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Mameboye Diao sur les raisons de l'ébullition du front social au Sénégal: «Sur deux ou trois sujets, ous avons failli... »

L’ébullition du front social, avec les marches du mouvement “Nio Lank“, ainsi que certains débats politiques agités par l’opposition, ne seraient que la résultante d’erreurs commises par le régime en place. C’est du moins, en substance, ce qu’a indiqué le Directeur des Domaines, El Hadji Mamadou Diao, dit Mameboye, qui estime que le camp présidentiel a failli sur certains sujets, notamment en ne prenant pas l’initiative de bien communiquer sur les grandes décisions du chef de l’Etat, avant qu’elles ne se retrouvent sur la place publique via d’autres canaux. Dans cet entretien accordé à Sud Communication, le responsable de l’APR à Kolda s’en prend, sans langue de bois, aux responsables qui auraient des ambitions cachées, tout en restant aux côtés du Président Macky Sall. Il est aussi revenu sur certaines questions, notamment la grisaille notée dans les retrouvailles Wade-Macky, sans occulter le silence sur l’amnistie de Karim Wade et Khalifa Sall.

M. Diao, on vous voyait plus dans les débats sur les politiques publiques, notamment le fisc, les impôts… Mais, de plus en plus, vous vous affichez en bouclier du chef de l’Etat. Qu’est ce qui explique ce revirement ?

Il est vrai que j’ai opté pour défendre le président de la République sur des questions qui peuvent intéresser davantage les Sénégalais que sur celles politiciennes. Pour cela, nous avons pensé que la meilleure attitude est celle de l’approche bilancielle. A chaque fois que des réalisations d’envergure ont été faites, il fallait prendre le temps de les expliquer aux populations. Parce qu’ils sont les principaux bénéficiaires de tout ce qui est déroulé en termes de politiques publiques. Cette approche permettait de faire une évaluation pour voir, si éventuellement, on pouvait rectifier. Aussi, les questions économiques m’ont toujours passionné. En effet, la stratégie qui avait été mise en place par le président de la République, à savoir celle des inclusions sociales, avec les marqueurs sociaux qui sont devenus une institution, est entrée dans les mœurs des Sénégalais, avec le rattrapage sur les questions d’équité territoriale.

C’est cette vision que nous avions de l’émergence, qui nous a poussés à préférer ce type de communication. Mais, vous vous rendrez compte, en tant qu’experts, que le talon d’Achille que nous avions, lors du premier mandat, c’était d’avoir laissé le champ libre à l’opposition, qui nous avait imposé un débat politicien qui, le plus souvent, était basé sur les fake-news. Nous avions tardé à prendre en compte ces questions. Mais, je vois qu’il y a une résurgence de toute la stratégie qui avait été mise en place par ces personnes-là, pour nous mettre mal à l’aise, dans le cadre du renouvellement du bail que le Président a, encore une fois, avec les Sénégalais.

Beaucoup de personnes comme moi, pensent qu’à bon droit, il est temps qu’on ne laisse plus le champ aux questions politiques, parce qu’elles alimentent aussi le débat public, à ces personnes-là, soit qui sont encore dans le camp de la majorité présidentielle et qui l’utilisent comme arme de chantage, soit aussi, à ces opposants qui pensent qu’il faut travestir les informations économiques pour en faire des armes politiques. C’est pour cela que nous sommes engagés sur ces questions-là.

Mais, est ce qu’il n’y a pas aujourd’hui des craintes quand on voit les remous au sein de votre parti, avec les sorties de Moustapha Diakhaté, Moustapha Cissé Lô ? Est-ce que ce n’est pas des signes avant-coureurs d’un compagnonnage qui annonce le début de la fin ?

