Municipales à Paris: la confirmation de Buzyn ouvre les discussions sur les alliances
Pour le second tour, Cédric Villani va choisir de nouer une alliance globale soit avec LREM, soit avec la coalition climat. Dans le Ve arrondissement, les listes macronistes et LR devraient fusionner
by Nathalie SegaunesComme l’Opinion l’annonçait, l’ex-ministre de la Santé Agnès Buzyn a fait savoir mardi qu’elle restait candidate pour le second tour des municipales dans la capitale, prévu en principe le 28 juin. Les listes LREM ont obtenu 17,3% des suffrages le 15 mars. Le dépôt des candidatures étant programmé le 2 juin, les discussions sur les fusions de listes ont commencé.
Elle n’avait pas le choix. Agnès Buzyn, tête de liste LREM au premier tour des élections municipales à Paris, ne pouvait se soustraire au second. « Hésitante », « terrifiée » à l’idée d’affronter « la brutalité de l’opinion » à son égard, selon un responsable macroniste, l’ex-ministre de la Santé a mis fin au suspense mardi, avec quelques heures de retard sur l’horaire prévu, en annonçant qu’elle restait bien la candidate du parti présidentiel dans la capitale.
« Je suis pleinement engagée, déterminée à terminer cette campagne. On y va ! », a-t-elle lancé aux têtes de liste des arrondissements, réunis en visioconférence à la mi-journée. « J’ai mûrement réfléchi à la manière dont je pouvais mener cette campagne dans des circonstances exceptionnelles, politiques et personnelles », a-t-elle expliqué, assurant avoir « beaucoup travaillé sur le dispositif pour nous permettre d’y aller la tête haute, tenir, trouver les ressources » en elle.
«C’est courageux de sa part, commente un proche de la candidate. Elle va incarner les failles du gouvernement dans la crise sanitaire et servir de paratonnerre à toute la macronie, elle le sait. Va-t-elle tenir le coup psychologiquement ? C’est désormais la question. »
Reste que le Code électoral, étudié de près ces dernières heures au sein de La République en marche, n’offrait guère d’alternative. Un candidat ne peut pas se retirer de sa liste initiale entre les deux tours. Si Agnès Buzyn décidait de ne pas se maintenir au second tour dans la XVIIe arrondissement (où elle a obtenu 22,68% des voix le 15 mars), c’est toute la liste LREM qui disparaissait du second tour dans cet arrondissement…
En revanche, elle pouvait rester tête de liste dans le XVIIe mais décider de ne pas concourir à l’élection du maire de Paris, élu au second degré par les conseillers de Paris. Ce n’est manifestement pas le choix qu’elle a fait. « LREM était déterminé à ne pas changer de candidat à la mairie de Paris, note l’un de ses soutiens, ni Mahjoubi, ni Bournazel, qui étaient pourtant candidats à l’investiture il y a quelques mois et seront élus au Conseil de Paris, ne souhaitant y aller à sa place... »
« Choix important.» La décision d’Agnès Buzyn était attendue avec impatience, non seulement par les marcheurs, mais également par Cédric Villani. Elle permet en effet d’entamer les discussions pour une éventuelle alliance de second tour, qui doivent être conclues d’ici mardi. Alors que les têtes de listes villanistes sont tentées de fusionner avec la liste LREM dans certains arrondissements, avec la liste PS-EELV dans d’autres, l’entourage du mathématicien précise que des alliances « à la carte », arrondissement par arrondissement, sont exclues.
« Cédric, depuis le début, était sur une logique d’élargissement, de trait d’union entre les deux rives du progressisme, affirme Rayan Nezzar, son porte-parole. Comme il n’y aura pas d’alliance entre LREM, la Coalition climat et nous, il doit faire un choix entre la Coalition climat et LREM. Ce sera un choix politique et stratégique important. »
Florence Berthout devrait s’engager à voter en faveur de Rachida Dati, lors de l’élection du maire de la capitale
« Rejoindre En Marche en ce moment, ce n’est pas une perspective très enthousiasmante », rechigne déjà une tête de liste villaniste. Mais dans certains arrondissements, certaines têtes de liste LREM estiment qu’un accord avec les villanistes permettrait d’enclencher « une dynamique » pour le second tour et d’engranger quelques sièges.
Accessoirement, un accord à Paris permettrait à la macronie de « récupérer » le médaillé Fields, qui siège désormais au sein d’Ecologie, démocratie, solidarité, le neuvième groupe politique, tout récemment créé à l’Assemblée. « On va vers une réconciliation LREM-Villani », veut croire un rouage de la majorité.
« Consolidation. » Une autre question stratégique sera à trancher : dans certains arrondissements, LREM ne devrait-il pas s’entendre avec LR ? Ne faudrait-il pas fusionner ou procéder à des accords de retraits réciproques ? Le sujet a été évoqué lors d’une première visioconférence entre Agnès Buzyn et ses têtes de liste, le 19 mai.
S’il est sur la table, c’est parce que, dans deux arrondissements où les maires sortantes issues des Républicains se sont présentées sous les couleurs macronistes, la situation est incertaine : le Ve et le IXe. « Nous sommes tous d’accord pour que les maires qui nous ont rejoints puissent sauver leurs mairies, rapporte un des participants à la discussion. Nous sommes lucides. Nous sommes passés d’une stratégie de conquête à une logique de consolidation de ce que nous avions. »
Dans le Ve, Florence Berthout est en posture très difficile. Avec 28,5% des suffrages récoltés au soir du premier tour, la maire de l’arrondissement depuis 2014 est talonnée par la liste Hidalgo qui, en s’alliant avec EELV, pourrait faire basculer à gauche ce fief traditionnel de la droite. Dans le IXe, Delphine Bürkli dispose, elle, de davantage de marges de manœuvre. Avec 36,9%, celle qui avait fait basculer cette terre à droite en 2014 est largement en tête devant la liste PS (25%) et LR (15,7%). Le 28 juin, elle sera favorite.
Au final, l’hypothèse de retraits réciproques ne verra pas le jour. En revanche, dans le Ve arrondissement, la liste conduite par Florence Berthout devrait fusionner avec la liste LR, qui était menée par Anne Biraben et a récolté 17,27%. L’opération serait sur le point de se conclure. En échange, l’ex-présidente du groupe LR au conseil de Paris devrait s’engager à voter en faveur de Rachida Dati, lors de l’élection du maire de la capitale. Les deux femmes ne se sont pourtant pas épargné ces dernières années.