"Michou", figure des nuits parisiennes, a été enterré à Montmartre entouré d'une marée bleue

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Le patron du célèbre cabaret transformiste qui porte son nom, décédé à 88 ans, a été enterré au cimetière de Montmartre.  

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Les funérailles de Michel Catty à l'église St-Jean-de-Montmartre (LIONEL BONAVENTURE / AFP)

Au son des tambours, le corbillard bleu roi est parti quelques minutes avant du cabaret où reposait Michou, son propriétaire, et s’arrête devant la petite église St-Jean-de-Montmartre. Ouvrant le cortège, les étendards de la République de Montmartre, une association philanthropique dont faisait partie Michou, que tous ici décrivent comme généreux et distillant sans fin sa joie de vivre.

"C’était une belle personne" 

Conformément à ses dernières volontés, le patron repose dans un cercueil  capitonné, bleu lui aussi. La couleur, qui était devenue son emblème, est partout ce matin : le bleu roi des rubans aux fenêtres, au kiosque à journaux, et portés çà et là, qui un chapeau, une écharpe, qui un mascarat, jusqu’aux tresses teintes en bleu pour l’occasion. "C’était une belle personne", raconte, ému, un homme discret qui se tient en retrait, "il a fait beaucoup pour les homosexuels. C’était une sorte de soutien moral, à un moment où ce n’était pas simple." Un couple de riverains d’une soixantaine d’année est là, lui casquette et roses azur accrochées à la boutonnière, elle cheveux fushia : "Michou, c’est tout l’esprit libre de Montmartre, il est le symbole de toute une génération. On l’a croisé beaucoup dans nos balades, et c’est une générosité, un accueil… C’est la famille quoi."

FRANCE 2

Un hymne à la tolérance

Michou, de son vrai nom Michel Catty, voulait que ses obsèques soient une fête, alors au passage du cercueil, Montmartrois célèbres ou anonymes applaudissent. Il y a là Brigitte Macron, Alain Juppé, Helena Noguerra, Bernard Montiel, Patrice Laffont, Claude Lelouch ou encore Anny Duperey, qui ouvre l’hommage à l’intérieur de l’église par ces mots : "J'aimais le cabaret et un jour j'ai déboulé chez toi et j'ai découvert un état d'esprit. Et je suis devenue une abonnée. Ce cabaret, je ne l'ai jamais quitté pendant 45 ans. Tu as fait plus pour la tolérance que tous les discours... Maintenant tu vas te reposer".

Michel Catty avait ouvert en 1956 son établissement "Michou" qui a accueilli tous les jours pendant plus de 60 ans célébrités et inconnus venus dîner devant le spectacle d'artistes transformistes reprenant les chansons des grandes stars de l'époque. Alain Juppé, dont le premier mandat d’élu était à Montmartre, a les yeux qui brillent lorsqu’il évoque ses souvenirs : "C’était un de mes amis les plus fidèles, un homme de convictions, qui mettait de la joie et de la fantaisie dans ce quartier. C’était une belle cérémonie, assez joyeuse comme il le voulait, tout le monde a applaudi vous avez vu ?" Oscar Loup, le directeur artistique du cabaret, ne peut cacher sa tristesse en suivant le cortège funèbre. Il a perdu un ami proche, un inspirateur, et l’accompagne jusqu’au bout, avec la volonté de lui rendre hommage, "encore, encore, et encore." 

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 Line Renaud et Michou entourent Dalida lors d'une soirée dans un cabaret. (LECOEUVRE PHOTOTHEQUE)

Un dinosaure des nuits parisiennes  

Michou, défenseur de la diversité des genres et de la joie de vivre, était le dernier dinosaure des nuits parisiennes, une figure mythique de ses fameux cabarets. Il a même inspiré le classique La cage aux folles au cinéma, dans les années 1970. Jean-Jacques Debout et Chantal Goya, devenus eux aussi d’inoxydables piliers des soirées parisiennes, parlent volontiers de leur ami : "Montmartre sans Michou ne sera plus vraiment Montmartre, ça va faire un vide encore plus grand que quand Picasso est parti", s’enflamme Jean-Jacques Debout, "je l’ai connu en 1955, il avait débuté au Clairon de Montmartre chez Patachou, et avec Jacques Brel le soir il nous offrait des bières en préparant l’ouverture de son cabaret." Deux jeunes filles en perruques bleues forment des cœurs avec leurs mains. Les paparazzis ont terminé de mitrailler le cortège et elles posent, souriantes, tandis que le corbillard s’éloigne vers le cimetière au son des cloches.