Il faut analyser chaque sortie par rapport à la personne qui en est l’auteur et à son contexte. On ne peut pas analyser la déclaration de Moustapha Diakhaté de la même manière qu’on analysera celle de Moustapha Cissé Lô. Donc, on présumait, c’est pourquoi d’ailleurs, lorsque j’en parlais, j’avais considéré qu’on avait attendu un peu trop tard pour poser tous les actes qu’il fallait pour réprimander de tels agissements. Parce qu’on sentait qu’il y avait une stratégie de pourrissement du fruit de l’intérieur, qui avait été mûri certainement, par Moustapha Diakhaté et ses acolytes, qui peuvent être même à l’intérieur de la majorité présidentielle et qui peuvent avoir des ambitions inavouées pour le moment. Ces ambitions cachées signifient qu’on essaiera de gripper la machine de l’intérieur, de sorte que le Président, qui est le chef d’un parti, peut-être psychologiquement, devra vouloir lâcher les rênes, alors que les Sénégalais l’ont élu pour un mandat de 5 ans.

Ce n’est quand même pas un délit d’avoir des ambitions ?

L’ambition n’est pas un délit. Mais, il faut avoir le courage de ses ambitions. Qu’est-ce que ça coûte à ces personnes, si elles pensent qu’elles peuvent avoir un destin présidentiel, de sortir et de s’affirmer tout de suite. Si elles pensent qu’elles ont l’ancrage qu’il faut au niveau des Sénégalais, surtout en termes d’offres programmatiques, qu’est-ce qui les empêche de sortir de notre mouvance et de se présenter pour aller à la conquête des suffrages des Sénégalais ? En ce moment, nous les considérerons comme des adversaires et nous ferons face. Mais, ce que je considère comme malhonnête, c’est de rester encore une fois près du président de la République, parfois même être membre du Secrétariat exécutif national, et vouloir déstabiliser la machine de l’intérieur. Tout cela, à dessein.

Parce que l’objectif final, c’est de pouvoir peser considérablement dans le choix qui va être fait en direction de 2024. Or, je pense que la position du président de la République, sur cette question, est beaucoup plus adaptée aux préoccupations des Sénégalais. Aujourd’hui, poser la question du mandat, à moins d’un an de sa réélection, poussera les Sénégalais à avoir un comportement différentiel. Soit, on identifiera un dauphin, auquel cas, on pensera que c’est lui le vrai dépositaire du pouvoir et le président de la République sera inutile. Parce que, celui qui estimera être le dauphin, pensera à créer une approche qui lui permet un maillage dans le pays pour avoir le maximum de soutiens.

Donc, l’un dans l’autre, il faut qu’on puisse travailler pendant ces 5 ans. Les Sénégalais ont choisi de réélire le Président Macky Sall sur la base d’un programme. Le 5-3-5, de par la pertinence des différentes actions phares qui sont dedans, nous permet normalement, si nous atteignons 100% de ces objectifs-là, même 80%, de revoir le Sénégal autrement, en 2024. Parce que les questions d’accès à l’énergie, à l’eau, celles de salubrité publique, de villes et bidonvilles, toutes ces questions sont prises en charge tel que le Président les avait présenté aux Sénégalais. Pour moi, la priorité est là. Maintenant, ceux qui ont envie d’investir tout de suite l’arène politique, qu’ils aient le courage de prendre leur destin en main, comme le Président Macky Sall l’a fait, en 2008, quand il a senti qu’il n’avait plus rien à faire avec le Pds.

C’est aussi stratégique de permettre à quelqu’un de se positionner en perspective de 2024, pour que l’APR ou la coalition qui l’accompagne depuis 2012 puisse continuer son œuvre ?

Le positionnement se fait naturellement. Le Président Macky Sall n’est pas un Sénégalais né avec une cuillère en argent dans la bouche. Il a dû gravir tous les échelons au niveau de l’appareil Pds, en commençant déjà par un poste de Conseiller auprès du Président Abdoulaye Wade, après Directeur général, puis ministre dans différents départements, jusqu’à bénéficier la confiance du Président Wade pour être son Premier ministre, après pour diriger la première institution du pays. C’est ce vécu-là, qui lui a donné une envergure pour pouvoir aller à la recherche des suffrages des Sénégalais. Donc, ceux qui pensent qu’ils peuvent succéder à Macky Sall, doivent déjà avoir le même parcours honorable que lui, à défaut, s’en approcher.

