Ne dites plus « spoil » ou « deepfake », mais « divulgâchis » et « vidéotox »

by

Des termes et des expressions liés à l'édition et aux médias ont reçu une traduction officielle depuis le 23 mai. Vidéotox, divulgâchis et hyperaccéléré viennent remplacer deepfake, spoil et time lapse.

Confinée comme tout le monde pendant l’épidémie de coronavirus, la commission d’enrichissement de la langue française reprend aussi du service. Elle a fait publier le 23 mai au Journal officiel une nouvelle liste de vocabulaire, concernant cette fois le domaine de la culture — avec un focus sur l’édition et les médias. Jérôme Rabenou, chargé de mission au ministère de la Justice, s’en est fait l’écho sur Twitter.

Au total, près de vingt termes étrangers bénéficient désormais d’une traduction officielle, que les administrations et les fonctionnaires doivent normalement employer dans leurs documents — c’est une obligation depuis 1996 à la suite d’un décret complétant la loi Toubon de 1994 relative à l’emploi de la langue française. Des mots étrangers qui sont parfois entrés dans le langage courant.

Au menu, donc, de cette édition figurent des mots comme « spoil », « deepfake », « podcast » (qui avait déjà fait l’objet d’une traduction officielle dès 2006), « show runner », social media manager » (idem, en 2013) ou encore « video mapping » et « time lapse ». Des termes qui sont peut-être déjà familiers pour nombre d’internautes, puisqu’ils sont employés couramment dans les colonnes de nombreux sites.

Le spoil se traduit désormais officiellement pas divulgâchis, mot-valise entre divulguer et gâchis. Faut-il vraiment expliquer dans quelle circonstance il s’emploie ? Il sert à signaler ce moment où un lecteur ou un spectateur perd l’effet de surprise de l’intrigue d’une œuvre de fiction, parce qu’il l’a découverte avant l’heure, par inadvertance en surfant sur le net ou parce que quelqu’un lui en a parlé.

Un spoiler est donc un divulgâcheur, ou une divulgâcheuse, c’est-à-dire la personne qui commet le divulgâchis.

https://www.numerama.com/content/uploads/2019/09/deepfake-detection-challenge-1024x576.jpg
Un exemple de vidéotox, avec un visage remplacé par un autre. // Source : Facebook

Deepfake, show runner et time lapse aussi traduits

Concernant deepfake, la commission propose « vidéotox », un autre mot-valise, cette fois entre vidéo et intox. Les deepfakes sont ces vidéos dans lesquelles un visage est remplacé par un autre au moyen d’un trucage informatique, afin de donner l’illusion que c’est une autre personne qui est mise en scène. Les deepfakes sont en plein essor, du fait des progrès en apprentissage automatique, une discipline de l’IA.

Pour show runner, la commission a opté pour directeur ou directrice d’une série. En clair, c’est la personne qui supervise l’écriture et la production d’une série, dont elle est la plupart du temps à l’origine. Video mapping qui désigne un ensemble d’images fixes ou animées conçues pour être projetées à grande échelle sur une surface autre qu’un écran, souvent la façade d’un édifice, se dira « fresque vidéo » .

Social media manager devient « responsable des réseaux sociaux ». « Animateur de communauté », qui était la traduction proposée en 2013, reste, ainsi que quelques autres alternatives (comme « responsable de la promotion en ligne »). Time lapse se dit en bon français « hyperaccéléré ». Cela désigne une technique de prise de vue permettant de voir une séquence rapidement. Elle sert pour rendre compte de l’évolution d’une séquence qui requiert énormément de temps à s’accomplir,

C’est le cas par exemple de la construction d’un bâtiment ou de la course du Soleil dans le ciel, qui sont imperceptibles avec le déroulement normal du temps. Cet effet est obtenu en prenant des prises de vue d’une même scène à différents moments et à intervalles réguliers, sur une période de temps plus ou moins longue. Une fois toutes ces prises de vue assemblées, elles sont lues avec un montage donnant cette impression de vitesse.

Enfin, podcast se dira « audio à la demande ». C’est le cas par exemple d’une émission de radio que l’on peut réécouter sur le site web de la station. La commission en profite pour éjecter sa précédente traduction, « diffusion pour baladeur », qui avait été proposée en 2006. Elle apporte par ailleurs des précisions sur différents termes dérivés de podcast, afin d’éviter de mélanger des notions parfois distinctes.