Algérie: Anis Rahmani, PDG du principal groupe de média privé, écroué

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Anis Rahmani. Archives

Le puissant propriétaire et PDG du plus important groupe de médias privé algérien Ennahar, Anis Rahmani, personnalité longtemps proche du clan du président déchu Abdelaziz Bouteflika, a été placé vendredi en détention provisoire, a annoncé Ennahar TV.

Rahmani, journaliste de 49 ans, a été arrêté et placé en garde à vue mercredi dans le cadre d’une enquête le visant pour des faits de corruption, avait indiqué une source sécuritaire à l’AFP.

« Le juge d’instruction (… ) a ordonné le placement de notre collègue et directeur Anis Rahmani en détention provisoire », a indiqué la chaîne du groupe Ennahar, sans préciser les chefs d’inculpation retenus.

Selon l’agence de presse officielle APS, citant le Parquet d’Alger, M. Rahmani, de son véritable nom Mohamed Mokadem, est poursuivi dans une affaire d’« acquisition d’avantages indus » et de « détention de comptes bancaires à l’étranger ».

Personnage controversé, Rahmani a longtemps été considéré comme entretenant de nombreux liens au sein de l’appareil politique et sécuritaire en Algérie, particulièrement avec le clan entourant Abdelaziz Bouteflika.

Il est accusé d’avoir mis son groupe médiatique au service de M. Bouteflika, jusqu’à la démission le 2 avril 2019 de ce dernier, acculé au départ par un mouvement populaire de contestation.

Fondée en 2012, Ennahar TV, chaîne d’information en continu, est largement perçue en Algérie comme un média « officieux » des autorités.

Rahmani semble être une nouvelle victime de la vaste campagne anticorruption lancée après la démission de Bouteflika et perçue par des observateurs comme offrant le double avantage de satisfaire la contestation en lui offrant des « têtes », tout en réglant des comptes au sein des clans s’affrontant au sein du régime.

Cette campagne a déjà conduit en prison des dirigeants politiques –dont d’anciens ministres et Premiers ministres — et de riches hommes d’affaires.

En décembre, deux anciens Premiers ministres de Bouteflika, Ahmed Ouyahia et Abdelmalek Sellal, ont écopé de 15 et 12 ans de prison pour diverses malversations liés à des marchés publics dans un premier dossier. Plusieurs ministres ont été également été condamnés.

Symbole des liens troubles unissant pouvoir et « oligarques » sous la présidence Bouteflika, Ali Haddad, ex-président du Forum des chefs d’entreprises (FCE), principale organisation patronale en Algérie, a été condamné à 7 ans de prison dans ce même dossier, et reste lui aussi inculpé dans d’autres affaires.

Jeudi soir, deux très importants hommes d’affaires, les frères Mohamed Laïd et Mohamed El Hadi, dirigeants du groupe agro-alimentaire Benamor, ont également été écroués par un juge d’instruction, selon plusieurs titres de la presse algérienne.

Leur frère Samy a été remis en liberté, selon le site d’information TSA (Tout sur l’Algérie).

Fondé par leur défunt père Amor Benamor en 1984, à la faveur d’une timide ouverture économique en Algérie, le groupe est devenu l’un des leaders du marché de la semoule, des pâtes alimentaires et des conserves en Algérie, avec un chiffre d’affaires annuel d’environ 80 millions de dollars, selon le magazine Forbes.

Cité par Forbes en 2018 comme l’un des cinq principaux multi-millionnaires algériens, Mohamed Laid Benamor, fut en outre, entre 2014 et sa démission début 2019, le vice-président du FCE dirigé par Haddad. Et son nom était régulièrement cité, au côté de celui de Haddad notamment, parmi les principaux financiers des campagnes de Bouteflika.

Selon la presse, les frères Benamor sont inculpés de divers chefs, notamment de « dilapidation de deniers publics », « obtention d’avantages indus », dans le cadre d’une enquête sur la privatisation partielle au bénéfice du groupe Benamor de minoteries publiques en 2013.