Parce que, je pense que chacun des membres du gouvernement ou des collaborateurs du président de la République, a la responsabilité de prouver que le destin du Sénégal, dans la frange qui lui est confiée, a été bien pris en compte. C’est à ce niveau-là qu’on attend ces personnes-là. Si le travail est fait naturellement, c’est le phénomène naturel de la sélection qui viendra. Mais, aujourd’hui, on ne sait pas ce qui va se passer dans les 4 années à venir. On ne peut pas faire de la météo politique et poser des actes qui de plus en plus, s’apparentent à des actes de défiance.

Ce que je déplore, c’est cette attitude sournoise de la plupart des responsables politiques que nous avons, qui n’existent que parce qu’ils ont bénéficié, en amont, d’un décret du président de la République et qui n’ont eu de mandat effectif qu’après ce décret. Donc, ces personnes-là qui doivent leur carrière politique, ou en tout cas leur notoriété d’aujourd’hui à Macky Sall, tardent à lui montrer leur soutien sur des questions politiques. Je suis d’accord que quand on parle de questions aussi pointues que la Pêche, l’Economie, la Santé publique et autres et qu’on ne soit pas instruit, on peut ne pas avoir les éléments de langage pour répondre. On peut concéder qu’ils ne sont pas maîtres de l’art dans ces matières-là.

Mais, sur des questions politiques, quand le Président est agressé par des membres de la mouvance présidentielle, normalement, dès le lendemain, ils doivent recevoir une volée de bois vert du point de vue politique. Parce que, toutes ces personnes qui ont pu bénéficier de mandats électifs ou de décisions nominatives, devraient pouvoir porter ce combat politique. C’est sur cela qu’on pèche aujourd’hui. Nous laissons le Président se battre seul sur des questions politiques. D’ailleurs, si vous suivez l’évolution médiatique, ce sont de plus en plus des soutiens du président de la République, d’un âge moins avancé, qui sont en train d’occuper les médias. Parce que, justement, la frange jeune qui soutient le président de la République s’est réveillée et, est en train d’occuper le terrain politique et médiatique, pour être les «les boucliers du président de la République».

Je félicite tous ces jeunes qui sont dans des structures du parti, mais, qui sont aussi dans la périphérie de ces structures, qui se battent au quotidien pour porter le combat. Aujourd’hui, ce sont ces jeunes-là qui donnent l’exemple à l’élite, alors qu’ils ont été les moins bénéficiaires de tout ce qu’on fait en termes de promotion du personnel civil et politique derrière le Président.

Le front social est en ébullition. “Nio Lank“ n’arrête plus de manifester dans les rues. Qu’est-ce qu’il faut faire pour que les Sénégalais puissent retrouver toute la quiétude nécessaire ?

J’analyse la situation froidement. Sur deux ou trois sujets, nous avons failli. Nous avons failli parce que nous n’avons pas eu la démarche explicative en amont, pour dire aux populations ce qui se passe. Vous vous rappelez de toute la problématique qui est née de la question pétrolière. Parce que, toute la communication qui devrait être faite sur la transparence des contrats, nous a été presque forcée. Alors qu'il revenait aux membres du gouvernement d’anticiper sur des questions aussi importantes et d’informer les Sénégalais sur tout ce qui se faisait en matière d’exploration. Au moins, ça rassure, parce que quand vous donnez l’information, vous donnez un préjugé favorable par rapport aux questions de transparence.

Quand il s’est agi de la question du fer, la même thématique s’est posée. C’est comme si, ce sont les opposants ou la presse en général qui nous informent sur les actions d’envergure qui engagent le destin du Sénégal. Cela crée un soupçon naturel. Pour les questions énergétiques, vous vous rendez compte que l’information est sortie avant que celle officielle nous parvienne, sans pour autant qu’on ait expliqué qu’il y a eu, c’est vrai, un choix fort qui devait être fait. La commission nationale de régulation du secteur de l’énergie avait demandé une hausse qui n’a pas été suivie par les pouvoirs publics. Mais aujourd’hui, elle considère qu’on pouvait trouver un mécanisme de ségrégation positive, pour que les ménages les plus vulnérables continuent de payer moins l’électricité.

