"Beaucoup de gens appelaient en pleurs" : une psychanalyste du Malesherbois a prêté son oreille pendant le confinement

Tout au long du confinement, Anne-Marie Cristina, psychanalyste dans Le Malesherbois, a assuré un soutien psychologique quotidien et gratuit par téléphone.

Elle n'a "jamais autant travaillé, enfin… bénévolement". Tout au long du confinement, Anne-Marie Cristina a tendu son oreille à toutes les personnes qui en avaient besoin.

Un dispositif de soutien psychologique mis en place en peu de temps et qui a pris de l'ampleur au fil du confinement. "Dès le départ, j'ai eu beaucoup de coups de téléphone, annonce la psychanalyste installée au Malesherbois. Je m'étais fixée des horaires de 8 heures à 23 heures et rapidement je suis passée à 24 heures sur 24."

"Il y avait un véritable besoin"

Crise d'angoisse, de panique, pleurs, solitude, violences… Anne-Marie Cristina n'a pas compté ses heures, qu'elles soient d'éveil ou de sommeil. "Il y avait un véritable besoin pendant cette période", juge-t-elle.

Son téléphone est resté branché en permanence, son numéro trouvable par quiconque. À tel point qu'il lui est arrivé de recevoir des messages qui n'avaient rien à voir avec son activité.

En décrochant, Anne-Marie a surtout eu des larmes à l'autre bout du fil. "J'ai eu des gens qui me disaient "j’ai envie de pleurer tout le temps, mais je ne sais pas pourquoi"?; d’autres qui "avaient peur, qui se sentaient seuls", décrit-elle.

Enfants, adultes, personnes âgées...

Des jeunes, des plus âgés, des célibataires, des personnes en couple, des parents… Beaucoup ont eu besoin de parler, de s'exprimer. Il y a eu ces femmes, "qui ne supportaient plus de s'occuper de leur mari, de leurs enfants, de ne plus avoir de vie sociale, d'être la boniche".

Ces enfants "dont les parents n'arrêtaient pas de crier, de se disputer"?; ces adultes qui voyaient leurs parents se laisser mourir?; ces personnes aux troubles dissociatifs "qui appelaient au secours car ils étaient abandonnés par leur psychiatre"?; ceux qui "pensaient qu'ils avaient le Covid mais qui ne pouvaient pas être testés"…

"Dans le silence de la ville, derrière ces portes fermées, je suis sûre que des choses terribles se sont passées."Anne-Marie Cristina (Psychanalyste)

"Le besoin premier, c'était d'être écouté"

À cette centaine de personnes, Anne-Marie Cristina a accordé du temps. Quand la situation l'exigeait, elle n'hésitait pas et montait dans un taxi, que ce soit pour une situation de violences ou de panique. Pour discuter, écouter, sauver. "L’écoute, c'est déjà 90% du travail, note-t-elle. Le besoin premier, c'était d'être écouté, de savoir que leurs peurs sont légitimes."

La psychanalyste a tenté d'apaiser à toute heure du jour et de la nuit. "J'ai eu beaucoup d'appels entre 23 heures et 1 heure, note-t-elle. Parfois les gens me rappelaient d'eux-même parce qu'ils avaient besoin de parler encore. D'autres fois, c'est moi qui prenait des nouvelles."

Un après flou à apprivoiser

Les peurs pendant le confinement ont beaucoup été évoquées. Mais celles de l'après ne se sont pas faites attendre. "J'ai envie de dire qu'il ne faut pas arrêter de vivre, lance la psychanalyste. Si on a envie de manger avec d'autres personnes, on peut le faire en respectant les règles. Il faut que l'humanité persiste. Pendant le confinement, on a découvert nos voisins, on s'est entraidés?!"

Anne-Marie Cristina a mis en place des groupes de parole. Elle va bientôt donner des conférences en ligne, lors desquelles le thème sera choisi par les personnes. Pour la contacter : 06.33.22.56.09.

Maryne Le Goff

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