Les habitants de la métropole d'Orléans ont privilégié les produits locaux et bio pendant le confinement

https://image1.larep.fr/photoSRC/VVNUJ1paUTgIBhVOCRAHHQ4zRSkXaldfVR5dW1sXVA49/relocalisation-alimentation-ingre-ormes-2030_4764748.jpeg
Ingré-Ormes 2030 a réuni samedi 16 mai, douze producteurs locaux, "avec des prix accessibles à tous", pour satisfaire les 79 commandes faites auprès de son groupement d’achat. Photo Ingré Ormes 2030 © Orléans AGENCE

Les ventes à la ferme, livraisons de fruits et légumes ont explosé pendant le confinement dans l'agglomération d'Orléans, comme partout en France. Est-ce le début d’un mouvement de fond pour relocaliser la production alimentaire ?

Le constat 

À Orléans, comme ailleurs, les habitants se sont davantage tournés vers les circuits courts pour s’alimenter pendant le confinement. Les ventes directes ont été prises d’assaut, comme les livraisons, et retraits de commandes maraîchères.
L’association Ingré-Ormes 2030, qui œuvre depuis quelques années pour l’installation de producteurs locaux à l’ouest de l’agglomération, a vu le nombre de clients à son groupement d’achat de produits bio et locaux, doubler.

"Nous avons lancé ce groupement d’achat en novembre 2018. Durant toute l’année 2019, à chaque vente, nous avions une trentaine de commandes. Pour celles du 4 avril et du 16 mai, nous avons eu 79 commandes. Nous sommes passés de 700 ou 800 kg de produits, à 1,5 tonne en avril, avec des œufs, du poulet, de l’huile, des légumineuses, des fruits et légumes…"Pascal Haran, (association Ingré Ormes 2030)

"Nous pouvons observer une hausse significative des achats bio dès la prise de conscience de la pandémie et de l’évolution des mesures prises en France. Les produits bio ont suscité un intérêt nutritionnel, environnemental grandissant dans ce contexte de doute sanitaire. Un plus en matière de santé également." Tel est aussi le constat de Bio Centre, l’association de la filière biologique en région Centre, qui, chiffres à l’appui, souligne que les produits bio ont été plébiscités dans la région, comme en France, et ce dans les supermarchés traditionnels, les magasins bio, et auprès des producteurs locaux.

Pourquoi un tel engouement ? 

L’association Bio Centre cite un sondage mené par Opinion way, en avril : "69 % des personnes interrogées font le lien entre nos modes de production et la crise sanitaire, illustrant l’urgence de changer nos modes de consommation". 

Volonté de ne pas se rendre dans des lieux trop fréquentés comme les supermarchés ; davantage de temps pour cuisiner ; davantage de repas pris à la maison plutôt qu'en restauration collective, soit la nécessité d’acheter plus de nourriture ; difficulté pour les points de vente à s’approvisionner en produits provenant habituellement de l’étranger : les explications de cet intérêt pour les circuits courts sont plurielles.

Comment les producteurs locaux se sont-ils adaptés ? 

"Certains producteurs ont mis quelques jours à s’organiser pour répondre à la demande énorme, mais tous se sont adaptés très vite".Jean-François Vincent (président de Bio Centre)

Cela a été le cas d’Yves de Rochefort, producteur de farines bio, quinoa et pâtes, à Saint-Hilaire-Saint-Mesmin.  Pour faire face à la demande croissante, il a misé sur la force du réseau : "Les producteurs locaux se connaissent tous et sont tous soudés, j’ai trouvé sans difficulté la plupart des grains qu’il me fallait, hormis quelques ruptures sur des produits spécifiques. J’ai embauché quelques étudiants pour le conditionnement." 

Il a aussi été sollicité par de gros supermarchés de l’agglomération comme Leclerc : "On commençait à travailler avec eux, mais nous étions moins visibles. Le pari est qu’ils nous gardent ensuite en bonne place". Il reçoit régulièrement des messages de clients qui ont découvert ses produits pendant le confinement et en sont satisfaits. "On va espérer que cela se poursuive sur la durée", conclut le meunier.

https://www.larep.fr/photoSRC/Gw--/baguette-de-patay_4764751.jpeg
Pour la famille Rochefort, la production de farine bio a doublé pendant le confinement. Photo archive

Est-ce le déclic pour un développement massif des circuits courts ?

C'est en tout cas le souhait des associations militantes locales. Pour Ingré Ormes 2030 et le mouvement citoyen Alternatives territoriales, c’est le signe qu’il faut accentuer les politiques favorisant l’installation sur le territoire métropolitain de producteurs locaux, pour tendre vers l’autonomie alimentaire, puisque les habitants sont demandeurs.

"La relocalisation des achats alimentaires est une solution économique et écologique. Qu’est ce qui peut nous permettre l’autosuffisance alimentaire, quels outils de vente directe ? Nous allons rediscuter de tout cela avec les candidats aux municipales qui ne sont pas encore élus, à la lumière de ce qu’on vient de vivre", argue Geneviève Cribier, militante d’Alternatives territoriales, un groupement d’Alternatiba. 

Quel est l'état des lieux sur le territoire orléanais ?

Pascal Haran déplore que la métropole soit en retard par rapport à d’autres territoires :

Pour Laurent Baude, vice-président d’Orléans Métropole en charge de l’agriculture, la volonté de relocaliser l’alimentation a déjà été actée par la collectivité depuis plusieurs années, avec la mise en œuvre d’une charte agricole, le travail avec le conseil départemental et la chambre d’agriculture autour du PAT, et depuis novembre 2019, la construction du projet territorial agricole et alimentaire, qui a pris du retard en raison du Covid et des élections. "Il devrait aboutir à l’automne. Mais, nous avons déjà engagé des actions  : une couveuse pour aider à l’installation de projets agricoles, le marché de gros qui est en cours d’extension, le développement de zones agricoles protégées pour préserver le foncier sur le long terme, le développement du guide des producteurs..."

Un accélérateur pour l'avenir ? 

"J’ai aussi le souhait qu’on appuie davantage sur l’accélérateur, mais des producteurs, il faut en trouver, ce n’est pas facile. Et pour atteindre l’autosuffisance, il va falloir des années. Le levier important est le comportement des consommateurs et qu’ils le gardent, c’est aussi une période ouverte à des innovations qui peuvent être intéressantes et qu’on soutiendra", répond Laurent Baude aux critiques des associations.

Cindy Roudier-Valaud