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AFP

Une bouffée d'air frais pour les jardiniers malgré le virus

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À Montréal, épicentre au Canada de la pandémie de coronavirus, la réouverture des très populaires potagers communautaires, après plus de deux mois de confinement, arrive comme une bouffée d'air et d'espoir pour les adeptes du jardinage, en dépit de règles strictes.

«Juste de toucher à la terre, c'est comme renouer avec quelque chose de plus profond en nous, ça fait du bien à notre âme, ça apaise tout ce chaos et je pense qu'il faut vraiment ça», dit Manon Labelle, masque sur le visage.

À 62 ans, Manon est comblée de retrouver sa parcelle dans le jardin De Lorimier. Elle vient de perdre son père, fauché il y a une semaine par le coronavirus.

Dans ce potager communautaire de 5000 mètres carrés du Plateau Mont-Royal, l'arrondissement le plus densément peuplé de Montréal, des jardiniers urbains enthousiastes cultivent chaque été quelque 180 parcelles sur un terrain de la ville.

Pour ce jour tant attendu par plusieurs, le soleil brille et la chaleur estivale fait oublier qu'il neigeait encore il y a deux semaines à peine à Montréal.

Plusieurs ne croyaient plus en cette réouverture, un mois plus tard que d'habitude. «On a eu peur qu'il n'y ait pas de jardin», alors que «le thème de l'autonomie alimentaire» est dans l'air, confie Christine Lamothe, une quinquagénaire arrivée sur place avec ses semences.

«Les jardins ont été fermés par la ville il y a deux mois et ça a fait un tollé partout», note Stéphane Espinosa, président du comité de ce jardin, qui souligne que la même mesure a été prise «dans l'ensemble du Canada».

C'est qu'au début de la pandémie mi-mars, ces jardins «n'étaient pas considérés comme un service essentiel», malgré leur «vertu nourricière, mais aussi psychologique», explique ce Marseillais d'origine.

Mais après moult pressions et pétitions, ils l'ont finalement été, se réjouit Stéphane, installé depuis «quinze hivers» au Québec.

«Pour de nombreuses personnes, les jardins communautaires sont plus qu'un loisir. Ils leur permettent de subvenir à leurs besoins et d'avoir accès à des produits frais à peu de coûts», a convenu Valérie Plante, maire de Montréal.

Pour les 97 jardins existant à Montréal depuis 45 ans, des «règles sécuritaires et sanitaires» ont forcément suivi, souligne Stéphane Espinosa.

La principale limite le nombre de personnes sur place à 35 en tout temps, alors que les autres années jusqu'à 400 personnes, en comptant les membres et leurs familles, pouvaient s'y retrouver.

Toutes doivent respecter la distanciation physique et le port d'un masque et de gants de jardinage est conseillé. Elles doivent aussi se laver les mains en entrant dans le jardin clôturé, désinfecter le cadenas et le robinet.

Pour limiter l'affluence, «jusqu'au 1er juin, on peut juste venir (...) un jour sur deux», précise Christine Lamothe.

«Le plus gros changement, c'est de ne pas avoir accès à nos outils, qui sont normalement partagés entre tout le monde. Il faut apporter nos trucs de la maison», ajoute Yan Poudrier.

«Habituellement, on venait en famille, donc moi et mes trois enfants. Malheureusement là cette année, avec les restrictions du nombre d'individus, c'est difficile de venir avec les trois», regrette ce père de 39 ans.

Mais tous sont impatients de semer ou de mettre en terre les légumes qu'ils ont fait pousser dans leur logement pendant l'hiver. Le jardin est devenu «plus un lieu de culture et moins de socialisation», note Christine.

«Moi, je suis prêt à commencer à planter au plus» vite, dit Stéphane Espinosa, qui «calcule tout au centimètre près pour pouvoir en mettre le plus possible».

Le jardinage, selon lui, «est devenu quelque chose de très important pour les gens cette année en cette période de pandémie, parce qu'ils sont arrivés à retrouver leurs racines, à retrouver des gestes d'antan, à retrouver des liens avec les grands-parents».