En marche d’un pas désormais incertain

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Les pieds platinés

Ils étaient trois comme les glorieux Pieds Nickelés de nos fanzines. Ils se rêvaient un grand destin, empruntant un chemin tout juste défriché par un grand explorateur des territoires broussailleux. Ils avaient foi en lui, subjugués qu’ils étaient par ses belles manières, son sourire enjôleur, ses propos novateurs et cette force magnétique qui émanait de lui. Il voulurent mettre leur petits petons dans les grands pas de l’homme en marche, ils se firent les pieds platinés de notre département.

Trois séides prêts à suivre aveuglement leur seigneur et maître, à le suivre et même parfois à le précéder, le coupe-coupe en main pour se frayer un chemin dans la jungle des idées reçues, des conformismes, des frilosités de nos contrées. Ils se pensaient explorateurs, aventuriers, conquérants. Rien n’était trop beau dans leurs rêves de gloire, ils avaient au-dessus de leur tête, l’étoile scintillante de celui qui allait leur donner les raisons d’exister.

Ils partirent en campagne pour bouter les vieilles badernes de la politique locale, c’est du moins ce qu’ils prétendaient, arborant fièrement leur jeunesse et leur prestance pour unique programme. L’époque était à l’euphorie, le bon peuple avait été hypnotisé par l'ensorceleur, il n’en fallut pas plus pour qu’ils triomphent et rejoignent une palanquée de leurs semblables, néophytes notoires et candides indécrottables.

L’un de nos trois pieds platinés se grisa immédiatement au contact des médias. Quoique inféodé au monarque, il se prit au jeu de lui servir d’aiguillon, de poil à gratter en fricotant un temps avec un insoumis, rebelle estampillé, trublion des tribunes et vedette des plateaux. Il fit de même, s’agitant en tous sens, défendant le camembert et les navets avec la même verve. Il avait trouvé son créneau pour exister et se faire un nom.

Hélas, dès qu’il s’agissait de voter, il rentrait dans le rang et participait comme ses deux consœurs à la coupe réglée des acquis du Conseil National de la Résistance. Il ne suffit pas de pérorer la main sur le cœur, de jurer son attachement à la vie, la planète, la diversité quand sournoisement, on pactise avec les traités de la sinistre mondialisation.

Bien vite, les masques tombaient. Ils avaient beau s’afficher dans une modernité radieuse, prétendre bousculer les anciennes manières de faire de la politique, ils durent avaler des vipères sur ce chemin rocailleux et accidenté. Ils étaient du nombre de ceux qui cautionnent les violences policières, permettent la casse du système de santé, entraînent les retraites dans le gouffre d’une privatisation prochaine. Marcheurs aux ordres, leurs rêves s’effondraient sans qu’ils l’admettent et en tirent la seule conclusion qui s’impose : quitter la docile file indienne comme le firent bon nombre de leurs anciens compagnons de route.

Eux n’avaient aucun doute, le poste est si précieux qu’il vaut bien de multiples trahisons. Ils se rangeaient sans sourciller derrière leur Dieu, ce Jupiter hautain et méprisant, qui leur avait valu cette inespérée promotion. Sentant venir le vent du boulet, ils cherchent désormais à se trouver une voie de garage, un petit pré carré pour rester en place.

La crise sanitaire leur a redonné un peu de lustre à coups de gel distribué avec au dos du flacon le nom du généreux député donateur, de missions salvatrices dont il convient de les féliciter et d’une campagne électorale masquée pour sauver ce qui peut l’être avec l’aide de médias nationaux, toujours au service d’un état pourtant aux abois. Une parenthèse presque enchantée pour se refaire la cerise à bon compte.

Le pouvoir les a grisés. Les pieds platinés rêvaient collectivement d’une grande métropole. Une seule a trouvé place auprès de celui qui ne veut pas s’encombrer de l’étiquette fâcheuse, du stigmate de la trahison absolue des promesses passées. Les deux autres devront bien vite penser une reconversion. Le cirque démocratique leur laissera sans doute de jolis strapontins pour continuer d’exister mais qu’ils sachent que nous ne sommes pas dupes de leur duplicité. Le pardon n’est pas chose possible après ce que nous venons de vivre. Ils ont tout Pt, à l’image du symbole chimique du platine et n’auront ni excuses Ni circonstances atténuantes au moment des prochains scrutins.

Irrespectueusement leur.

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