Marathon de Paris : avec son frère, Thibaud va faire une "belle balade" en joëlette
by Mathilde DurandChaque semaine jusqu'au jour J, le JDD publie le portrait d'un coureur du Schneider Electric Marathon de Paris. Rencontre avec Jérémy Combe qui portera son frère Thibaud, atteint d'handicap mental, dans une joëlette. Une équipée familiale, de "Sainté à Paris".
Jérémy, 33 ans est un grand sportif. A son actif, des trails, des courses longues distances en France ou au Maroc. "J'ai une vingtaine de dossards par an", estime humblement le jeune homme. Cette année, il se lance à nouveau un défi. Il va participer au Schneider Electric Marathon de Paris* pour la seconde fois. Mais la course aura une autre saveur car il ne la fera pas seul. Accompagné de son père, d'amis proches de la famille, ils porteront son frère handicapé, Thibaud âgé de 28 ans, dans une joëlette. Une chaise montée sur une roue, munie de longues poignées, conçue pour être poussée ou tirée.
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Une course pour s'entraîner en mars
"Titi" souffre d'un handicap mental depuis sa naissance. Une maladie non-identifiée liée à des complications pendant la grossesse et qui tend vers l'autisme. Le jeune garçon ne peut pas courir de longue distance mais a l'habitude de suivre les membres de sa famille dans leurs exploits sportifs ou en vacances. S'il passe la semaine dans un centre pour personnes handicapées, Thibaud rentre tous les week-ends chez ses parents dans la banlieue stéphanoise. Et Jérémy passe le plus régulièrement possible des moments avec son frère. "Il vient souvent voir nos courses, il a même fini quelques épreuves avec moi en courant sur les derniers mètres", raconte-t-il.
Pour l'inclure pleinement dans ce projet qu'il mûrit depuis deux ans, Jérémy a sollicité l'association Générosi'Trail qui lui prête une joëlette. "C'est une association qui fait beaucoup de courses dans ma région. Les bénévoles ont déjà vu mon frère sur une ligne d'arrivée et ils nous avaient proposé de la tester. On avait même fait un tour dans un parc", se souvient le sportif. Sur la page Facebook de l'organisme, des clichés illustrent les exploits des utilisateurs avec ce dispositif tout-terrain. Ascension de cols, trails natures… Le 5 avril avril, les pavés parisiens devraient être une promenade de santé.
"Nous n'avons pas encore la joëlette, l'association nous la prête à partir de mi-février, voire mars, explique Jérémy. On pourra enfin commencer l'entraînement avec." Il envisage un roulement à six ou sept coureurs, pour pousser ou tracter en fonction des forces et des faiblesses. "Je pense qu'être à l'arrière sera le plus difficile, imagine le trentenaire. Nous allons essayer de faire une petite course vers chez nous en mars pour tester l'engin."
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4 à 5 sorties par semaine
Jérémy est confiant. Il est entouré d'une équipe de coureurs. "C'est mon deuxième marathon de Paris, le troisième pour mon père. Pour les amis qui nous accompagne ce sera le premier, mais ils ont déjà fait des trails avec des distances plus longues." C'est d’ailleurs son père qui a fait entrer la course dans la vie de la famille Combe. "Il court depuis une vingtaine d'années. Je l'accompagnais sur ses courses quand j'étais enfant, raconte le trentenaire. Il a même fait le marathon de New-York en 1993!"
Une passion qui a contaminé Jérémy en 2012. Il passe de deux ou trois sorties par semaines à cinq. "Depuis deux ans je suis en mode compétition. J'ai réussi à jouer les premiers rôles dans des courses de village, puis j'ai fait quelques compétitions partout en France." Il a notamment parcouru plusieurs fois les 76 kilomètres de la SaintéLyon, une course de nuit entre les deux cités rivales. Il part aussi régulièrement au Maroc faire des courses avec 68 kilomètres de dénivelé.
Pour le marathon, il a entrepris une préparation classique : quatre à cinq sorties par semaine, l'équivalent d'une centaine de kilomètres parcourus, quelques trails en régions mais pas de course sur toute. "J'ai également commencé une préparation physique : abdominaux, pompes… Du renforcement musculaire pour la joëlette. Je fais 42 pompes pour les 42 kilomètres, plus quelques exercices avec mes collègues de travail, tous les jours." Un entraînement de choc qu'il réalise sur le temps de ses pauses déjeuner. Marié avec deux enfants en bas âge, les soirées sont réservées à la famille.
Un cadeau pour ses parents
Malgré ses bons résultats sportifs, Jérémy a laissé l'esprit de compétition de côté pour ce marathon de Paris. "L'objectif, c'est de partager un moment en famille." Cette course, c'est avant tout un cadeau offert à ses parents pour leurs soixante ans. "C'était un beau moment, avec beaucoup d'émotion", se souvient Jérémy quand il repense au moment où il leur en a parlé. L'inscription, l'hôtel, la logistique : le trentenaire voulait offrir des souvenirs, "quelque chose qui n'a pas de prix".
Pour l'instant, c’est une sacrée logistique. Titi et sa famille vont partir à deux minibus. Un voyage direct Saint-Etienne-Paris, au plus proche de la zone de départ. Mais l'équipe pourrait être encore plus grande. Jérémy a créé une page Facebook : "Un marathon pour Titi". Chaque jour, il reçoit de nombreux messages de soutien, mais ne souhaite pas récolter de dons. "C'est pour partager l'aventure avec le plus de personnes possibles. C'est ouvert à tous!".
Pour partir à l'assaut de ces 42 kilomètres, l'équipe a un mental d'acier. "On ne va rien lâcher pour Thibaud. Il ne réalise pas encore, on va voir comment il va réagir, si cela va lui plaire, confie le grand frère. C'est un des plus jolis d'Europe, alors notre objectif c'est de faire une belle balade." Peu importe s'ils franchissent la ligne d’arrivée, l'essentiel c'est de profiter tous ensemble. Et pourquoi pas renouveler l'expérience en se constituant en association.
Votre plus grande crainte lors du marathon de Paris?
La météo, non pas pour les coureurs mais surtout pour mon frère. J'espère qu'il ne pleuvra pas tout du long.
A quoi pensez-vous quand vous courez?
Des pensées positives. Je me dis aussi que j'ai la chance de courir quand certains ne peuvent pas, ou plus.
Ce que vous écoutez quand vous courez?
Je n'écoute pas de musique vu que je fais surtout du trail. Je profite de la nature, riche dans les monts autour de Saint-Etienne.
Votre tic/gimmick avant que la course ne démarre?
Rien de spécial. Je me dis juste que c'est cool d'avoir un dossard accroché et que je suis prêt pour l'aventure qui nous attend.
La première chose que vous ferez une fois la ligne d'arrivée franchie?
Profitez au maximum de ce moment privilégié. ÊEtre heureux et immortaliser l'instant avec famille et amis.
Dans quel endroit de France ou du monde aimeriez-vous courir?
Partout, il y a tellement d'endroits magnifiques. Une vie ne suffira pas.
Pourquoi le marathon de Paris?
En étant un peu chauvin, je vais dire parce que Paris est la plus belle ville du monde.
* Le JDD est partenaire du Schneider Electric Marathon de Paris.