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Jul a posé avec Emmanuel Macron et un t-shirt LBD 2020. — JOEL SAGET / AFP

Le dessinateur Jul revient sur la photo polémique avec Emmanuel Macron

Le président Emmanuel Macron a été photographié jeudi au festival de la BD d’Angoulême avec un t-shirt dénonçant les violences policières, offerte par le dessinateur Jul

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C’est la photo polémique du moment. Un cliché d' Emmanuel Macron, souriant, qui pose avec un t-shirt dénonçant les violences policières aux côtés du dessinateur Jul, pendant le Festival international de la BD (FIBD), occupait les conversations ce jeudi, à Angoulême et sur les réseaux sociaux.

Le président de la République rencontrait pour l’ouverture du festival des personnalités de la BD, artistes et éditeurs. A l’issue de la rencontre, Jul, auteur de Silex and the city et 50 nuances de Grecs, a offert au chef de l’Etat ce t-shirt customisé. Il représente la mascotte du festival, le Fauve créé par Lewis Trondheim, éborgné, avec la mention « LBD 2020 ». Une référence à l’acronyme de l’année de la BD, BD 2020, et au lanceur de balles de défense (LBD), critiqué pour les blessures graves qu’il provoque sur des manifestants. Le dessinateur est revenu pour 20 Minutes sur les coulisses de ce moment.

Quel est le contexte de cette photo ?

Au cours du déjeuner avec le président, nous avons beaucoup débattu. Nous avons parlé de la question des auteurs, pour se féliciter des avancées du rapport Racine, et du volontarisme qu’il pouvait y avoir du côté des pouvoirs publics pour améliorer la situation et la précarité des auteurs. A côté de ça, on a un peu élargi le débat aux questions d’actualité. Nous avons parlé d’environnement, et d’immobilité des pouvoirs publics sur les questions de biodiversité, de respect des traités, de limitation des pesticides… Ça a été un grand sujet, un peu enflammé, autour de la table, avec les personnes présentes. A la fin, on a évoqué cette question des violences policières en disant : « Ce n’est pas possible qu’il y ait une telle brutalité dans un Etat de droit, ça ne s’est jamais vu ». Le président Macron n’était pas d’accord, il disait qu’il récusait le terme de « violences policières ». Mais il a écouté malgré tout.

Pourquoi avoir choisi de lui montrer ce t-shirt à l’issue du déjeuner ?

Cette blague sur « LBD » et « BD 2020 », je l’avais déjà faite il y a quelques semaines au lancement au ministère de la Culture. « BD 2020 » est un événement, une célébration de la bande dessinée, mais nous ne sommes pas hors-sol : on tient compte de tout ce qu’il se passe autour de nous. C’était une manière de dire que la vitalité, la créativité, le foisonnement de la BD française, existent aussi parce que c’est une caisse de résonance pour le monde qui nous entoure. Et que les auteurs de BD sont ultrasensibles à ce qu’il se passe, que ça nourrit notre œuvre. Moi, en tant que dessinateur satirique, un peu politique, c’est quelque chose qui m’importe.

J’ai donc imprimé ce petit dessin, qui est un détournement de la mascotte d’Angoulême qu’a fait un collectif d’auteurs. Je me suis dit que c’était marrant d’avoir un t-shirt pour transmettre cette parole-là. Il y avait un côté polissonnerie, mais c’était important de parler de ça. Et j’étais content de pouvoir le faire, parce qu’on est dans une démocratie. Un président de la République peut écouter des auteurs, même s’ils ne sont pas d’accord avec lui.

Beaucoup de gens ont été surpris du sourire du président sur la photo, sur un sujet si sérieux…

C’est vrai que l’image est insolite, qu’elle m’a surprise. Au moment où je lui ai donné ce t-shirt « souvenir » de cet échange, il y a eu cette photo faite, sur laquelle il pose à côté du t-shirt. C’est extrêmement lunaire ! Je lui ai demandé à deux reprises « Vous êtes sûr que vous voulez faire cette photo ? » – « Oui, oui, oui, pas de problème ! ». C’est finalement ça qui est le plus étonnant. Mais sinon, il est dans son rôle.

Par la suite il s’est justifié en disant : « Oui, c’est la liberté d’expression, c’est quelque chose sur laquelle on doit être intransigeant, on peut ne pas être d’accord, on peut être critiqué ». Et je lui sais gré d’affirmer cette position qui est la position républicaine française des présidents avant lui, mais important de sa part, dans le cadre hystérisé qui est le nôtre aujourd’hui. Pour moi, c’était très sain d’avoir ce débat-là.

Est-ce que vous vous attendiez à ce que cette photo prenne une telle proportion ?

Ce qui est drôle c’est la façon dont un tel épiphénomène devient une espèce d’affaire nationale. C’est toujours la magie des médias ! Quand j’ai donné le t-shirt, le président a ri, mais sans souscrire au message porté par ce dessin. Il a vu que c’était une manière créative et éditorialisée de faire part d’un désaccord. Et ça change des cocktails molotov… On restait dans la sphère du débat démocratique et de la création artistique, mais on ne sait pas à notre époque les proportions que le numérique peut engendrer !

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