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Le dessinateur Jul avec la photo d'Emmanuel MacronAFP - JOEL SAGET

Macron pose avec un T-shirt anti-LBD : la classe politique réagit, les syndicats de policiers scandalisés 

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Lors de sa visite au festival de la BD d'Angoulême ce jeudi, Emmanuel Macron a posé avec un t-shirt contre les violences policières sur lequel est inscrit "LBD 2020", sous le dessin d'un personnage éborgné. Si le président a évoqué "un pays libre, démocratique, qui aime l'insolence", la photo ne passe pas auprès de plusieurs syndicats de policiers. La classe politique a également réagi. 

Emmanuel Macron avait posé tout sourire jeudi au festival d'Angoulême avec un T-shirt offert par le dessinateur Jul, qui représentait un Fauve (la récompense attribuée à Angoulême) éborgné. Sous le dessin était écrit: "LBD 2020", référence au lanceur de balles de défense (LBD) et à l'acronyme choisi pour l'année de la BD (BD 2020). 

"J'aurais préféré qu'il interdise depuis longtemps les LBD plutôt qu'il en sourie sur une photo"

L'eurodéputé EELV Yannick Jadot s'est dit vendredi "choqué" par la photo du chef de l'Etat posant avec un T-shirt dénonçant les violences policières, tandis que la porte-parole du gouvernement Sibeth Ndiaye a défendu "la liberté de caricaturer". "Je suis choqué par cette photo car la responsabilité du président de la République n'est pas de rire ou sourire par rapport à cette situation", a réagi M. Jadot sur Europe 1, en évoquant les "dizaines d'éborgnés dans notre pays". La responsabilité du chef de l'Etat, "c'est d'empêcher que ça arrive", a-t-il ajouté, et "plutôt qu'organiser avec son ministre de l'Intérieur une rupture dans le pacte républicain du maintien de l'ordre, j'aurais préféré qu'il interdise depuis longtemps les LBD plutôt qu'il en sourie sur une photo". 

"La liberté de caricaturer est heureusement préservée en France"

Sur franceinfo, la porte-parole du gouvernement Sibeth Ndiaye a défendu cette photo en se disant, "tout comme le président d'ailleurs, très attachée à la liberté de caricaturer". "La liberté de caricaturer est heureusement préservée en France, donc moi ça ne me dérange pas du tout cette photo", a-t-elle ajouté, en défendant de nouveau la "position très équilibrée" de l'exécutif, entre "confiance" aux forces de l'ordre et "exigence", face aux critiques de "beaucoup de nos concitoyens qui disent qu'on n'est pas assez en empathie et qu'en quelque sorte on protégerait les policiers". 

Le député LR Eric Ciotti s'est insurgé contre cette photo ("un outil de propagande antipolice qui n'a rien à faire entre les mains du président de la République") tout comme le chef de file de LFI Jean-Luc Mélenchon ("le président banalise les violences policières"). 

Christophe Castaner tente d'éteindre la polémique

"Il y a les photos et il y a les mots. (...) Les mots sont toujours plus importants. Le président de la République a été extrêmement clair sur le fait qu'il sait que les forces de sécurité intérieure sont mobilisées chaque jour, chaque nuit...", a déclaré M. Castaner devant la presse sur le site du tunnel sous la Manche. 

"Il a l'occasion de redire son soutien plein et entier, son engagement aux côtés des forces de sécurité et de dénoncer les violences, les violences qu'ils ont hélas trop souvent subies et qu'ils subissent de façon permanente aussi dans leur quotidien", a poursuivi M. Castaner, qui visitait le site à l'occasion du Brexit. 

Les policiers "sont là pour protéger les Français, ils sont mobilisés et ils le font. Voilà, restons sur l'essentiel. L'essentiel, c'est plutôt les mots du président de la République que les commentaires liés à une photo", a conclu le ministre de l'Intérieur. 

Les syndicats de policiers scandalisés 

Trois des principaux syndicats de policiers se sont insurgés jeudi auprès de l'AFP contre le choix d'Emmanuel Macron de poser avec un t-shirt dénonçant les violences policières, estimant que le geste présidentiel était "scandaleux".

"Il y a beaucoup de colère et d'incompréhension. Ça ne passe pas du tout dans les rangs", a réagi Yves Lefebvre, secrétaire général de l'Unité-SGP-FO. Pour lui, la photo du chef de l'Etat est "une marque de défiance et de mépris à l'égard de ceux qui lui ont permis d'être encore président" grâce à leurs actions de maintien de l'ordre "du 1er décembre 2018 et de mars 2019, au moment où la République vacillait" pendant la crise des Gilets jaunes, a-t-il ajouté. "On attend autre chose d'un président. C'est scandaleux. On se demande s'il y a des conseillers en communication à l'Elysée", a-t-il poursuivi. 

Fabien Vanhemelryck, secrétaire général d'Alliance, a fait part également de la colère des policiers: "On attend autre chose d'un président de la République qu'il pose avec un t-shirt insinuant que les forces de l'ordre éborgnent les gens". "Le problème, ce n'est pas le t-shirt, que d'ailleurs, en aucun cas, nous ne cautionnons mais ce n’était pas le débat dans ce cas !", a expliqué M. Vanhemelryck. " La liberté d'expression ne doit pas être un prétexte. Le fait que le président pose avec ce t-shirt (...) est choquant", a-t-il dit. Pour lui, "ce signal" est "ce qu'il y a de pire dans le contexte actuel de chaos, au moment où la police et la gendarmerie sont les derniers remparts de la République". 

Cette photo du président de la République "tenant en main un t-shirt LBD 2020 avec un personnage à l'œil crevé pose question", a réagi Philippe Capon, secrétaire général de l'Unsa Police. Il a "regretté que le président en rajoute dans un positionnement polémique sur un sujet important où l'ironie et la dérision n'ont pas leur place". M. Capon a "rappelé que les manifestations n'ont jamais été aussi nombreuses depuis mai 2017, date de l'élection du président Emmanuel Macron à la tête du pays". "Les forces de l'ordre ont malheureusement passé plus de temps à faire du maintien de l'ordre qu'à se consacrer à la sécurité des Français", a-t-il conclu. 

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