AXA : la condamnation de la discorde

by

Axa (-1,37% à 15,12 euros) débute la semaine à la dernière place du CAC 40, alors que l'indice parisien retrouve des couleurs printanières. L'assureur souffre de sa condamnation, annoncée vendredi, par le Tribunal de commerce de Paris d'indemniser le restaurateur Stéphane Manigold à hauteur de 45 000 euros au titre de la perte de marge brute, à la suite de la fermeture de ses établissement en raison de l'épidémie de Covid-19. Les juges ont estimé que la couverture du restaurateur contre les pertes d'exploitation étaient parfaitement applicables. Une décision dont Axa a déclaré "prendre acte".

Toutefois, l'assureur, qui a fait appel, estime que celle-ci a été "prise dans l'urgence" et qu'elle reflète un "désaccord sur l'interprétation de la clause Perte d'Exploitation du contrat de Monsieur Manigold". Un contrat "spécifique", "souscrit par quelques centaines de professionnels de la restauration auprès d'un cabinet de courtage", ajoute Axa.

Depuis le début du confinement, l'indemnisation des pertes d'exploitation pour les commerces et entreprises les plus durement touchés par la crise sanitaire font l'objet d'un véritable bras de fer entre assureurs, assurés, courtiers, associations professionnelles et pouvoirs publics.

Or la décision du Tribunal de commerce de Paris pourrait bien faire jurisprudence, ce qui inquiète les groupes d'assurance, dont la trésorerie est mise à mal par les mesures exceptionnelles (reports de cotisations, indemnités extra-contractuelles...) prises ces deux derniers mois, en plus de la dévalorisation de leurs actifs due à chute des marchés.

Les premiers à ouvrir le feu furent les Assurances du Crédit Mutuel et CIC Assurances. Les deux organismes ont en effet proposé fin avril à leurs clients ayant souscrit une assurance multirisque professionnelle avec perte d'exploitation (PE), une prime de relance mutualiste comprise entre 1 500 et 20 000 euros.

Une " 'vraie-fausse' bonne nouvelle" pour Patrick Evrard, le président d'Agéa, qui avait jugé "particulièrement agressive" cette mesure visant, selon lui, "la non-application de garanties de PE réellement applicables".

Quelques jours après, MMA avait également décidé de verser une "indemnité de crise sanitaire MMA" de 1 500 à 10 000 euros par client, en faveur des professionnels ayant souscrit une assurance multirisques incluant une garantie PE après incendie.

Or dans la très grande majorité des cas, les garanties PE ne couvrent pas le risque d'épidémie, d'où l'agacement de certains acteurs du secteur assurantiel devant ces pratiques extra-contractuelles.

Dans une interview aux Echos du 5 avril dernier, Thomas Brubel, le directeur général d'Axa, avait ainsi déclaré être favorable à la création d'un "régime d'assurance pandémie". Il avait ajouté que les assureurs ne pouvaient pas "prendre en charge toutes les pertes non assurées provoquées par le confinement", car "le secteur de l'assurance se mettrait en danger s'il payait un sinistre pour lequel personne n'a cotisé."

Pour remédier à ce problème, la Fédération européenne des associations de gestion des risques (FERMA) a annoncé début mai le lancement d'un groupe de travail chargé d'élaborer des propositions pour traiter la question de la couverture des risques catastrophe en cas de pertes d'exploitation. Les premiers résultats du groupe de travail, composée de hauts responsables des membres de la FERMA, sont attendus dans les prochains jours.

De son côté, l'Autorité de Contrôle Prudentiel et de Résolution (ACPR) a elle aussi décidé de lancer sa propre étude et d'établir un état des lieux des principaux contrats commercialisés sur le marché français. Selon l'institution, certaines pertes économiques pourraient être couvertes par des garanties de perte d'exploitation vendues par des assureurs. L'ACPR prévoit de publier les résultats de ses travaux en juin ou juillet.

En attendant, les dossiers liés au coronavirus ont eu tendance à ralentir certains dossiers de sinistres "traditionnels" de perte d'exploitation (incendie...), comme le remarque l'UPEMEI, le syndicat historique des sociétés de l'expertise d'assurés en France, qui a demandé à la Fédération Française de l'Assurance (FFA) quelles contreparties étaient envisagées par les assureur.

Selon un sondage d'Assurlandpro.com, 97% des TPE et indépendants ne seront pas indemnisés pour les pertes liées à l'arrêt de leur activité professionnelle dans le cadre de la crise sanitaire.

https://www.zonebourse.com/images/aof.gif

Copyright 2020 AOF
Tous droits de reproduction et de représentation réservés (Avertissement légal)