L'Asie se ferme aux Chinois, Pékin met en garde contre la "panique inutile"

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Pékin (awp/afp) - La Chine, où le bilan de l'épidémie de coronavirus s'est alourdi à 213 morts, a mis en garde vendredi contre la "panique inutile" au moment où des pays d'Asie commencent à fermer leurs frontières aux voyageurs en provenance de Chine et où les opérations de rapatriement de Wuhan, berceau de l'épidémie, se poursuivent.

"Il n'est pas nécessaire de paniquer inutilement, ni de prendre des mesures excessives", a estimé l'ambassadeur chinois à l'ONU à Genève, Xu Chen, soulignant que "l'Organisation mondiale de la santé (OMS) faisait pleinement confiance à la Chine".

Un appel lancé alors que le Vietnam a annoncé la suspension des visas de tourisme pour tous les Chinois et les étrangers ayant séjourné en Chine durant les deux dernières semaines. Singapour et la Mongolie ont aussi suspendu l'entrée de l'ensemble des voyageurs en provenance du territoire chinois.

La Chine a fait état vendredi de 43 nouveaux décès en 24 heures, soit un bilan total de 213 morts. Et le nombre de patients contaminés approche 10.000 en Chine continentale (hors Hong Kong et Macao).

Critiqué par de nombreux Chinois, qui accusent les autorités d'avoir tardé à publier des informations sur le virus, le principal responsable politique de la ville de Wuhan (centre) a avoué "se reprocher" d'avoir ordonné trop tardivement des restrictions aux déplacements.

"Je suis envahi par un sentiment de culpabilité, par les remords", a confié Ma Guoqiang, le secrétaire local du Parti communiste chinois (PCC), dans un entretien avec la télévision publique CCTV, dans un rare aveu de responsabilité d'un homme politique chinois.

Dans un contexte de forte inquiétude à l'étranger, un avion transportant quelque 200 Français de Wuhan a atterri vendredi à Istres (sud de la France). Ils seront mis à l'isolement durant 14 jours dans un centre de vacances près de Marseille. L'un des rapatriés présente des "symptômes" du coronavirus.

Pays inquiets

Un avion transportant 83 Britanniques et 27 autres étrangers, affrété en coopération avec les autorités espagnoles, a par ailleurs atterri sur la base aérienne de Brize Norton, à environ 120 kilomètres à l'ouest de Londres, alors que deux cas d'infection au virus ont été confirmés vendredi au Royaume-Uni.

De son côté, Washington, qui a déjà évacué ses premiers ressortissants, a monté jeudi soir son niveau d'alerte au niveau maximal en recommandant "de ne pas se rendre" en Chine. Le Japon a émis vendredi une recommandation similaire.

Et la Russie, où ont été annoncés vendredi les deux premiers cas de coronavirus, s'apprête aussi à évacuer ses ressortissants de Wuhan et de l'île chinoise de Hainan, prisée des touristes et où se trouvent 2.665 Russes en voyages organisés.

L'Organisation mondiale de la santé (OMS), critiquée précédemment pour ses atermoiements, a déclaré jeudi que l'épidémie était "une urgence de santé publique de portée internationale".

Si l'immense majorité des cas de contamination restent localisés en Chine, au premier chef dans la province du Hubei (centre) et sa capitale Wuhan, une centaine ont également été déclarés dans près de 20 autres pays, y compris en Europe.

Outre l'Asie, les mesures de précaution internationales s'intensifient également ailleurs dans le monde.

L'Italie et Israël ont annoncé suspendre tous les vols en provenance de Chine, tandis que plus d'une quinzaine de compagnies aériennes, dont Air France, British Airways et Lufthansa, ont déjà interrompu leurs vols vers le pays.

'Mesures excessives'

Face à ces mesures, l'OMS a averti jeudi que les restrictions à la circulation des personnes et des biens pendant une urgence de santé publique pourraient s'avérer "inefficaces", perturber la distribution de l'aide et plomber l'économie des pays touchés.

En Chine même, Wuhan et le Hubei sont coupés du monde depuis le 23 février: un cordon sanitaire interdit à quelque 56 millions d'habitants d'en sortir.

Dans le sillage des Etats-Unis, du Japon et de la Corée du sud, plusieurs pays continuent d'organiser l'évacuation d'une partie de leurs ressortissants piégés à Wuhan.

Après le premier avion arrivé vendredi en France, un second vol est prévu plus tard cette semaine afin d'évacuer d'autres Français et des ressortissants d'autres pays européens.

L'Inde a elle aussi envoyé un avion pour récupérer 300 de ses ressortissants.

Trois personnes évacuées en avion par le Japon ont été testées positives à leur arrivée sur le sol japonais. Deux d'entre elles ne présentaient aucun symptôme, ce qui illustre la difficulté de détecter le nouveau coronavirus.

D'autres pays -- Italie, Allemagne, Canada ou encore Bangladesh -- planifient également leurs propres opérations.

A Wuhan, qui garde des allures de ville fantôme, les hôpitaux restent débordés. Pour faire face, les autorités s'activent pour construire deux nouveaux hôpitaux, qui devraient accueillir leurs premiers patients respectivement les 3 et 6 février.

Commerces désertés

"Notre plus grande préoccupation est la possibilité que le virus se propage dans des pays dont les systèmes de santé sont plus faibles", s'est alarmé jeudi le directeur de l'OMS Tedros Adhanom Ghebreyesus.

D'autant que des transmissions interhumaines se multiplient hors de Chine, du Japon aux Etats-Unis en passant par l'Europe.

A travers la Chine, où les congés du Nouvel an lunaire sont prolongés jusqu'au 2 février, les habitants désertent commerces et restaurants, tandis que les personnes originaires de Wuhan se heurtent à la suspicion.

Les communautés chinoises à l'étranger font elles aussi part d'une recrudescence d'attitudes discriminatoires à leur encontre.

afp/rp