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Un « terrible prix à payer » si la communauté internationale échoue au Soudan, selon l’ONU

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Un haut responsable de l’ONU a averti que la communauté internationale risquait de devoir « payer un prix terrible » si elle ne parvenait pas à aider le Soudan pour reconstruire son économie en ruines, au moment où ce pays a engagé une transition vers un pouvoir civil.

« L’histoire du Soudan en 2020 n’est pas celle du précédent gouvernement », a souligné l’administrateur du Programme des Nations unies pour le développement (PNUD), Achim Steiner, dans une interview mardi à l’AFP lors d’une visite dans ce pays.

« C’est une histoire dans laquelle le fait d’attendre trop longtemps pour intervenir vraiment et soutenir ce processus risque de se solder par un terrible prix à payer », prévient-il.

Plus d’un an après le début d’un mouvement de contestation populaire qui a conduit en avril 2019 à la destitution du dictateur Omar el-Béchir, au pouvoir depuis 1989, le Soudan est confronté à une série de défis nourris par une crise économique profonde.

Son économie, après des années de récession, reste étranglée par une dette de plus de 60 milliards de dollars (54,4 milliards d’euros), une inflation d’environ 60%, un chômage galopant et des pénuries chroniques de carburant et de devises étrangères.

Pour M. Steiner, premier administrateur du PNUD à se rendre à Khartoum, ces défis doivent donner à la communauté internationale l’occasion de s’impliquer dans l’aide à ce pays du nord-est de l’Afrique.

« Voici un pays où la jeunesse, et en particulier les femmes, ont non seulement réussi à lancer une révolution pacifique mais aussi à mettre en place un programme visant à construire un Etat développé », a remarqué le diplomate allemand.

« La communauté internationale doit reconnaître à quel point ce mouvement est inhabituel et utile dans une région où abondent les nouvelles inquiétantes sur l’instabilité politique et l’extrémisme », affirme-t-il.

– Risque « d’oubli » –

Des responsables soudanais critiquent la tiédeur du soutien international au processus de réformes mené par le nouveau Premier ministre Abdallah Hamdok, un économiste respecté.

La plupart dénoncent le maintien par Washington du Soudan sur la liste des Etats « soutenant le terrorisme », aux côtés de l’Iran, de la Syrie et de la Corée du Nord, qui dissuade les investissements étrangers.

Depuis 1993, le Soudan est inscrit sur cette liste pour avoir notamment accueilli le chef du réseau Al-Qaïda Oussama ben Laden.

Ces dernières années, toutefois, Washington a progressivement renoué avec Khartoum, saluant des progrès dans la lutte antiterroriste, jusqu’à lever en 2017 un embargo économique vieux de 20 ans.

Un retrait du Soudan de la liste américaine pourrait prendre du temps, Washington voulant s’assurer auparavant que le régime Béchir est totalement démantelé.

M. Steiner a appelé le Congrès américain à accélérer ce retrait. « Nous risquons d’oublier que le Soudan (…) a une histoire beaucoup plus porteuse d’espoir qu’elle ne l’a été depuis 30 ans. Passerions-nous à côté d’une occasion de le soutenir? », a-t-il averti.

Au PNUD, « nous sommes décidés à intensifier notre engagement. C’est une proposition où tout le monde trouve son compte ».

– « Sages conseils » –

Les institutions financières internationales demandent au Soudan de mettre en oeuvre de profondes réformes pour relancer son économie.

« Notre rôle et celui de la Banque mondiale, du Fonds monétaire international est de donner des conseils plus sages que de simplement dire au Soudan ‘Vous ne réussirez pas dans vos réformes si vous ne faites pas ceci ou cela' », a souligné M. Steiner.

Il a salué les autorités de transition pour avoir engagé des pourparlers avec les groupes rebelles dans l’espoir de pacifier la région du Darfour ainsi que les Etats du Nil Bleu et du Kordofan-sud, après de longues années de conflits ayant fait des centaines de milliers de morts et déplacé des millions de personnes.

Pour M. Steiner, il appartient maintenant au peuple soudanais de décider de son avenir, mais il a besoin pour reconstruire le pays de l’aide internationale.

« Quand vous êtes à genoux, quand le précédent gouvernement a pillé les caisses du pays pendant des décennies, vous espérez de la communauté internationale qu’elle participe à cet effort de redressement », dit M. Steiner.

« Je pense que c’est l’histoire qui se déroule sous nos yeux au Soudan aujourd’hui », estime-t-il.