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Entre théâtre et lectures, cinq membres de l’AJAR cherchent la définition de l’amour.© AJAR
Scène

L’amour selon l’AJAR

En ce jour de Saint-Valentin, le collectif d’autrices et d’auteurs romands présente «Amours collectives». Une performance qui explore la définition, complexe, de ce sentiment universel, en s’inspirant d’un questionnaire soumis au public

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Dans la catégorie des concepts impossibles à décrire, on trouve l’onde gravitationnelle, le bitcoin… et l’amour. Car on a beau l’avoir érigé en but, être quotidiennement inondés par des films romantiques et des tubes mielleux, notre vision de ce noble sentiment reste floue, mouvante, façonnée par nos expériences. Quels multiples visages l’amour peut-il prendre? C’est ce qu’a souhaité explorer le collectif d’auteurs et autrices romands l’AJAR, dans une performance théâtrale mêlant témoignages, lectures… et livrée juste à temps pour la Saint-Valentin, sur les planches du Théâtre 2.21 à Lausanne.

Amours collectives porte bien son nom. Car le cœur du projet n’est autre qu’un questionnaire, envoyé l’an dernier au grand public – comme une bouteille à la mer. Initialement destinée à alimenter une œuvre littéraire sur le thème du polyamour, l’enquête interroge notre rapport au romantisme, au sexe ou à la famille. Avec des questions comme «quelle est votre définition de l’amour?», «est-ce que la romance nécessite une sexualité?» ou encore «comment définir une relation importante à vos yeux?».

Vastes introspections qu’ont menées 130 anonymes… et les résultats réservent quelques surprises. «Il y a une femme d’une septantaine d’années qui nous raconte sa vie entre son mari et son amant. Celui pour qui «la sexualité est un rempart contre la folie et l’autodestruction» ou cette autre personne qui a juste écrit «Un jour, j’ai volé des Mon Chéri chez Leclerc», s’amuse Noémi Schaub, membre de l’AJAR.

A la mode de Platon

Une matière riche et colorée – que le collectif n’a pas pu résister à exploiter. De ces kaléidoscopes amoureux est donc née une performance, entre lectures et théâtre. «L’idée était de refléter la diversité des réflexions et le fait que tout le monde, peu importe le milieu social, rame avec ces notions-là. Un peu à la façon du Banquet de Platon!» précise Noémi Schaub.

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Cinq membres de l’AJAR se sont approprié deux citations extraites du questionnaire, les ont décortiquées, pour en tirer une lettre ainsi qu’une fiction, présentées sur scène dans un jeu de lumières. Des textes humoristiques, introspectifs ou contemplatifs, denses et rythmés, qui font écho à leurs propres expériences ou en prennent le contre-pied.

«Coucher» ou «faire l’amour»

Un flirt entre intime et universel, chacun pouvant se reconnaître dans une de ces bribes de vie sentimentale. Qui, parfois, résonnent entre elles. «Une majorité des répondants ne croit pas en la binarité du genre et considère que «coucher» et «faire l’amour» sont deux choses différentes», note Noémi Schaub. La notion de normes sociales revient aussi régulièrement dans les témoignages. «Une personne nous a confié souffrir de l’étiquette de «fille bien». Quelqu’un d’autre, se qualifiant d’anticonformiste, disait avoir de la peine à assumer son couple hétérosexuel, marié, avec les enfants, la voiture.»

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A défaut d’une définition de l’amour, qui restera savoureux et nébuleux comme une barbe à papa, un concentré d’esprit, de cœur, de tripes… et l’occasion, rare, de questionner ses propres valeurs. Idéal pour un rendez-vous galant, vraiment? «Ça peut lancer des conversations délicates, au contraire, rit Noémi Schaub. Et l’AJAR n’assure pas le service après-vente!»

Après Lausanne et un passage à Genève cet automne, le collectif espère emmener le spectacle sur les routes de Suisse romande. Ne dit-on pas que l’amour ne connaît aucune frontière?


«Amours collectives». Du 14 au 16 février au Théâtre 2.21, Lausanne. Puis à Plan-les-Ouates (GE) cet automne.