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LA PRESSE CANADIENNE

La réconciliation a ses limites

ÉDITORIAL / Depuis qu’il a été élu pour la première fois comme premier ministre, en 2015, Justin Trudeau tente de mettre en œuvre une politique de réconciliation avec les Premières Nations. Il y a bien eu quelques rapprochements, quelques mains tendues, quelques succès même. Mais le blocus des chemins de fer en solidarité avec la nation Wet’suwet’en est en train de faire perdre la face au gouvernement Trudeau qui agit avec un peu trop de nonchalance dans ce dossier aux allures de crise.

Les services ferroviaires un peu partout à travers le pays sont considérablement perturbés depuis quelques jours, alors que des communautés autochtones démontrent leur soutien aux opposants au projet de gazoduc Coastal GasLink qui doit traverser le territoire ancestral de la Première Nation Wet’suwet’en, dans le nord-ouest de la Colombie-Britannique. La semaine dernière, des voies ferrées ont été occupées lorsque la GRC a exécuté une injonction prononcée par le tribunal contre les chefs héréditaires de Wet’suwet’en et leurs partisans, qui bloquent la construction du gazoduc.

Le problème a depuis pris de l’ampleur. Jeudi, le CN annonçait même la fermeture progressive de son réseau dans l’est du Canada. Un tel geste risque d’avoir des impacts considérables sur la livraison de produits à travers le pays et, dans certains cas, cela pourrait menacer la sécurité ou la santé publique. Pensons aux chargements de chlore destiné aux installations de traitement d’eau potable.

Tout ce que le gouvernement fédéral a trouvé de bon à faire, depuis le début de cette crise, c’est de demander aux opposants de respecter les lois canadiennes. C’est tout à fait poli et courtois. Mais dans les circonstances actuelles, il ne faut pas que demander de respecter les lois. Il faut intervenir pour qu’elles le soient.

Quelque louable que soit la cause défendue par la Première Nation Wet’suwet’en et par les citoyens ou associations qui l’appuient, il importe d’assurer la circulation fluide et sécuritaire de produits, de marchandises et de passagers à travers le pays. Des entreprises exportant vers les États-Unis par train ne sont pas en mesure de livrer leurs commandes dans les délais prévus. Les impacts sont majeurs.

Via Rail a même dû annuler le service de trains de passagers dans les corridors Montréal-Toronto et Ottawa-Toronto, à cause d’une occupation des voies à Belleville, en Ontario. Dans la région de Montréal, un tronçon du train de banlieue ne pouvait pas être desservi en raison de l’occupation des voies à Kahnawake.

Trop occupé à faire un travail de relations publiques en Afrique pour l’obtention d’un siège temporaire au Conseil de sécurité de l’ONU, Justin Trudeau semble faire fi de la situation préoccupante qui prévaut au pays. Cela envoie certainement un mauvais message aux Premières Nations elles-mêmes, qui n’en sont pas à leur première déception avec le gouvernement libéral en place.

Au-delà du fait que la contestation des chefs héréditaires de la Première Nation Wet’suwet’en révèle d’abord un problème de gouvernance interne, l’opposition au projet de pipeline prend des proportions démesurées. Les blocus ne profitent à personne, pas même à ceux qui défendent la cause antipipeline. Quand des travailleurs ou des voyageurs se retrouvent ainsi pris en otage, cela se répercute évidemment dans l’opinion publique.

L’ouverture de discussions avec les représentants des Premières Nations et des opposants est un premier pas timide mais nécessaire. Le gouvernement fédéral doit toutefois agir avec un peu plus de fermeté.