Si on avait anticipé sur la communication, si on avait eu l’humilité d’expliquer aux Sénégalais qu’il va y avoir un ajustement tarifaire sur la question de l’électricité, parce que des projets sont en cours sur l’universalisation de l’accès à l’électricité, on aurait eu une autre approche. Mais, quand les Sénégalais se réveillent et que l’information ne vienne pas par le canal où elle doit venir, c’est-à-dire le gouvernement ou la structure concernée qui donne l’information et qui donne la méthode qui a conduit à cette décision, nécessairement ceux qui pensaient gagner en 2019 et qui ont échoué, qui veulent nous imposer un deuxième tour, s’agripperont sur toutes ces questions.

C’est pourquoi, toutes ces questions constituent des bouées de sauvetage à l’opposition qui essaie de se regrouper, d’occuper l’espace politique. Finalement, nous perdons beaucoup d’énergie à reprendre l’initiative, parce que nous avons un retard à combler. Parce qu’ils ont anticipé, eux, sur la démarche, sur la question et sur la stratégie d’occupation de l’espace. Le pouvoir vient difficilement rattraper ce gap. A chaque fois, si vous voyez, vous avez une crise cyclique qui s’estompe entre deux ou trois mois parce que quand on a l’humilité d’expliquer aux Sénégalais et quand on confronte les dires de ces opposants à la réalité, la situation s’estompe.

En matière de transparence et de bonne gouvernance, les rapports se suivent et se ressemblent. Que ce soit ceux de l’Ige, de la Cours des comptes et même de l’Ofnac qui a été créé par le président de la République. Comment expliquez-vous cette sorte d’impunité, alors que le président de la République avait promis aux Sénégalais qu’il ne protégerait personne ?

La première vocation des corps de contrôle est didactique. C’est celle de pouvoir dire à la plupart de ceux qui sont en rapport avec les deniers de l’Etat, voilà le comportement citoyen que vous devez avoir. Donc, les contrôles qui se font, servent plus à réajuster au départ, qu’à sanctionner. Deuxièmement, quand il y a des manquements graves, il faut que la sanction se fasse. Elle doit être prise dans toute sa rigueur, pourvu qu’en amont, tout ce qu’il y a comme procédures contradictoires soit respecté. Parce que, vous voyez que depuis la publication de certains rapports, les concernés réagissent pour dire qu’ils n’ont pas reçu de rapport ou qu’on n’a pas pris en compte leur droit de réponse.

Donc, sous réserve, si toutes les conditions étaient réunies, je suis à l’aise pour dire : «la sanction doit être prise dans toute sa rigueur». Mais, vous vous rendez compte que dans la plupart du temps, on ne prend pas en compte les observations des concernés. Troisièmement, nous oublions qu’à côté, la plupart des infractions peuvent ouvrir à des sanctions pécuniaires. En réalité, la sanction n’est pas que pénale. Elle est parfois pécuniaire. Si vous allez à la Cours des Comptes, vous vous rendrez compte de combien de responsables de ce type d’infractions sont en train de payer. Parce que, justement, le rôle de la Cours des comptes, c’est de veiller à la sauvegarde des deniers de l’Etat. Maintenant, quand les corps de contrôle finissent leur travail et que tout ce qui devait être fait en termes de procédures, a été fait, il revient aux Cours et Tribunaux de jouer leur rôle. Et ça, je ne pense pas qu’il y ait quelqu’un qui les en empêche.

Dans une récente sortie, l’ancien président du groupe parlementaire du Pds, Doudou Wade, a expliqué que les retrouvailles Wade-Macky sont grippées parce que Président Macky Sall n’a pas fait ce qu’il devait faire, à savoir rendre visite au Président Wade. Qu’en dites-vous ?

