Procès pour fraude: pour honorer les volontés de sa mère

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TROIS-RIVIÈRES — Guylaine Mongrain, cette femme de 53 ans de Trois-Rivières accusée d’avoir volé et fraudé sa mère souffrant d’Alzheimer pour plus de 173 000 $, a pu se faire entendre jeudi dans le cadre de son procès, qui a repris au palais de justice de Trois-Rivières. La dame, qui avait une procuration pour s’occuper des affaires financières de sa mère, plaide qu’elle a toujours agi de bonne foi et selon les volontés exprimées par sa mère, des volontés qui n’auraient pas été divulguées au reste de la famille.

Rappelons que Mme Mongrain fait face à la justice en lien avec plusieurs virements bancaires qui ont été mis au jour par des membres de sa famille, dont son frère qui partageait lui aussi une procuration pour s’occuper de sa mère de 81 ans. De ces montants, la poursuite s’intéresse plus particulièrement à d’importants virements, dont un de 85 000$ et un autre de 41 200 $, ce dernier ayant servi à payer une mise de fonds sur une maison que Mme Mongrain venait de s’acheter.

Guylaine Mongrain, représentée par Me Maurice Biron, allègue que ce montant lui avait été proposé par sa mère, en guise de cadeau, et que cette dernière aurait insisté pour lui faire ce virement, étant donné qu’elle s’occupait bien de ses affaires.

En effet, Mme Mongrain a relaté au tribunal toutes les responsabilités qui lui incombaient relativement aux nombreux achats qu’elle faisait pour sa mère, allant de l’épicerie aux vêtements en passant par la pharmacie et le nécessaire pour qu’elle puisse demeurer à la maison, ce qui était le souhait de l’octogénaire. Des dépenses qu’elle se faisait ensuite rembourser par des virements bancaires effectués avec des factures à l’appui au comptoir de sa banque.

Lors de la visite à la banque afin de procéder au transfert bancaire de 41 200$, la mère de Mme Mongrain lui aurait exprimé: «ceci, c’est entre toi et moi». Guylaine Mongrain souligne ne pas en avoir parlé au reste de la famille étant donné qu’elle voulait respecter le souhait de sa mère de ne pas vouloir faire connaître cet important don. En ce qui concerne le virement de 85 000$, l’accusée a témoigné qu’il s’agissait d’un montant qui avait été transféré du compte de sa mère dans le but d’honorer un héritage reçu d’une tante et qui revenait à Mme Mongrain. Sa mère, étant l’exécutrice testamentaire de cette tante, aurait confié à Mme Mongrain aussi tôt que 2012, qu’elle souhaitait que l’héritage lui revienne, étant donné que l’accusée avait agi comme tutrice pour cette dame âgée et qu’elle en avait bien pris soin durant les dernières années de sa vie. Le transfert avait alors été effectué du compte de sa mère puisque, selon les explications de Mme Mongrain, ce n’était qu’une question de temps avant que la succession de cette tante ne soit réglée et que sa mère retrouve le montant d’argent qui avait été versé à l’accusée.

Dans le contre-interrogatoire mené par le procureur Me Julien Beauchamp-Laliberté, l’accusée a toutefois été confrontée non seulement sur les dépenses qu’elle aurait faites pour sa mère, mais également sur son rythme de vie à elle, au moment de ces importants virements.

Il a notamment été établi que le 7 juin 2017, lors du virement de 85 000 $ effectué à son compte, Mme Mongrain aurait également fait un retrait de 9500$ le jour même. Lorsque questionnée sur l’utilisation de cet argent, Guylaine Mongrain s’est impatientée en signifiant qu’elle jugeait la question du procureur non pertinente, avant de préciser que le montant avait servi à des rénovations dans la nouvelle maison qu’elle venait d’acheter et qui contenait, soutient-elle, d’importants vices cachés.

Guylaine Mongrain a reconnu qu’au moment des rendez-vous à la banque pour faire approuver les virements, elle n’avait pas informé le personnel des avis médicaux voulant que sa mère souffre d’Alzheimer puisque ces avis médicaux faisaient référence, explique-t-elle, à un trouble langagier qui la rendait inapte à s’occuper de ses finances, mais qui n’altérait pas ses capacités cognitives à ce moment.

Me Beauchamp-Laliberté a établi au tribunal, à travers ses questions, que durant les derniers mois avant que le frère de Mme Mongrain constate les importants retraits au compte de sa mère et ne porte plainte à la police, Mme Mongrain était en arrêt de travail pour épuisement professionnel et ne percevait des revenus que de 1300 $ aux deux semaines.

Or, ses obligations financières contractées avec l’achat de la nouvelle maison, le prêt-auto et les dépenses quotidiennes auraient pu la placer dans une situation financière inconfortable. Il a par ailleurs été établi qu’en mars 2017, Guylaine Mongrain est allée suivre une thérapie fermée de 21 jours, thérapie qu’elle a complétée sans qu’on lui reconnaisse toutefois une dépendance à l’alcool.

À plusieurs reprises, le procureur a manifesté son objection à ce que l’accusée relate les paroles de sa mère ou des paroles de tierces personnes relatées par sa mère, étant donné que la dame de 81 ans a aujourd’hui une impossibilité cognitive à venir témoigner. Or, puisque la théorie de la défense s’appuie en partie sur les volontés exprimées par la mère de l’accusée, le juge Pierre Lortie a signifié qu’il garderait cette objection sous réserve et l’évaluerait au moment de délibérer.

Les plaidoiries des deux parties se tiendront vendredi.