Coronavirus : timide réouverture des terrasses en Espagne
by JULIEN CASSANAprès pratiquement trois mois passés sous le joug d’un des confinements les plus stricts de la planète, l’Espagne semble revivre peu à peu. Madrid et Barcelone sont enfin passés à la “phase un” du déconfinement ce lundi 25 mai.
Les terrasses des bars peuvent rouvrir, à 50% de leur capacité antérieure depuis ce lundi 25 mai. L’Espagne retrouve donc l’un des ses traits caractéristiques, même si le retour à la normale sera long.
José Luis et Esther n'auraient raté ça pour rien au monde
José Luis et Esther, la cinquantaine, sont tout sourire. Attablés sur une des terrasses du quartier touristique madrilène de Malasaña, ils n’auraient raté ce moment pour rien au monde. “Nous célébrons la fin de l’enfermement ” se réjouit José Luis, visiblement ému. “Ce mode de vie en extérieur, dans la rue ou sur les places, fait partie de notre ADN espagnol”.
Et son épouse, Esther de confirmer : “Pour nous, boire une caña (bière pression) en terrasse est le premier signe concret du retour à la normale”. Afin de profiter au mieux de la journée, ils ont même demandé un jour de congé à leur employeur. “De toute façon, cette année, nos vacances sont compromises. Notre destination touristique sera donc… notre ville !” lance Esther, amusée.
Les bars ont rouvert avant les écoles
Le quotidien en ligne “Voz Populí” remarque avec un brin d’ironie, que l’Espagne est le seul grand pays européen qui rouvre les bars avant les écoles. Il faut dire que le pays est au premier rang mondial en terme du nombre de bars par habitant : un établissement pour 175 personnes.
Pendant 70 jours aucun centime n'est rentré dans les caisses
Pour Victor Patiño, 38 ans, gérant du bar El Gato sur la place Dos de mayo, la réouverture des terrasses est un soulagement : “Pendant 70 jours, aucun centime n’est rentré dans les caisses. J’ai dû me résigner à me séparer de mes six employés. Je n’avais pas le choix” lance-t-il, désabusé. Alors pour relancer son commerce, Victor ne compte pas les heures. “Pendant les premiers temps, je vais travailler seul, quatorze heures d’affilée, tous les jours”.
Sa journée débute à dix heures pour se terminer à minuit. “Je n’ai droit qu’à installer cinq tables, au lieu des dix habituelles… C’est vraiment peu, d’autant plus que la loi m’interdit, pour le moment, de recevoir des clients à l’intérieur” nous explique-t-il, la gorge serrée. “Pour être sincère, même en travaillant comme un forcené, je vais continuer à perdre de l’argent”.
Difficile de trouver une chaise disponible
Dans le quartier de La Latina, la scène se répète : les Madrilènes - qui portent dans leur grande majorité un masque - peinent à trouver une chaise disponible. Jaime et Patricia ont dû chercher quinze minutes une terrasse libre. Assis au soleil devant leur café agrémenté d’une tostada con tomate (pain grillé avec de la tomate râpée et de l’huile d’olive), ils ne boudent pas leur plaisir.
Tous deux en télétravail dans une entreprise technologique, ils ont voulu profiter de leur pause matinale pour prendre l’air. “Nous sommes surtout venus pour apporter notre soutien au commerce local. Sans ces petites enseignes, notre ville perdrait son identité”.
Les parcs également rouverts
Le passage à la “phase un” signifie également la réouverture des parcs et la possibilité de revoir sa famille et ses amis, dans la limite d’un groupe de dix personnes et en respectant une distance de deux mètres. L’Espagne reprend peu à peu le chemin de la normalité et tente d’oublier les hôpitaux débordés, les morgues improvisées et les 28 773 décès dus au COVID-19.
Prochain enjeu : celui du tourisme
Le prochain enjeu sera celui du tourisme, moteur de l’économie, qui représente 12% du PIB et emploie 2,6 millions de personnes. Le socialiste Pedro Sánchez, président du gouvernement espagnol, est conscient de l’urgence à le réactiver. Avant-hier il se voulait rassurant en s’adressant aux touristes étrangers : “L'Espagne vous attend dès le mois de juillet”.