Municipales à Paris : ce que l'on sait du retrait de la candidature de Benjamin Griveaux

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Le candidat LREM l'a annoncé vendredi, dans une déclaration enregistrée. En cause, la diffusion sur internet de vidéos et d'échanges à caractère sexuel.

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L'ex-candidat LREM à la mairie de Paris lors de la présentation de son programme, à Paris, le 13 février 2020.  (JACQUES WITT / SIPA)

C'est un séisme dans la vie politique française. L'ancien porte-parole du gouvernement Benjamin Griveaux a annoncé vendredi 14 février le retrait de sa candidature à la mairie de Paris, dans une déclaration enregistrée. En cause, la diffusion sur internet de vidéos et d'échanges à caractère sexuel attribués au candidat de la majorité LREM. Voici ce que l'on sait de cette affaire, qui vient semer le trouble dans la campagne des municipales

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Benjamin Griveaux dénonce des "attaques ignobles" 

Visiblement éprouvé, le ton grave, Benjamin Griveaux a effectué une déclaration enregistrée vendredi matin au siège de l'Agence France-Presse, en présence de BFM Paris. "Je connaissais la dureté de la vie politique, depuis plus d'un an nous avons subi des propos diffamatoires, des mensonges, des attaques anonymes, la révélation de conversations privées dérobées et des menaces de mort", a-t-il commencé. "Ce torrent de boue m'a affecté, mais il a surtout fait du mal à ceux que j'aime. Comme si cela n'était pas suffisant hier, un nouveau stade a été franchi : un site internet et des réseaux sociaux ont relayé des attaques ignobles mettant en cause ma vie privée", a-t-il poursuivi, sans confirmer ni démentir la véracité des contenus diffusés sur interne.

"Ma famille ne mérite pas cela, personne ne devrait jamais subir une telle violence. En ce qui me concerne, je ne souhaite pas nous exposer davantage ma famille et moi, quand tous les coups sont désormais permis. Cela va trop loin. C'est pourquoi j'ai décidé de retirer ma candidature à l'élection municipale parisienne", conclut-il. 

Un artiste russe vivant à Paris revendique la diffusion des vidéos

Un site a diffusé mercredi deux vidéos à caractère sexuel et des messages connotés adressés à une femme, affirmant qu'ils émanaient de l'ancien porte-parole du gouvernement. Ils ont été relayés peu à peu jeudi sur les réseaux sociaux.

L'artiste russe Piotr Pavlenski, réfugié en France, a affirmé à Libération être l'auteur de la diffusion de ces contenus. "La façon dont il a obtenu la vidéo n'est pas claire à ce stade", précise le quotidien. Pourquoi l'avoir diffusée ? "C'est quelqu'un qui s'appuie en permanence sur les valeurs familiales, qui dit qu'il veut être le maire des familles et cite toujours en exemple sa femme et ses enfants. Mais il fait tout le contraire. Ça ne me dérange pas que les gens aient la sexualité qu'ils veulent, ils peuvent même baiser des animaux, pas de problème, mais ils doivent être honnêtes. Mais lui veut être le chef de la ville et il ment aux électeurs. Je vis désormais en France, je suis parisien, c'est important pour moi", explique cet artiste activiste, plusieurs fois incarcéré pour diverses actions, notamment contre le régime de Poutine, et pour avoir incendié à Paris les portes de la Banque de France.

L'avocat de Benjamin Griveaux annonce des poursuites

Richard Malka, avocat de Benjamin Griveaux, a annoncé à franceinfo qu'il "poursuivra[it] toutes les publications qui violeront la vie privée" de son client. 

La loi punit le fait de porter atteinte à la vie privée d'autrui. Une sanction alourdie si cette atteinte concerne des paroles ou des images présentant un caractère sexuel prises dans un lieu public ou privé. Les auteurs de la diffusion de ces images encourent deux ans de prison et 60 000 euros d'amende.

Une réunion de crise au siège de campagne du candidat 

Dès le début de la matinée, l'équipe de campagne de Benjamin Griveaux s'est réunie au QG du candidat, à Paris. A la sortie, Marlène Schiappa a fait une courte déclaration : "Ce n'est pas un moment facile de la campagne. Je ne peux m'exprimer sur la succession. Chacun s'exprimera officiellement en temps voulu pour vous dire ce que le collectif décidera." A la question "Vous pouvez encore gagner Paris ?", la secrétaire d'Etat à l'Egalité entre les femmes et les hommes a répondu : "Nous verrons." Selon Le Parisien, le nom de Marlène Schiappa circule parmi les potentiels remplaçants de Benjamin Griveaux dans la course à la mairie de Paris.

Il y aura "quoi qu'il arrive" une liste LREM à Paris, a déclaré pour sa part la députée Olivia Grégoire. "La République en marche ne lâchera pas Paris, nous y croyons très fort. Laissez-nous quelques heures pour nous voir." Selon l'élue, proche de Benjamin Griveaux, le retrait de sa candidature "est la décision d'un homme libre. Personne ne l'a forcé, il l'a prise seul après des heures de réflexion"

Il "a placé le collectif avant sa personne", a confirmé Stanislas Guerini, délégué général de LREM. "Notre responsabilité collective, c'est de continuer à porter ce projet [municipal pour Paris]. Je réunirai les cadres de la campagne parisienne issus de toutes les sensibilités, pour réfléchir collectivement, rapidement, à la meilleure proposition pour continuer à porter notre projet pour Paris."

Le reste de la classe politique apporte son soutien au candidat déchu

La condamnation de la diffusion de ces vidéos par la classe politique est unanime. "J'adresse à Benjamin Griveaux, ainsi qu'à sa famille, mon soutien plein et entier dans cette épreuve. Je prends acte de sa décision difficile. L'attaque indigne qu'il subit est une menace grave pour notre démocratie ", a réagi sur Twitter son désormais ex-rival, Cédric Villani

"Jusqu'où ira-t-on dans la honte et l'abomination ? Ce n'est plus aux chiens qu'on livre les hommes désormais, mais aux rats planqués au fond des pires égouts", a réagi sur Twitter l'ancienne ministre de la Culture socialiste, Aurélie Filippetti. "Peu importe ce qu'on pense de Benjamin Griveaux aujourd'hui, cette histoire est profondément dégueulasse, et inquiétante pour la suite"a renchéri le député européen Raphaël Glucksmann.

La maire PS de Paris Anne Hidalgo, candidate à sa succession, a pour sa part appelé "au respect de la vie privée et des personnes", estimant que "les Parisiennes et les Parisiens méritent un débat digne""Refusons le naufrage voyeuriste de la vie publique du pays", a abondé le chef de file de La France insoumise Jean-Luc Mélenchon.

D'autres pointent tout de même la campagne difficile et semée d'embûches et de couacs de Benjamin Griveaux. "J'imagine que Benjamin Griveaux a aussi retiré sa candidature parce qu'il sentait que sa campagne ne prenait pas, qu'il risquait un très mauvais score"a commenté l'ex-numéro 2 du Rassemblement national, Florian Philippot.