Donations : anticipez votre succession en évitant les pièges
Une succession se prépare longtemps à l’avance, surtout si le patrimoine est important. Parmi les dispositifs existants, celui de la donation-partage est le meilleur moyen de désamorcer les conflits futurs. En outre, la législation permet d’effectuer des donations tous les quinze ans pour réduire la facture fiscale le moment venu, voire la supprimer en totalité. L'analyse de Patrick Janel, responsable gestion privée chez Equance.
by Patrick JanelComment bien préparer sa succession afin de prévenir les conflits intra-familiaux pouvant survenir dans pareille situation ? En effectuant une ou plusieurs donations de son vivant et pas seulement pour des raisons fiscales.
Mieux, il est préférable d’opter pour une donation-partage. Il s’agit alors d’anticiper le partage de son patrimoine en le distribuant en partie ou en totalité à tous ses héritiers même s’il n’est pas obligatoire de donner la même valeur à chacun.
Ainsi, vous aurez la possibilité d’individualiser les biens donnés à vos enfants. À l’opposé, une donation d’un bien en indivision (plusieurs personnes deviennent le propriétaire d’un même bien) est qualifiée par les notaires de «donation imparfaite», ce qui peut annihiler les objectifs visés.
Valeur du don figée une fois pour toute
En effet, au moment de la succession, le partage sera réalisé sur la base des valeurs données lors de la donation-partage. La valeur des biens est ainsi figée entre le moment de la donation-partage et celui du décès du donateur. Ces valeurs sont donc connues à l’avance et cela contribue grandement à désamorcer les querelles lors de la succession.
En effet, si des biens (notamment immobiliers) ont été transmis lors d’une donation simple, ceux-ci sont réévalués en fonction de l’évolution du marché et il faut alors envisager, le moment venu, des compensations financières entre héritiers qui ne sont pas toujours bien anticipées.
La donation simple peut ainsi devenir source de conflit, surtout si des biens immobiliers, des œuvres d’art ou des portefeuilles financiers ont vu leur valeur évoluer très différemment entre elles. Le rééquilibrage peut entraîner des crispations.
Or, une donation-partage réalisée en harmonie familiale sera ainsi mieux expliquée et comprise par les personnes concernées.
Concernant l’aspect fiscal, rappelons que chaque parent a la possibilité de donner à chaque enfant l’équivalent de 100.000 euros tous les quinze ans. Il peut s’agir d’une somme d’argent ou d’un don manuel (bijou, voiture, œuvre d’art, bien immobilier etc.).
Au moment du décès, le notaire vérifie s’il y a eu une donation effectuée au cours des quinze dernières années pour calculer le montant de l’abattement encore disponible.
Dans le cas d’une donation effectuée par un grand-parent à un petit-enfant, il est possible de verser 31.865 euros tous les quinze ans.
Il en va de même pour les dons manuels de sommes d’argent (appelés dons «Sarkozy») qui autorisent le donateur, pourvu qu’il soit âgé de moins de 80 ans, à verser une somme plafonnée à 31.865 euros tous les quinze ans à ses enfants, petits-enfants, arrière-petits-enfants, neveux ou nièces, à condition que le bénéficiaire soit majeur.
Transmettre la seule nue-propriété est fiscalement avantageux
En France, la donation d’un bien immobilier peut également être effectuée en démembrement de propriété. Il s’agit d’un dispositif astucieux permettant de transmettre la nue-propriété d’un bien tout en conservant l’usufruit jusqu’à son décès (démembrement viager).
Pendant cette période intermédiaire, vous pouvez donc continuer à jouir de ce bien, en le louant pour en percevoir des revenus ou en l’occupant.
Ainsi, la valeur de ce bien va être estimée au moment de la donation, non pas en pleine propriété mais à sa valeur en nue-propriété qui est établie en fonction de l’âge de l’usufruitier (exemple, à 63 ans, l’usufruit vaudra 40%).
Plus ce dernier est jeune, plus la valeur de la nue-propriété sera décotée et permettra de réduire au maximum la base imposable du bien au moment de la donation.
L’abattement de 100.000 euros pourra ainsi être préservée. En outre, au moment du décès du donateur, le bénéficiaire de la donation d’un bien en démembrement se retrouvera plein propriétaire du bien et n’aura pas de droits de succession à payer puisque le bien aura déjà été transmis.
La solution de la SCI
Enfin, si vous ne détenez qu’un seul bien immobilier, il devient alors difficile de réaliser une donation-partage. Dans ce cas, il est fortement recommandé de créer une SCI (société civile immobilière) afin de pouvoir réaliser une donation-partage et non une donation «imparfaite».
Ce sont les parts de la SCI qui sont alors distribuées aux héritiers et non le bien directement. Une cession des parts d’un héritier pourra avoir lieu sans forcément entraîner la vente du bien en question.
Une SCI peut aussi regrouper plusieurs biens immobiliers et facilite ainsi la transmission du patrimoine. Fiscalement, le dispositif s’avère intéressant, surtout lorsqu’il est bien anticipé.
En effet, vous aurez la possibilité de donner 100.000 euros en parts de SCI à vos héritiers tous les quinze ans. Dans certains cas, la transmission s’effectuera ainsi, via ce dispositif, sans que vos héritiers n’aient à payer, le moment venu, le moindre euro de droit de succession.