladies non transmissibles telles qu’une mauvaise santé respiratoire », explique Mills.
En zone urbaine, le contact des espaces verts permet aux enfants de retrouver tous les bénéfices de l’exposition aux microbes de la nature : en effet, ces espaces leur offrent l’opportunité de jouer par terre, de ramasser des choses au sol, etc. Or, il existe par exemple dans le sol des composés microbiens qui réduisent le stress et l’anxiété. « En termes simples, plus les enfants sont exposés à la diversité du microbiote, plus ils grandiront en bonne santé », résume Mills.
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Plus de microbes pour « entraîner » les défenses de l’organisme
L’étude de Mills et ses collaborateurs a révélé que les zones boisées revégétalisées comprenaient plus d’espèces végétales indigènes que d’autres espaces verts tels que les pelouses et les terrains vagues. Elles présentaient en outre une plus grande diversité de microbes ; le microbiote identifié dans les espaces revégétalisés, particulièrement riche, était similaire à celui des forêts résiduelles (et différait considérablement de celui des pelouses et des terrains vagues). « Cela indique que le microbiote des sols des boisés revégétalisés était quasiment revenu à son état initial de biodiversité, plus naturel », explique Mills.
Plusieurs paramètres influent sur la diversité microbienne et sur la santé de l’écosystème : la richesse en espèces végétales, le pH du sol et la conductivité électrique. Il se trouve que les espaces urbains dont la population microbienne est peu diversifiée tendent à être plus propices aux agents pathogènes et aux ravageurs. L’augmentation de la diversité des espèces végétales est donc importante pour la structure des communautés microbiennes et pour améliorer le fonctionnement global de l’écosystème.
Les chercheurs espèrent que les résultats de leur étude serviront aux professionnels de l’urbanisme, qui auraient tout intérêt à prendre en compte les espaces verts et le réensemencement du microbiome dans leurs projets futurs : « Une plus grande biodiversité peut permettre de réduire les taux de maladies non transmissibles, en entraînant nos systèmes immunitaires à lutter contre les pathogènes », souligne Mills. L’expert estime que la revégétalisation des espaces pourrait être une mesure préventive efficace pour la santé des populations, particulièrement dans les zones socio-économiques défavorisées. Cela pourrait notamment alléger les systèmes de santé.
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Cette étude constitue la première preuve du fait que la revégétalisation contribue à augmenter la diversité du microbiote des sols urbains : en créant des conditions d’habitat plus sauvages, on observe un retour à une biodiversité plus naturelle. « Des études futures permettront de comprendre et de mesurer l’impact de ce rewilding sur la santé humaine », conclut Mills.