Rébecca Dautremer et le cri discordant de la licorne
La dessinatrice illustre un bestiaire venu du Moyen Âge. Au programme, dragons, phénix et cigogne. Notre coup de cœur jeunesse de la semaine.
by Sophie PujasAvec Midi pile, paru à l'automne dernier, Rébecca Dautremer a signé l'un des bijoux jeunesse de l'année écoulé. Cette histoire d'une petite lapine cheminant vers un rendez-vous amoureux, raconté grâce à de somptueux découpages, a d'ailleurs été couronnée comme pépite du livre illustré au Salon du livre et de la presse jeunesse de Montreuil. Mais voilà : le succès a été tel que les 15 000 exemplaires du tirage initial ont été vendus. Délai de réimpression oblige, il ne sera pas disponible avant la rentrée 2021 !
Mais consolez-vous : une autre petite merveille illustrée par Rébecca Dautremer vient de paraître. Le Livre du trésor propose des extraits de ce livre médiéval signé Brunetto Latini, un philosophe florentin du XIIIe siècle. L'album propose en vis-à-vis des fragments de son bestiaire et les dessins de Dautremer. Et soudain, voici le merveilleux médiéval à hauteur d'enfant. Au fil des pages surgissent le serpent à deux têtes, le phénix, le caméléon, la cigogne ou le loup. On fait connaissance avec la lucrote, qui est « grande comme un âne, a la croupe d'un cerf, la poitrine et les pattes du lion, une tête de cheval, les pieds d'un œuf, une fendue jusqu'aux oreilles, et les dents qui sont fermés d'un seul os ». On apprendra également que même l'éléphant ne peut survivre à « l'étreinte de la queue d'un dragon », ou que certaines fourmis ont la taille de petits chiens. Mais aussi que la licorne possède une voix épouvantable, la pauvre. Merveilles et animaux familiers se côtoient dans ce bestiaire, puisqu'aux yeux de l'homme médiéval leur réalité était la même. Un superbe album en forme de cabinet de curiosités, porte ouverte vers un imaginaire disparu, propice au rêve.
Le Livre du trésor, Brunetto Latini, traduit par Gabriel Bianciotto, illustré par Rébecca Dautremer, Grasset, 32 p., 19,90 euros.