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(Crédits : Reuters)

Rénovation énergétique des bâtiments  : oui... mais pas n'importe comment  !

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OPINION. Impérative à l'heure du changement climatique, la rénovation thermique des bâtiments convainc de plus en plus de particuliers et d'entreprises, bien souvent séduits par les aides offertes par l'État. Attention cependant aux dérives, relativement nombreuses dans le secteur. Par Olivier Durin, rédacteur en chef du site "Le Monde de l'énergie" (*).

C'était une promesse de campagne d'Emmanuel Macron , devenue, depuis son élection, une priorité du gouvernement : en finir avec les « passoires thermiques » que sont toujours un grand nombre de bâtiments en France, qu'il s'agisse d'habitations privées, de locaux d'entreprises ou encore d'édifices publics. L'isolation des bâtiments représente, en effet, une urgence politique si la France entend atteindre ses objectifs en matière de réduction des gaz à effet de serre (GES), dont les émissions doivent être divisées par quatre d'ici 2025.

« Le » défi écologique de la décennie à venir

Or, le secteur du bâtiment représente, à lui seul, près de la moitié (44 %) de l'énergie consommée en France — loin devant celui des transports (32 %) ou de l'industrie (21 %) —, soit 1,1 tonne équivalente pétrole par an et par habitant. Chaque année, le secteur produit plus de 10 millions de tonnes de dioxyde de carbone, soit près du quart des émissions du pays, et dégage plus de 23 millions de tonnes de CO2. Par ailleurs, le poste « logement » pèse pour plus de 30 % dans le budget des ménages français, qui doivent donc réaliser des économies d'énergie s'ils veulent, dans un contexte de raréfaction des énergies fossiles, alléger leurs factures.

La rénovation énergétique des bâtiments s'impose donc comme « le » défi écologique de la décennie à venir. Un enjeu à la fois économique — car permettant de réduire nos importations d'hydrocarbures, de créer des emplois non délocalisables et de relancer le secteur du BTP —, environnemental — pour les raisons évoquées ci-dessus — et social — quelque cinq millions de Français vivant en situation de « précarité énergétique », selon l'Observatoire du même nom. Si le constat ne fait plus débat — notamment au niveau politique, l'État promettant un certain nombre d'aides aux particuliers désireux de mieux isoler leur logement —, les modalités de cette rénovation de masse restent, principalement, aux mains d'entreprises privées.

La vigilance est de mise

Et c'est là que le bât blesse. Bien décidées à profiter de l'intérêt grandissant des Français pour ces sujets, d'innombrables sociétés se sont engouffrées dans la brèche, proposant leurs services d'isolation et de rénovation aux particuliers et entreprises. Une tendance, une « mode » presque, qui n'est pas sans entraîner son lot de dérives : démarchage intempestif, arnaques en tout genre, détournement de fonds publics, malfaçons, surfacturations, contre-performances... sont en quelques années devenus monnaie courante. Ainsi, d'après les chiffres officiels de la DGCCRF, révélés le 3 octobre dernier, près de six entreprises contrôlées sur dix (56 %) « ne respecteraient pas pleinement les règles de protection des consommateurs ».

Dernière illustration en date avec le dossier de l'« isolgate ». Qui révèle que les laines minérales, matériaux des plus usités pour isoler les habitations, ne seraient pas aussi performantes que ce que les entreprises qui les commercialisent prétendent. C'est le constat sans appel qui ressort d'un arrêt de la Cour de cassation rendu le 20 novembre 2019 dans une affaire opposant — depuis 1998 — le syndicat des fabricants d'isolants en laines minérales (FILMM) à la PME Actis, spécialisée dans les isolants alternatifs. Un arrêt selon lequel la résistance thermique des laines minérales obtenue par des tests conduits en laboratoire est loin d'être la même en situation réelle. Mises en place dans les bâtiments, les laines minérales afficheraient des performances thermiques bien plus réduites,— jusqu'à 75 % inférieures — à la performance affichée en laboratoire. Pour les artisans et les habitants, les conséquences sont loin d'être anodines.

Les premiers devront changer de pratiques, en posant notamment un pare-vapeur et un écran de sous-toiture pour limiter les pertes d'énergie des laines de verre. Un "détail" que les fabricants n'ont pas cru bon de partager avec les artisans jusqu'alors. L'instauration d'un arrêté ministériel pour imposer des conditions précises de pose, garantes de la performance technique des laines minérales, serait en ce sens salutaire. Quant aux habitants, ils devront redoubler de précaution à l'heure de choisir les modalités de réalisation de leurs travaux de rénovation et surtout leur type d'isolant. Ceci pour éviter de mener des travaux d'isolation qui ne conduiraient ni à une amélioration des performances énergétiques de son habitat, ni donc, à une baisse de sa facture énergétique.

Le gouvernement se mobilise

Une succession de couacs qui a poussé le gouvernement a présenté, début novembre, le détail d'une campagne de communication à destination du grand public, mettant en garde contre des « pratiques contestables (qui) s'étendent du démarchage agressif (...) aux pratiques commerciales trompeuses (fausses allégations sur la qualité des artisans ou sur les performances des travaux), en passant par l'usurpation des signes distinctifs des services publics et du label RGE » (attribué aux entreprises « reconnues garantes de l'environnement »). Les autorités délivrent également un certain nombre de conseils et de « réflexes » à suivre lorsque l'on souhaite faire rénover son habitation. En somme, s'il convient bien de tout faire pour isoler son logement, la vigilance s'impose.

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(*) https://www.lemondedelenergie.com