L’hydroxychloriquine, ce produit miracle auquel on ne croit plus

by
https://images.midilibre.fr/api/v1/images/view/5ece33938fe56f683c3ce005/large/image.jpg?v=1
L’hydroxychloroquine dans la tourmente. / photo bruno vedelphoto bruno vedel

Saisi par le ministre de la Santé Olivier Véran, le Haut Conseil de la santé publique et l’Agence du médicament se sont prononcés mardi contre le recours à l’hydroxychloroquine pour traiter l’infection au Covid-19.

Comment l’hydroxychloroquine est passé de traitement "miracle" à thérapie interdite.

1 Ce que disent les études

De nombreuses études, positives, négatives ou neutres qui ne concluent ni à une efficacité, ni une dangerosité, sont consacrées à l’hydroxychloroquine, seule ou associée à un antibiotique, l’azithromycine, protocole privilégié par Didier Raoult à l’Institut Méditerranée infection (IHU). Avant le coup d’arrêt des autorités de santé, ce mardi, seize protocoles étaient en cours en France. Mais en concluant vendredi dernier à une inefficacité voire un "risque accru d’arythmie cardiaque et de décès" à partir de l’étude de plus de 96 000 dossiers, la prestigieuse revue médicale The Lancet a sans doute signé la fin de la partie pour l’hydroxychloroquine. L’organisation mondiale de la santé a suspendu les essais cliniques. L’hydroxychloroquine ne sera plus utilisée dans l’essai européen Discovery, et l’essai Covidoc, initié par le CHU de Montpellier, s’arrête.

2Les éléments de doute

"Un mensonge scientifique" : en démontant les travaux de Didier Raoult dans les colonnes de Midi Libre, le 31 mars dernier, Hervé Seitz, chercheur du CNRS et biologiste moléculaire à l’Institut de génétique humaine de Montpellier, avait suscité la polémique.

À la toute petite échelle de l’Occitanie, elles témoignent des passions qui entourent, depuis trois mois, l’usage de hydroxychloroquine et le personnage de Didier Raoult, victime de son manque de rigueur scientifique et de sa personnalité très controversée : dès le début de l’épidémie, il boude le conseil scientifique qui conseille Emmanuel Macron, il communique dans Paris Match, il édicte ses vérités sur des vidéos postées sur le site de l’IHU…

"Didier Raoult provoque des réactions extrêmes, il y a un emballement tel que c’est devenu incontrôlable", note sagement Jacques Reynes, patron de l’infectiologie au CHU de Montpellier, qui a suspendu l’essai qu’il pilotait sur l’hydroxychloroquine.

3 Pourquoi on a cru au miracle

La notoriété de Didier Raoult, fort en gueule, atypique, la sidération provoquée par l’épidémie, le besoin d’espérer, des soutiens prestigieux et l’appui massif d’une partie de l’opinion publique qui a signé 578 000 fois une pétition de soutien, la visite du président de la République à l’IHU… ont rendu les plus prudents un temps inaudibles.

4 Définitivement enterrée ?

"C’est une option, je m’en fiche un peu", a laconiquement commenté Didier Raoult après les mises en garde des autorités de santé françaises. Vendredi, il avait dénoncé l’étude "foireuse" du Lancet.

"Ni pour, ni contre Raoult", Jacques Reynes, "très étonné de la publicité donnée à un article qui n’aurait jamais dû être publié dans The Lancet", souligne "les biais et les imprécisions de l’étude". Il alerte sur le niveau très élevé de mortalité cardiovasculaire qu’elle affiche : "30 % des personnes décédées avaient des cardiopathies, elles n’auraient jamais dû recevoir le traitement, d’autres avaient un surdosage en hydroxychloroquine, il ne faut pas s’étonner que les chiffres soient hallucinants." Il regrette qu’on en reste peut-être là : "On n’aura peut-être jamais de réponse sur l’intérêt de l’hydroxychloroquine. Pour moi, ce n’est pas le produit miracle, mais je pense que l’association avec l’azithromycine, vraisemblablement efficace, méritait d’être évaluée."