Scott Forstall : sa première rencontre avec Steve Jobs et le coup du poisson de Microsoft

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Scott Forstall, l'ancien responsable du logiciel chez Apple a passé une tête lors d'une session Zoom organisée par Code.org avec des apprentis programmeurs. L'occasion de glisser quelques anecdotes sur son arrivée chez NeXT et sur le développement du premier iPhone.

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Forstall est arrivé chez Apple dans les bagages de Steve Jobs, lors de l'acquisition de NeXT. Et chez NeXT, c'est également Jobs qui s'est assuré de convaincre ce jeune développeur, sorti de fac, de rejoindre sa start-up.

Forstall raconte qu'il avait d'abord postulé chez Microsoft, mais il était aussi intéressé par le profil des gens chez NeXT et leur technologie. En cela ses propos rappellent ceux de Craig Federighi, son successeur chez Apple, passé par la même école NeXTienne (lire Les conseils (sérieux ou pas) de Craig Federighi pour réussir une carrière).

En une seule journée, Forstall enchaîna 17 entretiens chez NeXT avec différents responsables. Mais alors que le premier rendez-vous n'avait démarré que depuis 10 minutes, Jobs fit sortir son employé et discuta lui-même en tête à tête avec le candidat Forstall : « Il m'a lancé question sur question et, au bout de 15 minutes, on a vraiment accroché — sur la philosophie du design et d'autres choses. »

Au bout d'un moment, Jobs a mis fin à la conversation et lui a déclaré : « Je sais que vous avez des entretiens pour toute la journée. Je me fiche de ce qu'ils disent, à la fin de la journée je vous ferai une proposition. Mais faites comme si vous étiez intéressé par leurs questions. Je suis sûr que vous allez accepter cette offre ».

Forstall accepta d'aller chez NeXT et en avertit son contact chez Microsoft. Le lendemain, Forstall dit avoir trouvé sur le pas de sa porte une boite de congélation contenant un « poisson mort » et l'adresse de Microsoft en expéditeur. Passablement surpris — ayant à l'esprit la fameuse scène du Parrain avec la tête de cheval — il s'enquit de la raison de cet envoi.

Ses interlocuteurs, espérant le convaincre encore de venir à Seattle, étaient allés au marché du port pour acheter le plus gros saumon qu'ils puissent trouver. Un poisson dont il assurèrent Forstall qu'il n'en trouverait jamais d'aussi bonne qualité en Californie… Le saumon finit grillé et Forstall chez Steve Jobs plutôt que chez Bill Gates.

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Chacun a son idée pour un futur téléphone

Plus loin dans la discussion, il revient sur la conception de l'iPhone et commence par expliquer que chez Apple, tout commençait par le design plutôt que par la technologie. Cette dernière se met au service de plusieurs choses mais elle n'est pas le but en soi.

Dans le cas de l'iPhone, l'idée était d'aller vers un design tout écran et tactile, inspiré des développements lancés pour ce qui deviendrait plus tard l'iPad.

Dans ce contexte, mettre au point un clavier virtuel aussi efficace qu'une version matérielle s'est avéré « le problème le plus complexe de tout le projet ». La suite est connue et a été déjà racontée. Au bout d'un an, le clavier virtuel marchait toujours très mal et Forstall ordonna une pause dans tous les développements logiciels pour trouver enfin une solution. Celle d'un système associant une prédiction de la frappe avec une adaptation dynamique de la zone tactile du caractère touché (lire La petite idée qui donna au premier iPhone un bon clavier & En 2005, le casse-tête du clavier virtuel de l’iPhone)

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À gauche, un système de type « ruban ». Il faut balayer la zone en bas (avec le A à gauche et le Z à droite) pour faire défiler les lettres (en haut). Sur l’image de droite, une autre idée consistant à placer plusieurs lettres dans une touche virtuelle, charge au système de deviner le mot. Un système de suggestion qui évoque QuickType

Forstall a également glissé un mot sur le bouton Home, disparu avec l'iPhone X mais qui survit avec les iPad non Pro et l'iPhone SE 2020. « Est-ce qu'il faut quatre boutons en façade, zéro, un seul ? » se sont demandés les concepteurs de l'iPhone au début du développement. Avant de se décider sur un seul et unique bouton. Au moins, lorsqu'un utilisateur se perdait dans l'interface il savait, à coup sûr, qu'en pressant ce bouton, il retomberait sur ses pieds. Une sortie de secours facile à trouver et à utiliser.

Enfin, Forstall, qui a produit une pièce à Broadway avec un certain succès, a de nouveau insisté sur l'importance pour les développeurs de ne pas se cantonner dans leur spécialité, mais de s'intéresser à d'autres disciplines relevant des arts (lire Scott Forstall : les développeurs superstars chez Apple s'intéressaient à la philosophie, à la littérature).