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De Super Mario Bros à Sonic : pourquoi il n'y a pas vraiment de malédiction des jeux vidéo au cinéma

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Gros cartons au box-office, gros plaisirs coupables, grosses références en nanar : l'histoire des adaptations de jeux vidéo n'a finalement rien de maudit.

La légende parle d'une malédiction des jeux vidéo adaptés au cinéma, de Super Mario Bros. et Double dragon au début des années 90, jusqu'aux récents de Warcraft, le commencement et Assassin's Creed. Et pour qui regarde la fidélité, l'intelligence, le respect et la beauté, il y a effectivement matière à cauchemar.

Mais peut-on véritablement parler de malédiction quand parmi ces dizaines d'adaptations hollywoodiennes, il y a beaucoup de succès au box-office et donc de suites, quantité de plaisirs coupables, une petite poignée de réussites, et même quelques prétendants au panthéon des meilleurs nanars du cinéma ? Si la machine des adaptations tourne encore, c'est parce qu'elle fonctionne, d'une manière ou d'une autre. Avec près de 30 ans de films adaptés de jeux vidéo, une question : et s'il n'y avait aucune malédiction ?

Alors que Sonic, le film est en salles (notre critique par ici), voici quelques raisons de remettre tout ça en perspective.

 

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Autant Mario que De Niro dans Brazil

 

BEAUCOUP D'ARGENT

Premier critère : le succès financier. Et en presque trois décennies et une quarantaine de films, il y a en a eu des dollars dépensés et encaissés. Il aura fallu que Super Mario Bros. (budget d'environ 50 millions, et environ 20 au box-office) et Double dragon (8 millions de budget et même pas 3 au box-office) se vautrent en 1993 et 1994, pour que ça commence à frétiller dans les portes-feuilles des studios en 1995.

D'abord avec Street Fighter avec Jean-Claude Van Damme, et surtout Mortal Kombat de Paul W.S. Anderson. Avec plus de 122 millions récoltés en salles pour un budget de 18, c'est un succès. Et peu importe si Mortal Kombat : Destruction finale fera deux fois moins en 1997 : les portes ont été ouvertes en grand.

Peu importe aussi si quantité d'adaptations se sont ramassées au box-office, de manière plus ou moins spectaculaire. Wing Commander, House of the Dead, Doom, DOA : Dead or Alive, Far Cry, Postal, Tekken ont certes été des bides, mais à peu près tout le monde les a oubliés dans la masse de pognon récoltée par les succès du genre.

 

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Trois bouts de plastique et hop, un Goro

 

En six films et 15 ans, la saga Resident Evil a récolté plus de 1,2 milliard, pour un coût total hors marketing inférieur à 300 millions (le plus gros budget reste Resident Evil : Retribution avec 65 millions). La série avec Milla Jovovich a ses fans et détracteurs, mais elle reste un modèle du genre, dont la popularité a faibli côté américain tout en se solidifiant à l'international et notamment en Asie.

Lara Croft : Tomb Raider a engrangé près de 275 millions, pour un budget officiel de 115. Le premier Hitman a passé la barre des 100 millions avec un budget réduit (25 millions). Need for Speed n'a marqué personne, mais a pourtant cumulé plus de 200 millions au box-office, pour un budget de 60 millions. Même Max Payne s'en est sorti, avec plus de 85 millions pour un budget de 35.

Pas mal de suites ont été des échecs plus ou moins énormes, notamment Lara Croft : Tomb Raider - Le Berceau de la vie, Silent Hill : Revelation 3D, Hitman: Agent 47, ou Angry Birds : Copains comme cochons, restés très loin des premiers épisodes. Et les tentatives de pur blockbuster ont été peu convaincantes : Prince of Persia, les sables du tempsWarcraft, le commencement, Rampage - Hors de contrôle ou encore Assassin's Creed ont tous eu du mal à être à la hauteur de leurs budgets de 150-200 millions, gonflés par des frais marketing énormes. C'est sûrement pour ça que Tomb Raider 2018 a coûté moins cher.

La formule a donc des limites, et l'histoire des jeux adaptés à Hollywood l'a prouvé. Mais globalement, un jeu vidéo en film, ça peut rapporter gros. Surtout avec tout le merchandising et autres rentrées d'argent autour des marques.

 

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Lara Croft première génération

 

PAS MAL DE FRANCHISES

C'est le signe ultime du succès, et là encore, beaucoup de signaux verts. Lancée en 2002 et terminée en 2017 avec Resident Evil : Chapitre Final, la franchise menée par Paul W.S. Anderson et Milla Jovovich était à peine enterrée qu'un reboot était annoncé par les mêmes producteurs, Constantin Films. James Wan devait être producteur de cette renaissance axée horreur (avant de s'en aller), le réalisateur Johannes Roberts a été engagé (aux dernières nouvelles, il est encore là), et même si le projet est discret depuis, il est bien en préparation.

Et la marque Resident Evil continuera aussi ailleurs, puisque Constantin Films prépare en parallèle une série Netflix encore mystérieuse.

La marque est donc très forte en matière de jeu vidéo. En 2021, Mortal Kombat reviendra dans un tout nouveau film (vraiment produit par James Wan là), tout comme la suite de Tomb Raider, malgré le succès a priori tiède du premier. Un Detective Pikachu 2 est également dans les tuyaux.

 

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Comment Terminatorer ta carrière en un film

 

Même les pires navets du genre ont donné naissance à des suites. Alone in the Dark d'Uwe Boll a beau être considéré comme une infamie à peine amusante, qui a été un échec à sa sortie, il y a eu Alone in the Dark 2 en 2008. Cette petite horreur proche du reboot (Rick Yune reprend le rôle de Carnby après Christian Slater), mais bien produite par Boll, est sortie directement en DVD, ce qui rappelle que le marché vidéo est central dans cette galaxie de nanars.

