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Du personnel soignant dans un hôpital français (illustration) © AFP - Matthieu Rondel / Hans Lucas

Coronavirus - Journal d'un médecin : "Le loup a quitté l’hôpital, où es-tu Covid ?"

Le professeur Louis Bernard est infectiologue, chef du service des maladies infectieuses au CHU de Tours, ancien chef de clinique à Paris. Il livre à France Bleu ses pensées sur la crise sanitaire due au coronavirus, à laquelle il est confronté dans son hôpital.

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Louis Bernard est en première ligne dans la lutte contre l'épidémie de coronavirus. Infectiologue, chef du service des maladies infectieuses au CHU de Tours, ancien chef de clinique à Paris, il livre son témoignage sur la crise sanitaire à laquelle il est confronté. Il revient sur des histoires individuelles*, réfléchit à la gestion de la crise, confie ses questionnements intimes. C'est son journal de bord, à retrouver tous les jours sur francebleu.fr.

"Le loup a quitté l’hôpital, où es-tu Covid ?"

"Le loup a quitté l’hôpital. Où es-tu Covid ? Bizarrement ta contagiosité s’est spontanément éteinte, le fameux R0 - le taux de reproduction du coronavirus - rejoint jour après jour le point zéro. Les plus pessimistes diront d’attendre encore sept jours, histoire de se rassurer. Tout le monde est dehors, quelques esseulés inquiets sont masqués mais la majorité se postillonne dessus sans retenue. 

Et Covid si tu rejouais ton air macabre en 2021, serions-nous capables de prévoir une future pandémie ou une autre catastrophe ? Qu’a retenu l’hôpital de ce tsunami viral ? Va-t-il rejoindre lui aussi le point zéro ? Il faut tout revoir des futurs plans, augmenter le nombre de lits comme nos voisins allemands. Nous avons vu que pourtant lézardé, notre hôpital public a su faire front de façon exemplaire. Il est urgent de construire une communication entre les différents corps de métier avec une simplification administrative. Plus question de faire une fameuse "fiche projet" de 20 pages, évaluée par le pôle (groupement de plusieurs services) puis par la cellule projet, par la direction des finances, la direction des ressources humaines puis celle de la qualité, trois reports de présentation puis une arrivée triomphante au directoire qui validera la demande de budget à l’agence régionale de santé. Quelle joie, la veille du départ à la retraite, le financement a été accordé, comme si celui-ci était une faveur.

"Que le Ségur de la santé redonne les rênes de la confiance aux soignants"

Nous sommes dans une relation infantilisante où le médecin finit par être heureux d’être écouté et d’obtenir les moyens tant attendus pour le patient.  Il est urgent d’élaguer avec une hache courageuse cette structure administrative s’étalant de la Direction Générale de l’Organisation des Soins (DGOS) via l’Agence Régionale de Santé (ARS) aux directions de structures de soins. 

A chaque étape, chacun se sert et se tient par la barbichette mais personne ne rit avec ou sans tapette, un surcoût et une paralysie organisée, c’est d’un effrayant immobilisme.  Que le Ségur de la santé redonne les rênes de la confiance aux soignants en allégeant leur carriole des procédures administratives en surpoids chronique."