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Un membre du personnel (à gauche) vérifie la température corporelle d'un passant à un point de contrôle dans le village Changping de Wanzhou, le 30 janvier 2020 © AFP / Wang Quanchao / XINHUA

Les rumeurs sur les origines du coronavirus

La nouvelle épidémie de coronavirus apparue en Chine est officiellement une "urgence de santé publique de portée internationale".

Le directeur de l’Organisation mondiale de la santé a fait une déclaration hier soir

En résumé, l’OMS déclare cette "urgence internationale" non pas à cause de ce qui se passe en Chine, mais à cause de cas qui apparaissent dans les autres pays. 

L’OMS s’inquiète également de l’arrivée du virus dans des régions où le système de santé est défaillant.

Ce qui se répand également, ce sont les rumeurs sur la nature et sur l’origine de ce nouveau virus

Si le nouveau coronavirus se propage rapidement, les rumeurs sur son compte également. Un exemple classique : celui de sa création par l’armée américaine. Des publications (qui circulent toujours sur Facebook) montrent le court extrait d’un brevet déposé aux Etats-Unis en 2003, concernant un coronavirus, de quoi prouver que le virus est une invention humaine. 

Or, si l’on remonte à la source : il est alors très simple de voir que le texte de ce brevet concerne bien un coronavirus et qu’il date effectivement de 2003, mais, il n’a rien à voir avec le coronavirus en cause dans l’épidémie actuelle. Dans le brevet, il y est question de la séquence génétique du virus du SRAS. 

Son nom vous évoque surement des souvenirs. Ce virus est à l’origine d’une pandémie en 2002 déjà partie de Chine, mais sans lien avec celle qui sévit actuellement. 

Autre précision importante : le virus du Sras n’a pas était créé par des scientifiques, au contraire ! C’est précisément parce qu’il circulait déjà naturellement dans la population mondiale que des chercheurs ont étudié son génome !

Contrairement à ce que semblent penser les auteurs de ces rumeurs, il n’existe pas un seul coronavirus

Le nouveau virus qui circule en Chine fait, en réalité, partie d’une grande famille d’au moins 40 espèces dont la grande majorité circule uniquement chez les animaux. Seuls sept coronavirus sont capables d’infecter l’homme.

Le nom des quatre coronavirus les plus communs nous est parfaitement inconnu : pourtant ils circulent chaque hiver en Europe où ils provoquent principalement des symptômes bénins. Leurs noms : HCoV-229E et HCoV-0C43, découverts dans les années 1960, ou encore HCoV-NL63 et HCoV-HKU1 découverts dans les années 2000. 

On compte donc en plus le fameux SRAS depuis 2002.

Et il y a aussi le moins connu virus du Mers, à qui l’on doit une épidémie en 2012. 

Enfin, le 2019nCoV, celui qui nous inquiète aujourd’hui...

Le génome de tous les coronavirus, animaux ou humains, se caractérise par une très grande taille. C’est un détail important pour comprendre l’origine naturelle des épidémies de coronavirus. En effet, le long génome a pour conséquence de voir régulièrement apparaître de petites erreurs -des recombinaisons- dans l’ARN des coronavirus lorsqu’ils se multiplient. 

Or, l’accumulation des erreurs, loin d’être un handicap,se révèle un avantage lorsqu’il s’agit de passer d’une espèce à une autre. Toutes ces erreurs de réplication facilitent l’apparition de mutations génétiques qui aident le coronavirus à survivre dans un nouvel environnement.

Le passage de la barrière des espèces est donc leur spécialité ?  

C'est d'ailleurs cette faculté qui a fait naître un flot de rumeurs sur l'origine du nouveau coronavirus. Ce qui est très vraisemblable c'est que le virus a des ancêtres chez les animaux. C’est déjà ce qu’en disait Tarik Jasarevic de l’OMS, il y a déjà deux semaines, même si à l’époque on ne savait pas encore que la transmission inter-humaine était possible. 

Juste après cette déclaration est apparue la rumeur de la soupe à la chauve-souris. Elle repose sur un fait : derrière les six premiers coronavirus qui circulent déjà chez l'homme, on retrouve des ancêtres chez les chauve-souris. Le nouveau coronavirus ne semble pas faire exception. Il possède des séquences communes avec des coronavirus de chauve-souris.

Mais l'histoire biologique ne se résume pas à un bouillon avalé dans un marché

Les spécialistes des chauve-souris que j’ai contactés estiment que ça n’a aucun lien. Le passage des virus se fait bien plus souvent par les déjections des chauve-souris qui concentrent les virus. Elles peuvent souiller de la nourriture consommée par d'autres animaux. C’est à l'intérieur de l’organisme de ces animaux que les coronavirus vont commencer à s'adapter et à muter. 

Pour le SRAS, c’était par exemple la civette (un petit mammifère) qui avait servi de passerelle génétique jusqu’à l’homme. Pour le nouveau virus, on ne sait pas encore, mais pas de doute que l’accélération des connaissances ne manquera pas de s’accompagner des rumeurs les plus folles.