Si les retrouvailles ont été entamées, c’est parce que le Chef de l’Etat a eu l’humilité de lancer ce processus. Reconnaissons au Président Sall ce premier mérite. Reconnaissons-lui également, d’avoir tenu un discours apaisé sur toutes ces questions. Le Président Sall a toujours appelé au dialogue et il a toujours voulu regrouper le maximum de fils et filles du Sénégal autour de sa personne, pour qu’on aille ensemble sur les combats qui nous importent.
Maintenant, par rapport aux propos de Doudou Wade, je les considère comme des propos à charge. Même si les démarches de décrispation ont été faites sous l’égide du Khalife général des mourides, il y avait beaucoup d’actes hostiles qui ont été posés par le Pds et Abdoulaye Wade et cela peut créer la méfiance. Alors, qu’en réalité, tous les processus de pacification ne devraient pas souffrir de discours agressifs vis-à-vis de l’autre parti. Depuis que le Président Macky Sall a rencontré le Président Wade, vous n’avez pas entendu une seule fois un membre de l’Apr s’attaquer à Abdoulaye Wade ou au Pds. Pourtant, vous avez entendu des membres du Pds poser des actes, agir ou parler de sorte qu’on peut penser qu’ils ne sont pas dans une logique de pacification de l’espace.

Là, vous prônez une démocratie consensuelle à la Amadou Toumany Touré. Voulez-vous que l’opposition reste dans son coin le temps que le dialogue se poursuit?

Notre approche est différente parce que je ne vous ai pas parlé de l’opposition qui occupe de façon sporadique les rues tous les vendredis.


Il n’y a pas que l’opposition dans les rues. Il y a aussi des membres de la société civile

Ce ne sont pas les Sénégalais qui sont dans les rues, c’est l’opposition ? Nous sommes témoins de certains faits de l’histoire politique. En 1988, quand ça chauffait dans ce pays, il n’y avait pas besoin d’être dans un parti politique. Toutes les grosses tensions n’ont pas eu besoin d’une planification. Je ne sais pas comment on peut s’indigner et programmer toutes les deux ou trois semaines son indignation. Ça veut dire que ce n’est qu’une stratégie d’occupation politique. En tout cas, je ne vois pas ces mouvements comme des acteurs de la société civile. Ce sont des opposants qui s’agrippent à toutes les choses. Vous savez très bien que beaucoup d’entre eux militent pour des partis politiques.

Parlons du dialogue national. Est-ce qu’on peut s’attendre à l’application à la lettre des résultats comme ce fut entre Abdou Diouf et Kéba Mbaye pour le Code consensuel de 1992 ? Certains en doutent en évoquant les cas de la CNRI et des assises nationales.

Ils sont en train d’enfoncer une porte déjà ouverte en faisant cette comparaison. C’est le président de la République qui a dit qu’il va appliquer tous les consensus issus de ce dialogue. Le président de la République est constant dans ses choix. Ce que vous appelez dialogue dans le passé ne concernait que des concertations.

Mais il y a eu la CNRI ?

La Cnri est une institution qui a été créée sur instruction et sur décision propre du président de la République, qui lui a donné un cahier des charges. A charge au président de la République d’en tirer la quintessence. Ce sont les Sénégalais qui ont élu le Président Macky Sall. Ils n’ont pas élu la Cnri. Donc, quand une institution a un cahier des charges ou un bon de commande d’une autorité politique, son devoir s’arrête à faire des propositions et à laisser l’autorité politique le pouvoir de décider.

La CNRI a pourtant respecté le cahier des charges et a reçu quelques 700 millions de francs CFA qui sont passés par pertes et profits ?

Ce ne sont pas 800 millions qui ont été utilisés par pertes et profits. Il y a eu deux recommandations faites par la Cnri qui ont été utilisées. Maintenant, c’est comme je le dis, les concertations qui ont abouti au code électoral consensuel sont le fruit de concertations qui ont abouti en amont. Tous les partis politiques concernés étaient d’accord sur le schéma qui avait été mis en place. Les assises nationales ne sont pas une concertation nationale, parce qu’à ce moment-là, les assises nationales regroupaient la minorité qui était en train de s’opposer au régime de Abdoulaye Wade, qui était vainqueur de l’élection présidentielle.

