[Chronique] Valentin, Biden, Khamenei ou l'information verrouillée de l'intérieur
by Gilles-William GoldnadelEn une semaine, ces trois informations sont étonnamment passées sous le radar des grands médias. N'étaient internet et les vigies de la fâcheuse sphère, nul en France ne serait au courant, regrette Gilles-William Goldnadel.
La mort de Valentin, un pauvre petit gamin rémois de 12 ans, fauché sur un passage clouté par un délinquant multirécidiviste conduisant sans permis de conduire, n'a donné lieu à aucun article dans la presse nationale. On voudra bien comparer avec celle de Sabri, 18 ans, mort dans un accident de rodéo-cross nocturne à Argenteuil. Le motard non casqué a heurté un poteau électrique non loin d'une voiture de police. S’en sont suivi les émeutes tristement classiques et une marche blanche très médiatisée en hommage au malheureux jeune homme.
Pour tenter de calmer la révolte qui couvait, il a fallu que la police assure n'avoir pas exercé son office. Valentin n'est pas un saint à vénérer et ne saurait inspirer l'amour médiatique. Ne peut espérer cette compassion qu’un jeune des quartiers immigrés, victime avant tout de sa propre témérité. Si, d'aventure, un policier peut-être impliqué, même ou surtout à tort, on passe alors de la petite compassion au grand martyrologe. Le pauvre petit Valentin ne cochait aucune case.
Le vendredi 22 mai, dans un entretien accordé à une radio new-yorkaise, Joe Biden, candidat démocrate à la présidence des USA déclarait à un interlocuteur de couleur : « je vais vous dire que si vous avez un problème pour décider si vous êtes pour moi ou pour Trump, alors vous n'êtes pas noir. » Réduire un être humain à sa couleur de peau. Un honnête homme ne serait pas un honnête homme s'il ne considérait pas cette déclaration comme fondamentalement raciste. Un intellectuel ne serait pas un intellectuel, s'il ne trouvait pas cette déclaration comme profondément inepte. Et un moraliste ne serait pas un moraliste s'il ne la trouvait pas simplement abjecte.
Après une levée de boucliers sur les réseaux sociaux, notre progressiste d’avenir a été contraint de faire machine arrière.
Sans ces mêmes réseaux sociaux, j'ignorerais, comme mon lecteur, cette dernière sortie du favori de nos médias français plus convenus que convenables.
Une affiche sur le site du Guide Suprême iranien l'ayatollah Ali Khamenei, chef de la République Islamique, appelait cette semaine « à la Solution Finale » pour détruire l'État Juif. Alors qu'ordinairement l’israélo-centrisme règne en maître dans les médias français. Alors que toute déclaration controversée du premier ministre israélien donne lieu à des centaines de commentaires et à des milliers de commentaires sur ces commentaires. Alors que l'ensemble des faits sociétaux, des migrants au climat, font l'objet de comparaisons obscènes sauce Shoah, la presse française est demeurée muette. Au rebours de la classe médiatique et politique allemande.
Le journal Le Monde a consacré le 21 mai un article à l'Iran et Israël, renvoyant dos à dos la démocratie israélienne et les ayatollahs, sans faire la moindre allusion à la déclaration. N’était l’électronique, nul en France ne serait au courant. Contre l'information cadenassée de l'intérieur, seule la fâcheuse sphère est de nature à briser le rideau occultant. La loi Avia vient mettre en péril l'instrument du déverrouillage. Il n'est pas interdit aux naïfs, aux imbéciles et aux politiciens comiques de croire au hasard cosmique.