Coronavirus : un risque élevé d'infarctus chez les femmes, favorisé par le confinement

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En raison de l'épidémie de coronavirus, les patient-e-s ont disparu des hôpitaux et cabinets depuis plusieurs semaines. Car si les maladies chroniques sont toujours bien présentes et que les symptômes continuent à exister, ces derniers les négligent et attendent la dernière minute avant de consulter. Or, reculer une consultation ou une prise en charge augmente le risque de décompenser brutalement une maladie cardiovasculaire, parfois méconnue. Ce risque concerne notamment les femmes, particulièrement exposées car elles sous-estiment habituellement leurs symptômes. Telle est l'alerte lancée par la professeure de cardiologie Claire Mounier-Vehier, cheffe de service au CHU de Lille.

Cette dernière craint ainsi une recrudescence du nombre d’accidents cardiovasculaires chez les femmes et redoute particulièrement la période qui suivra le déconfinement. « Parmi les facteurs de risque cardiovasculaires du confinement, nous pouvons identifier l’isolement social, plus de sédentarité, plus de stress, des écarts alimentaires, plus de tabagisme, le tout pourrait avoir des conséquences synergiques redoutables sur leur santé avec des pics d’affluence attendus aux urgences », explique-t-elle. Le médecin affirme également que les hôpitaux devront aussi faire face à des situations cardiovasculaires beaucoup plus complexes à traiter car diagnostiquées au stade des complications.

Les femmes doivent s’alerter face à 5 symptômes atypiques de l’infarctus

Si les femmes sont particulièrement concernées selon elle, c'est parce qu'elles n’ont toujours pas pris suffisamment consciencequ’elles en sont une cible privilégiée, sans compter qu'elles ne se font pas assez dépister et quand elles le sont, ne bénéficient pas systématiquement d’un suivi médical structuré. Les femmes doivent ainsi s'écouter davantage comme le recommande la fondation « Agir pour le cœur des femmes » lancée par le Pr Mounier-Vehier pour sensibiliser sur ce risque cardiovasculaire selon trois règles : Alerter, Anticiper, Agir. Mais la spécialiste déplore que ces femmes aient souvent d'autres préoccupations, comme la santé de leur famille ou la performance en télétravail.

« Malheureusement, pour nombre d’entre elles exposées à un isolement, une précarité sociale ou un stress conjugal, elles sont dans le déni des symptômes atypiques d’alerte cardiovasculaire. Quand elles appellent le 15, c’est avec souvent beaucoup de retard.», souligne la fondation. Le risque est d’autant plus important que les symptômes de l’infarctus chez les femmes sont souvent atypiques, et contribuent déjà en temps normal à un retard de prise en charge. Oppression thoracique, nausées, essoufflement à l’effort, fatigue persistante sont les symptômes qui doivent les inciter à composer le 15, tout particulièrement si elles ont des facteurs de risque associés (diabète, tabac, hypertension, cholestérol...).

« Il ne faut pas prendre le risque de laisser l’infarctus se développer »

En effet, chaque minute compte dans la prise en charge de l’infarctus du myocarde(communément appelé crise cardiaque). Dès les premiers symptômes, il ne faut pas attendre et appeler le 15 car plus la prise en charge sera rapide (idéalement moins de trois heures après le début des symptômes), moins la patiente aura des séquelles. « Elles seront prises en charge dans des unités hors Covid-19 et n’ont aucune crainte à avoir. Il ne faut pas prendre le risque de laisser l’infarctus se développer pendant plusieurs jours parfois, avec ensuite des conséquences irrémédiables », conclut le Pr Mounier-Vehier. A noter par ailleurs que l’infarctus du myocarde est en forte progression chez les femmes jeunes en France.

Les chiffres du bulletin épidémiologique de Santé Publique France faisaient état en mars 2016 d'une augmentation de 5% d’hospitalisations par an chez les femmes de 45 à 54 ans. Une situation qui peut s'expliquer par le fait d'adopter les mêmes comportements à risque que les hommes, qui vont faire le lit des maladies cardiovasculaires. Premier mis en cause : le tabac qui augmente dans les tranches d’âge les plus exposées (50-59 ans). Mais aussi la consommation d’alcool, l’alimentation et l’activité physique insuffisante qui contribuent à l’obésité et au risque de diabète de type 2. Ces facteurs interagissent avec des facteurs hormonaux de la vie que sont la contraception, la grossesse et la ménopause.