Macky Sall a pourtant signé la Charte des assises.

Oui, il l’avait signée, sous réserve d’ailleurs, et il l’a dit, il n’avait pas obligation d’appliquer les recommandations. Les assises nationales ont posé beaucoup de questions. On ne va pas revenir sur le contenu des assises nationales. Mais, je dis que les assises nationales ne sont pas concernées par la majorité présidentielle qui était au pouvoir, à ce moment-là. De la même manière, la Cnri ne concernait qu’une commande issue d’un président de la République. Donc, ne pouvaient pas concerner tous les Sénégalais. La seule assemblée qui peut décider, aujourd’hui, pour le compte de tous les Sénégalais, parque tous les Sénégalais y participent, c’est le dialogue.

Pourtant dans ce dialogue aussi, le principal parti de l’opposition, le PDS, n’y participe pas...

Il y a deux franges dans le dialogue. Sur les questions politiques, tout le monde y participe. Il n’y a aucun parti au Sénégal qui n’y participe pas, sur les questions électorales. Maintenant, le dialogue national prend en compte différents sujets. Mais l’un dans l’autre, ce qui est important, c’est qu’on ait des consensus forts sur les questions électorales et politiques et qu’on ait aussi certains grands consensus sur les questions de gouvernance publique, qui peuvent nous conduire.

Le président de la République, dans un entretien qu’il avait accordé à nos confrères de France 24, avait évoqué une possibilité d’apaisement de l’espace politique sénégalais, en parlant même de possibilité d’amnistie pour Karim Wade et Khalifa Sall. Est-ce qu’on peut s’attendre à ce que ça se réalise ?

Les actes qui ont été faits en direction de Khalifa Sall peuvent être analysés comme des actes de pacification de l’espace politique. Maintenant, il faut que les autres saisissent la balle au rebond. Vous savez, dans un conflit, il faut que chacune des parties apprenne à avancer vers l’autre. Aujourd’hui, c’est le président de la République qui pose des actes. Mais, les autres ne suivent pas. C’est dommage !

Pour le cas spécifique de Khalifa Sall, je loue la démarche. Au moins, ils sont en train de participer au dialogue. Au moins, il y en a qui ont la volonté d’essayer de trouver des consensus forts. Ça ne présage en rien d’une alliance future ou d’une compétition future. Mais, au moins, quand le destin du Sénégal est en jeu, quel que soit la position qu’on occupe dans l’échiquier politique, on doit pouvoir avoir l’humilité de s’asseoir autour d’une table, de ne pas penser qu’on est le seul sachant ou le seul à même de disposer de solutions. Dans un processus de décrispation, les signaux qui sont émis par une des parties doivent être pris en compte par l’autre.

Quid de Karim Wade qui est considéré comme étant en exil ?

Karim Wade est déjà libre. Ça aussi, le mérite revient au Président Macky Sall. Mais, il a été menacé de contrainte par corps si jamais il revenait au Sénégal. C’est pourquoi je dis que des questions comme ça, méritent que les Sénégalais discutent entre eux. Parce qu’aujourd’hui, ce qui pouvait être considéré comme une contrainte politique, c’est le fait que Karim Wade ne puisse pas disposer de la liberté d’aller et venir. Maintenant, qu’il dispose de cette liberté, il y a une contrainte dans le jugement qui le concerne. Ce sont les questions pécuniaires. Donc, les questions qui sont relatives aux intérêts du Trésor public sénégalais sont en suspens. Donc, certainement, ce sont des questions qui peuvent être débattues entre les différentes franges de la vie sociopolitique pour qu’on trouve des solutions. Mais, il ne revient pas seulement au Président Macky Sall de pouvoir décider de questions de si grande importance. Si des questions comme ça sont importantes, dans le cadre de décrispation, le lieu indiqué pour en parler, est le dialogue.





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