Pour rester dans l'univers magique d'Uwe Boll, le cas BloodRayne est similaire. Ce navet à 25 millions avec Kristanna LokenMichelle Rodriguez, Udo Kier ou encore Ben Kingsley, a été un four en salles (même pas 4 millions au box-office), en plus d'avoir immédiatement gagné sa place dans le cimetière du cinéma respectable. Mais il y a bien eu BloodRayne 2 : Deliverance dans la foulée, et même BloodRayne 3 : The Third Reich. Même chose pour House of the Dead 2. Là encore, aucun n'était destiné aux salles obscures, mais de toute évidence, le cinéma déviant puise dans les jeux vidéo beaucoup de matière. À noter que Postal, toujours d'Uwe Boll, a failli avoir droit à une suite en vidéo, finalement annulée.

Le destin DTV est à la fois le signe d'une certaine mort et un aveu d'échec, mais également l'évidence d'une (sur)vie qui a du sens, et d'un public réel. C'est parfois la base même du projet : le film Dead Rising : Watchtower n'a jamais été pensé pour le cinéma, mais l'existence de la suite Dead Rising : Endgame prouve bien que Legendary Pictures avait vu juste. Même chose pour Street Fighter, Tekken, Halo, tous passés par la case vidéo, comme encore récemment Doom : Annihilation. Et l'animation ne démérite pas, avec Final Fantasy, Pokemon, Mass Effect, Dead Space ou encore Resident Evil.

 

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Dead Rising pour les soldes au rayon DTV

 

UN PEU DE GLOIRE

Il y a moins d'exemples, mais ils sont là. Le plus évident est Silent Hill de Christophe Gans, sorti en 2006. Au box-office, c'est tiède (à peine 100 millions, pour un budget de 50), mais le film reste parmi les plus respectés du genre. Il y a bien sûr matière à discussion, notamment sur le personnage masculin forcé (imposé par les producteurs) ou l'aspect horrifique un peu faible. Mais le respect et le cinéma sont là, ce qui en fait un film majeur. Encore plus vu la tronche de la suite, Silent Hill : Revelation 3D.

Et Silent Hill n'est pas le seul. Warcraft de Duncan Jones a beau avoir eu une carrière complexe en salles (un score minable au box-office domestique, un carton monumental en Chine), il est considéré comme une réussite par bien des fans. Le point commun : de vrais réalisateurs à la barre. 

Plus récemment, c'est Pokémon : Détective Pikachu qui a surpris bien du monde. Le film de Rob Letterman (Monstres contre aliens, Chair de Poule) a vite séduit avec ses premières images, qui ont pu intriguer les plus sceptiques. Et le résultat a convaincu beaucoup de spectateurs, fans ou moins fans des jeux vidéo.

 

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Quand tu évites de peu la colère des fans

 

UN MAX DE PLAISIR (COUPABLE)

Qui osera dire qu'il n'y a aucun plaisir potentiellement déviant et coupable à consommer certains films tellement mauvais, ratés, absurdes, grotesques, extrêmes, simplets, qu'ils en deviennent presque des cas d'étude ?

Super Mario Bros. avec ses Goombas en imperméables, le rire de Christophe Lambert en Raiden dans Mortal Kombat, Tara Reid en scientifique-Aline Cedrac dans Alone in the Dark, Lara Croft contre un robot ou un requin, le mode FPS de Doom, la rencontre entre Freddie Prinze Jr. et Tchéky Karyo ("Au revoir, mes amis") dans Wing Commander, Milla Jovovich et ses clones ou dans n'importe quelle situation des films Resident Evil, les effets de style type mauvais porno de DOA : Dead or Alive, Michael Fassbender qui joue dans Assassin's Creed comme si c'était du Shakespeare avec Marion Cotillard... il y en a pour tous les goûts.

 

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De l'eau et du lol

 

Car dans déshonneur, il y a honneur, et il y a bien des degrés de terreur cinématographique et vidéoludique dans cette famille. Au niveau le plus bas, Super Mario Bros. reste un sommet pour tout amateur de nanar cosmique. Et Uwe Boll a apporté non pas quelques pierres, mais un paquet de parpaings à cet édifice.

Au niveau supérieur, Mortal Kombat reçoit encore beaucoup d'amour, et le monde va tellement bien qu'il est quasi devenu une référence en la matière. Les friands de spectacles bourrins et bêtes ont de quoi s'amuser avec Hitman, Hitman: Agent 47, Doom, le récent Rampage, et bien sûr la saga Resident Evil qui mérite à elle seule une soirée entre dégénérés. Des zombies aux dragons, en passant par les clones et expériences les plus improbables, tout est là. Comme un cadavre touché par le Virus-T, la sympathique petite série B a muté pour devenir un monstre au-delà de tout bon sens - en partie en restant fidèle à pas mal des jeux, eux aussi passés du côté obscur.

 

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Porno ou film d'Uwe Boll ?

 

À moins de considérer que la seule malédiction est celle des talents gâchés et espoirs brisés, le jeu vidéo recyclé à Hollywood a donc donné bien trop de succès, de franchises, de plaisir et de gloire, pour être une malédiction - terme qui convient bien mieux au film Uncharted qui a perdu six réalisateurs.

Alors que des adaptations de Gears of War, Metal Gear Solid, Call of Duty, Tetris, Mega Man, Mario sont développés, que Minecraft arrivera en 2022, et que Christophe Gans a annoncé un nouveau Silent Hill et un Project Zero, l'histoire n'est en tout cas pas terminée. Pour le meilleur, et pour le rire.

 

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La fierté d'avoir essayé