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De la souveraineté technologique à la responsabilité, il n'y a qu'un pas

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OPINION. Si les entreprises responsables doivent faire de la souveraineté numérique et technologique leur priorité, c'est autant pour protéger que pour développer leur business. (*) Par Fabien Aufrechter, Directeur Havas Blockchain.

« Il faut se méfier des ingénieurs, ça commence par la machine à coudre, ça finit par la bombe atomique ». Au-delà de la plaisanterie de Marcel Pagnol, l'innovation n'est en effet plus le domaine réservé des ingénieurs. Parce qu'elle interroge les décideurs en développant de nouveaux modèles de gouvernance, elle n'a même jamais été aussi stratégiques. Et ses déclinaisons notamment technologiques doivent être appropriées et intégrées par les gouvernements et collectivités comme par les entreprises à leurs plans de développement durables.

C'est une sorte d'effet miroir : désormais, à travers le prisme de la RSE l'innovation se doit d'être durable. Mais symétriquement, les entreprises et gouvernements sont désormais attendus sur leurs visions, leurs approches et leurs actes relatifs aux innovations - en particulier technologique. Aux côtés de la RSE, les décideurs doivent donc désormais adjoindre une notion nouvelle : celle de la « Responsabilité technologique des entreprises ».

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La souveraineté numérique, première responsabilité technologique

De la monnaie monde Libra imaginée par Facebook jusqu'aux enjeux du tracking, la souveraineté numérique reste un sujet émergent. Il constitue cependant le premier pilier de la Responsabilité Technologique des Entreprises. Et le sujet cristallise des défis éthiques, de sécurité et de liberté économique.

Qu'est-ce que la souveraineté numérique et technologique ? Au-delà de la question géographique du stockage de data, c'est un enjeu de vision, de propriété et de Gouvernance. La notion de souveraineté est liée à celle de puissance absolue, d'indépendance et de territoire : appliquée à l'innovation, c'est donc la capacité à imposer sa vision, à choisir librement et de manière éclairée ses partenaires industriels et à disposer de positionnements ; pour ne pas dire d'une réelle vision politique de l'innovation.

Gérer sa souveraineté numérique et technologique implique la gestion de certains enjeux dont la plupart ne sont pas intégrés par les gouvernements et entreprises. Parmi eux :

Si les entreprises responsables doivent faire de la souveraineté numérique et technologique leur priorité, c'est autant pour protéger que pour développer leur business.

Quelle gouvernance pour le numérique et l'innovation ?

D'une certaine manière, ce sont les trois lois de la robotiques formulées par Asimov qui démontrèrent combien la gouvernance de l'innovation est essentielle. Sans gouvernance (privacy, bridage, etc), l'innovation perd sa part d'humanité et d'utilité. Mais l'innovation propose aussi de nouveaux modèles de gouvernance (automatisation, décentralisation, etc) qui sont autant d'opportunités pour les entreprises.

En tant que deuxième pilier de la Responsabilité technologique des Entreprises, la gouvernance de l'innovation est donc la clef du leadership économique. Le modèle est celui des dynamiques concurrentielles schumpetériennes, selon lesquelles le vainqueur de la course à l'innovation (ou à l'intégration des gouvernances innovantes) valorise au mieux son activité. Évoluer ou laisser sa place ? Dans un contexte de remise en cause inédit, la logique darwinienne est encore plus vraie pour les Gouvernements et les institutions internationales. Alors à quand un nouveau traité de Johannesburg dédié à ces enjeux ?

La clef de l'innovation reste la créativité

Le troisième pilier de la Responsabilité technologique des Entreprises, c'est enfin la créativité. La formule de Jacques Séguéla est un bon résumé : « tech sans affect n'est que ruine de l'âme ». L'innovation, qu'elle soit technologique, sociale ou par exemple environnementale, doit d'abord être un outil d'engagement. Et pour ce faire, créer l'émotion et l'empathie. En cela, la créativité est à l'innovation une sorte de supplément d'âme équitable ; un ensemble de valeurs qui font économiquement la différence sur la durée.

Car si nos entreprises, collectivités et gouvernements se meurent, c'est parce qu'ils ne savent plus innover, se réinventer, se questionner. La prise en compte réelles de leur Responsabilité technologique au sein de leurs plans de développement est donc une urgence, qui plus est dans les contextes de crise. Une urgence qui ne peut être comblée que par le déploiement d'« objectif de développement technologiques », à l'image des Objectifs de Développement Durables (ODD) d'hier. Et qui fera la différence dans quelques années lorsque les entreprises découvriront que oui, comme la RSE hier, la Responsabilité Technologique des Entreprises n'est pas qu'un vernis de bonne conscience mais un catalyseur de business.

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