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Le Syctom gère trois incinérateurs près de Paris, comme celui-ci à Ivry-sur-Seine.© Manuel Cohen / Manuel Cohen

40 000 tonnes de déchets enfouies à cause de la grève en Île-de-France

Les déchets s'accumulent à cause de la grève des incinérateurs près de Paris. « Une catastrophe écologique », dénonce le gestionnaire, contraint de les enfouir.

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Les centres de traitement des déchets débordent à Paris et dans la petite couronne. Depuis le jeudi 23 janvier, à 22 heures, les trois incinérateurs du Syctom, qui gère les déchets de six millions d'habitants, sont quasiment à l'arrêt. « Sur les sept fours répartis sur trois sites à Saint-Ouen, Issy-les-Moulineaux et Ivry-sur-Seine, il n'en reste qu'un », indique le Syctom au Point.

Les salariés ont entamé une grève à l'appel de la CGT-Énergie pour protester contre la réforme des retraites. L'arrêt des incinérateurs avait été voté jusqu'au lundi 27 janvier dans un premier temps, mais le mouvement a été prolongé d'une semaine. « Ensuite, il nous faut deux jours environ pour les rallumer », explique le gestionnaire, qui n'attend pas un retour à la normale avant au moins mercredi.

« Une catastrophe écologique »

Pendant ce temps-là, il faut bien faire quelque chose des déchets non recyclables que les Franciliens continuent de produire : le Syctom en récupère 6 000 tonnes par jour. Une partie a été envoyée dans d'autres incinérateurs de la région, « mais on les a vite saturés ». Le reste, environ 5 000 tonnes par jour, a dû être enfoui. « D'habitude, on enfouit 6 % de nos déchets, principalement quand on a un four à l'arrêt pour maintenance ou une panne, détaille le gestionnaire. Là, on est plutôt sur du 85 % d'enfouissement. » Fin janvier, le Syctom a donc déjà enterré près d'un tiers de ses 150 000 tonnes enfouies annuellement.

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Quand ils ne sont pas incinérés, les déchets non recyclables sont enfouis sur des sites comme celui-ci à Martigues, dans les Bouches-du-Rhône.© Cyril BECQUART / ONLY FRANCE

Mais avec la prolongation du mouvement, l'enfouissement pourrait ne pas suffire. « Pendant une semaine, on a fait de la dentelle pour voir où envoyer les 1 000 camions quotidiens, mais là, c'est compliqué parce qu'on a saturé toutes nos alternatives. » Les grévistes ont aussi arrêté de gérer les fosses où sont déversés les déchets en attente d'être incinérés ou envoyés à l'enfouissement, et il devient compliqué d'en déposer de nouveaux.

La collecte des déchets s'en trouve mécaniquement affectée. Dans certaines villes et arrondissements de Paris, les poubelles ne sont plus ramassées. Pour éviter tout problème sanitaire, le président du Syctom a demandé au préfet de réquisitionner du personnel, « pour gérer les fosses et pouvoir continuer de ramasser des déchets », indique le gestionnaire. « Au moins, on pourrait continuer à en enfouir. C'est une catastrophe écologique, mais c'est déjà ça. »

700 000 euros de pertes par jour

Le Syctom estime que la grève lui coûte 700 000 euros par jour, de surcoût et de manque à gagner. Car la chaleur dégagée par les incinérateurs est revendue au réseau de chauffage urbain. « On fournit à la Compagnie parisienne de chauffage urbain le chauffage de 300 000 équivalent-logements, là ils ont dû avoir recours à des énergies fossiles pour continuer à chauffer les gens. »

Du côté de la CGT-Énergie, on se félicite de l'ampleur du mouvement, et on renvoie la balle vers le gouvernement. « Jamais les trois usines n'avaient été arrêtées en même temps et c'est le gouvernement qui est à l'origine de cette crise », lance au Monde Julien Lambert, membre du bureau de la fédération. Dans Le Figaro, le responsable de la CGT-Énergie en Île-de-France Olivier Fégueux enfonce le clou : « Quand est-ce que le gouvernement va comprendre ? Quand il y aura un black-out en énergie ? »