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Les vidéos diffusées par «Quotidien» sur Wuhan sont-elles authentiques ?

L'émission de Yann Barthès est revenue sur une séquence publiée mercredi soir, montrant des images circulant sur les réseaux sociaux.

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Question posée le 30/01/2020

Bonjour,

Vous avez été plusieurs à nous interroger sur des images diffusées par Quotidien, mercredi soir, à propos de l’épidémie de coronavirus à Wuhan. Le sujet est consacré à la mise en quarantaine de la ville, depuis plus d’une semaine désormais, et certaines images montrent ce qui est censé s’y passer. On y voit plusieurs personnes s’évanouir soudainement, des ambulances venant chercher des gens à terre et crachant du sang, ou encore des policiers mettant sous scellés des appartements, avec leurs habitants encore à l’intérieur. «C’est flippant», commente la journaliste en retour de plateau.

En effet. Certaines de ces images circulent depuis une semaine sur les réseaux sociaux, et vous nous avez d’ailleurs déjà demandé de les vérifier. Ce que nous avons tenté de faire, sans succès pour l’instant. Après la diffusion de cette séquence, plusieurs internautes se sont demandé si Quotidien avait vérifié l’authenticité des images récupérées sur les réseaux sociaux, puis diffusées.

Les premières images sont filmées par un professeur irlandais en psychologie, basé à Wuhan, qui rapporte pour la chaîne britannique Channel 4 comment se déroule la vie quotidienne dans cette ville coupée du monde. «En ce moment des vidéos comme celles-ci circulent sur les réseaux», annonce la journaliste pour introduire des images de personnes à terre, dans la rue, dans le métro ou encore dans un hôtel. Une séquence d’un patient à l’hôpital et une autre où la police séquestre des habitants dans leur appartement, en bloquant les portes avec des barres de fer, ont aussi fait réagir, certains internautes cherchant des indices pour douter de leur authenticité, comme des passants en manches courtes alors qu’il fait actuellement entre cinq et dix degrés à Wuhan.

Une source interne à Quotidien fait remarquer que ce sont les community-managers qui ont exagéré sur les réseaux sociaux, en étant un peu trop affirmatifs, mais que la journaliste n’avait pas affirmé que les images avaient été filmées dans la ville du Hubei, seulement qu’elles «circulent sur les réseaux».

«Des dizaines de vidéos depuis le début de l’épidémie»

Contacté par CheckNews jeudi, Quotidien a indiqué que des réponses seraient données le soir même. En effet, dans un sujet intitulé «Coronavirus : gare aux fake news», la journaliste Lilia Hassaine revient sur la séquence : «Les vidéos qui circulent sur les réseaux sociaux, elles suscitent une forme de psychose. On trouve des centaines et des centaines de vidéos plus flippantes les unes que les autres mais souvent sans élément de contexte. Parmi elles, ces images de gens qui s’évanouissent. On en compte des dizaines depuis le début de l’épidémie.» Des images diffusées la veille sont alors de nouveau à l’antenne, et la journaliste d’expliquer : «Sur quelques-unes, on peut identifier de manière certaine des ambulances chinoises rouges et blanches. Les équipements, masques, donnent des indices […] même si on ne sait pas de quand elles datent.» La journaliste remarque que sur une des vidéos, on voit bien que le nom de la ville de Wuhan apparaît sur l’ambulance, mais que ce n’est pas le cas sur toutes. Et de conclure : «Une dernière série d’images que l’on a diffusées hier et qui sont contestées : ces vidéos où on voit des hommes clouer des planches sur une porte. En fait on a remarqué des affiches rouges, à chaque fois, sur chacune des vidéos et on a donc fait traduire le message écrit dessus, hier avant de les diffuser, et on peut lire "cette famille vient de Wuhan, ne pas entrer en contact", qui confirme que les logements de malades venant de Wuhan sont bien scellés par les autorités.» Ce qui suggère que les images n’ont donc pas été tournées à Wuhan.

A part pour les images des gens scellés chez eux, Quotidien n’indique donc pas avoir vérifié les vidéos avant de les diffuser, et se défend de l’avoir prétendu. De fait, il est très compliqué pour les journalistes de vérifier l’authenticité des images présentées comme filmées à Wuhan. CheckNews a été interpellé à plusieurs reprises sur ces sujets, notamment sur ces vidéos de personnes tombant comme des mouches. Et pour l’instant, nous n’avons publié aucune réponse à ce sujet. Pour une raison simple, ce travail de vérification s’avère beaucoup plus compliqué que prévu. Evidemment, la langue ne nous aide pas. Sans sinophone dans l’équipe, on ne peut non seulement pas comprendre le commentaire de ces vidéos, mais encore moins s’aider des indices habituels dans les images, comme des affiches ou des inscriptions par exemple. Pour chaque élément écrit, il faut se faire aider d’une personne décryptant les idéogrammes. Et surtout, si ces images circulent aujourd’hui sur Twitter, Facebook ou Instagram, elles ont au départ été publiées sur les réseaux sociaux chinois, tels que DouYin (la maison mère du service de vidéo TikTok) ou Weibo. Et ceux-ci sont très difficiles d’accès en dehors de la Chine. Pour accéder à Weibo par exemple, il faut être parrainé par un utilisateur ayant déjà un compte. Et DouYin n’est quasiment pas disponible en dehors de Chine, l’application par défaut sur les téléphones est en fait… TikTok et les deux sont cloisonnées. Quand on arrive à y accéder, ont expliqué nos confrères de Politifact qui ont rencontré le même problème, on remarque que… les vidéos sont publiées sans date. Impossible, donc, de savoir quand une vidéo a été publiée la première fois. Un élément évidemment indispensable pour authentifier une image.

Vérificateurs dans l’impasse

Pour certaines images, on arrive à retrouver des indices : une ambulance de la ville de Wuhan par exemple, comme l’a expliqué Quotidien. Mais sans connaître ni les auteurs des images, ni son contexte, il est quasiment impossible de dire si l’image en question a vraiment un rapport avec l’épidémie de coronavirus. L’IFCN, le réseau international de fact-checkers, a d’ailleurs publié un billet sur le sujet. Les vérificateurs, confrontés à de nombreuses vidéos présentées comme filmées à Wuhan, sont souvent dans l’impasse.

Selon un responsable de l’OMS interrogé par Snopes, les chutes spectaculaires présentées comme étant celles de malades du Wuhan seraient en fait «atypiques», puisque de tels malaises ne font pas partie des symptômes de la maladie. Il est possible que certaines vidéos soient authentiques ou encore que des personnes soient tombées pour d’autres raisons (un malaise par exemple) pendant l’épidémie de coronavirus, ce qui expliquerait que des personnes en combinaison viennent les secourir. Mais, en l’état, nous n’en savons rien.

Seule certitude, une personne a bien été retrouvée morte, restant sur un trottoir pendant plusieurs heures à Wuhan. L’image est devenue un symbole de l’épidémie. Le moyen de le vérifier ? Le journaliste de l’AFP sur place l’a constaté de ses propres yeux.

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